Pas facile d’être Paul St-Pierre Plamondon.

Au bulletin de nouvelles, le chef du Parti québécois (PQ) est rarement invité. Et quand il apparaît, la première question posée porte habituellement sur la date de son décès…

Certes, la question ne vient pas de nulle part. Elle s’explique par le déclin du parti, une tendance lourde. Mais elle mène à un cercle vicieux. Quand on parle du PQ, c’est avec un angle mortuaire, ce qui lui donne une aura de perdant. Puisqu’on dit que le parti périclite, on l’écoute moins, ce qui contribue à son effacement.

C’est un phénomène que l’on aggrave en disant le constater. Oublions donc les sondages, pour une fois. Parlons plutôt de M. St-Pierre Plamondon (PSPP).

Parmi les chefs actuels, il est le moins connu. Ce n’est pas un orateur flamboyant. Plus cérébral qu’émotif, il donne l’impression de plaider devant un juge. Mais si on s’intéresse au fond, il a de nombreuses qualités que les électeurs disent chercher.

On se plaint que la politique manque de substance. Or, PSPP formule des propositions concrètes sur une multitude de sujets, de l’urbanisme aux soins à domicile en passant par les garderies. Il attend avec ses notes en espérant qu’on l’invite à en débattre.

Certes, certaines idées sont mal ficelées, comme son gel de la taxe sur l’essence. Mais le PQ dispose d’un budget modeste et d’une équipe réduite. Il ne se bat pas à armes égales.

La population dit aussi vouloir des politiciens intègres. C’est le cas de PSPP. Il n’est pas là pour l’argent — il gagnait bien sa vie comme avocat avant de briguer la direction du PQ.

PSPP n’est pas là non plus pour le pouvoir. En se lançant en politique, il a pris le véhicule le plus cabossé. S’il rêvait d’une limousine, il serait déjà à la CAQ.

Comme chef, PSPP a osé défendre des positions impopulaires. En octobre 2021, le PQ était le seul parti officiel à critiquer la vaccination obligatoire des travailleurs de la santé. Malgré son appui à la vaccination, il craignait des « bris de services généralisés ». Ses critiques y ont vu une tentative désespérée d’attirer l’attention ou de se coller aux syndicats. N’empêche que PSPP voyait les sondages. Même s’il savait qu’il en payerait le prix, il a agi par conviction.

À l’Assemblée nationale, le PQ pouvait en 2018 compter sur une petite, mais solide équipe. Deux piliers, Véronique Hivon et Sylvain Gaudreault, ne reviendront pas. À ces départs s’ajoutent ceux de Martin Ouellet, discret, mais efficace leader parlementaire, et de Lorraine Richard, loyale défenseuse de ses électeurs de la Côte-Nord.

Pierre Nantel, Alexis Deschênes et d’autres essaieront de prendre le relais. Mais ils chausseront de grands souliers.

PSPP veut offrir un programme exhaustif de gouvernement, et c’est tout à son honneur. Sa prochaine campagne pourrait toutefois se résumer à une question plus simple : à quoi ressemblerait l’Assemblée nationale sans une bonne présence du PQ ?

La CAQ est une coalition très large. Certains de ses ministres ont peu d’intérêt pour le nationalisme. On oublie qu’en début de mandat, le gouvernement Legault promettait de ne pas toucher à la loi 101. Il a aussi repris le compromis libéral sur la nomination des juges à la Cour suprême, qui n’offre qu’un rôle de consultation au Québec.

M. Legault bombe le torse face au fédéral, à la recherche d’un vilain. Pour augmenter son rapport de force, il réclame une majorité encore plus écrasante de députés. Mais cela ne changerait pas grand-chose. La réponse du fédéral resterait la même.

Par contre, sa défense du nationalisme faiblirait sans la pression péquiste. Par exemple, si la CAQ n’essayait pas de courtiser cet électorat, elle n’aurait pas consacré autant d’énergie à protéger le français. Et comme le démontre la plus récente étude de Statistique Canada, malgré la nouvelle loi 96, le travail n’est pas terminé.

François Legault n’est pas éternel. Qui lui succédera à la tête de la CAQ ? Si c’est un nationaliste mou qui ne craint plus le PQ, la défense du français pourrait devenir symbolique.

M. St-Pierre Plamondon ne demande qu’à vendre son programme, mais le débat à venir s’annonce plus existentiel que technique. Il consiste à savoir si le PQ doit poursuivre son combat historique.

Le formuler ainsi offre à M. St-Pierre Plamondon la meilleure chance de victoire, peu importe comment il la définit.