L'écurie japonaise Super Aguri, en grosses difficultés financières depuis la fin de saison dernière, a annoncé mardi son retrait du Championnat du monde de Formule 1 et laisse un peloton maigrelet de 20 voitures sur la grille de départ du prochain Grand Prix, ce week-end en Turquie.

Ce retrait laisse la Formule 1 avec seulement 10 écuries en course, alors qu'initialement 12 écuries auraient dû participer à la saison 2008. L'écurie Prodrive avait de son côté baissé pavillon avant même de pouvoir s'inscrire, en novembre dernier.

«J'ai participé au championnat depuis deux ans et quatre mois avec l'écurie Super Aguri mais je suis au regret de vous informer que l'équipe va cesser toutes ses activités à partir d'aujourd'hui», a ainsi annoncé Aguri Suzuki, le directeur de la petite équipe, dans un communiqué.

L'ancien pilote japonais devenu patron d'écurie a précisé que le non paiement d'un parraineur majeur en fin de saison passée avait placé Super Aguri au bord du gouffre.

«L'équipe a pu lutter contre des voitures soutenues par de grands constructeurs et a marqué son premier point après seulement 22 courses, terminant à la neuvième place du Championnat constructeurs 2007, indique ainsi Aguri Suzuki. Mais le non respect d'un contrat par SS United Oil & Gas Company a conduit à un manque à gagner et immédiatement placé l'équipe en difficultés financières.»

Dernières places

Super Aguri, première écurie 100 % japonaise créée notamment pour permettre au populaire pilote local Takuma Sato de conserver un volant en Formule 1, n'avait ainsi pu mener que trois journées de tests cet hiver quand toutes les autres équipes accumulaient des milliers de kilomètres.

L'engagement de Super Aguri, largement soutenue par Honda, était donc sujet à caution avant la première course de la saison en Australie, mais un accord de dernière minute avait été trouvé avec le cabinet de conseil londonien spécialisé dans l'automobile Magma Group.

La situation semblait sauvée mais après les trois premiers Grands Prix où les voitures maison trustaient les dernières places, Magma faisait machine arrière. Un coup de pouce ponctuel de Honda permettait bien à Super Aguri de participer au Grand Prix d'Espagne à Barcelone fin avril mais le constructeur japonais n'envisageait pas qu'une telle situation perdure.

Un nouveau repreneur potentiel était annoncé: l'entreprise automobile allemande Weigl Group AG devait prendre une part «substantielle» dans l'écurie afin d'assurer son avenir sur les circuits.

Nouveau coup d'épée dans l'eau: Aguri Suzuki est aujourd'hui contraint de renoncer.

«Club de piranhas»

«Je voulais juste courir, a encore regretté Aguri Suzuki, amer. C'est un club de piranhas et je ne veux plus y mettre les doigts. Je veux remercier Dieu de m'avoir donné la chance de faire ce que je voulais, mais si quelqu'un veut s'engager en F1, je lui donnerais comme conseil de ne pas le faire.»

L'ancien pilote, qui avait été le premier Japonais à monter sur un podium en Formule 1 (3e au Grand Prix du Japon 1990), n'envisage donc pas de retour, même s'il trouvait un appui financier dans les semaines qui viennent.

«Selon la réglementation, vous pouvez manquer trois courses dans une saison, mais je n'ai pas l'intention de revenir», a-t-il affirmé.

La mésaventure de Super Aguri prouve une nouvelle fois qu'il devient de plus en plus dur de se faire une place en F1 sans l'appui d'un grand constructeur automobile. Six des dix écuries sont ainsi soutenues par des marques reconnues au niveau mondial (Renault, BMW Sauber, McLaren-Mercedes, Ferrari, Toyota, Honda).

Des milliardaires amateurs de sport automobile permettent à trois autres équipes d'exister (l'Indien Vijay Mallya pour Force India, l'Autrichien Dietrich Mateschitz pour Red Bull et Toro Rosso).

Seule la vénérable Williams fait figure d'exception, même si son motoriste Toyota lui procure de précieux subsides.