Le rapport sur lequel Patrimoine Canada a basé sa décision de mettre la hache dans le financement de quatre écoles de cinéma, dont l'INIS, ne recommandait aucunement la mise au rancart du Programme de formation dans le secteur du film et de la vidéo (PNFSFV). Bien que le rapport de 83 pages que La Presse a obtenu émette des réserves sur l'efficacité du PNFSFV, ses auteurs estiment que le Ministère pouvait trouver sans mal «des solutions de rechange viables pour la gestion du programme». Entre 2001 et 2007, Patrimoine Canada a remis 16 050 000$ à quatre écoles qui forment des élèves dans le domaine: l'Institut national de l'image et du son (INIS), le Centre canadien du film, l'Institut national des arts de l'écran et le Réseau d'ateliers cinématographiques canadiens. En août, le ministère du Patrimoine, sous la houlette de Josée Verner, a décidé de mettre fin au PNFSFV et à plusieurs autres programmes. Total des compressions: 45 millions. Le rapport commandé par Patrimoine Canada se montre certes critique sur les capacités du programme à répondre aux critères de formation que demande l'industrie. On y lit notamment que «les données disponibles ne permettent pas vraiment de savoir si le programme a pour résultat l'embauche d'un plus grand nombre de diplômés de haut calibre dans le secteur». Pourtant, quand il a pris connaissance du rapport en juin, Michel G. Desjardins, directeur général de l'INIS, était loin de se douter que le programme dont il bénéficiait serait aboli deux mois plus tard. Sa compréhension du document ne lui a pas fait craindre le pire pour la subvention de 900 000$ qu'il recevait chaque année (25% de son budget) afin d'offrir des formations en cinéma, en télévision et en écriture de longs métrages. Même son de cloche du côté de l'Institut national des arts de l'écran. «Je ne pense pas que l'évaluation recommandait de mettre fin au programme», mentionne le directeur général, Max Berdowski. «La logique aurait voulu qu'on ait des discussions avec Patrimoine Canada, poursuit Michel G. Desjardins. Car cette étude-là, ils l'ont fait en nous consultant.» «Ce n'est pas notre performance qui a été jugée mais les besoins financiers du Ministère», ajoute-t-il. Il rappelle que lors du dépôt du budget fédéral en février dernier, le gouvernement Harper avait clairement indiqué que certains programmes pourraient disparaître pour des raisons budgétaires. En ce sens, certains critères d'évaluation étaient difficiles à quantifier, mentionne M. Desjardins. Il croit qu'on a posé volontairement un certains nombres de questions ambiguës, sachant que les réponses le seraient également. Selon lui, par exemple, il n'est pas évident de prouver que le programme a une incidence directe sur le nombre d'élèves qui réussissent à se trouver un emploi à la sortie de l'école. «On essaie d'appliquer des formules comptables alors qu'on est dans un monde de création.» Il cite en exemple le cas d'Anaïs Barbeau-Lavalette, finissante de l'INIS et réalisatrice du film Le ring. A-t-elle réussi grâce à son passage à l'école, où elle a pu bénéficier du programme, ou en raison de ses nombreuses expériences en dehors de l'institution? Un mélange des deux probablement, croit M. Desjardins. Rappelons que l'INIS a un taux de placement d'environ 80%. Le directeur général de l'institution s'explique mal pourquoi le document doute de la capacité du programme à répondre aux besoins de l'industrie. Il rappelle que l'INIS a été fondé à la demande des gens du milieu. Pour Philippe Gagnon, finissant de l'école qui a notamment réalisé Dans une galaxie près de chez vous 2, il s'avère difficile de quantifier ce genre de chose. «Ce n'est pas de la comptabilité», souligne-t-il. Mais chose certaine, insiste-t-il, après son passage à l'INIS, il n'a jamais cessé de travailler.

 

Avec William Leclerc