Pour continuer à remplir les salles, le cinéma québécois doit sortir de son terroir. Après Séraphin: un homme et son péché ou encore Le survenant, il est maintenant temps de réaliser plus de films à saveur internationale afin de continuer à intéresser les cinéphiles d'ici et, du même souffle, rayonner à l'étranger, estime la présidente de l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec (APFTQ), Claire Samson.

«Séraphin, on y tient, mais on ne le refera pas six fois! lance sans détour la présidente de l'APFTQ, interrogée hier à Saint-Sauveur, en marge de Ciné-Québec, une rencontre annuelle réunissant des distributeurs de films, des exploitants de salles et plusieurs représentants de l'industrie cinématographique. On ne peut pas penser avoir un cinéma aussi fort dans les prochaines années si on fait seulement des histoires locales. Sinon, on risque de désintéresser notre public et ça deviendrait un cinéma de folklore, soutient-elle. Il faut par exemple qu'on soit capable de faire des films sur Haïti ou encore sur les femmes en Arabie Saoudite», illustre-t-elle.

«Je pense que les cinéastes québécois et canadiens ont le droit d'avoir des ambitions de réaliser des films planétaires», ajoute Mme Samson. Pour y arriver, davantage d'ententes de coproduction doivent toutefois être signées, ajoute-t-elle. La réalisation de films avec l'aide de pays comme la France ou encore l'Italie permettrait de réduire les coûts de production. Ces partenariats donneraient également la possibilité au cinéma québécois de conquérir les marchés étrangers.

Seule ombre au tableau: les ententes de coproduction conclues entre le Canada et les autres pays ne sont maintenant plus adaptées aux réalités économiques d'aujourd'hui, estime la présidente de l'APFTQ.

Selon elle, le Canada est actuellement un «boulet bureaucratique» pour les pays qui souhaiteraient réaliser des projets en partenariat avec les artisans d'ici. Mme Samson a donc l'intention de faire pression auprès du ministère du Patrimoine du Canada afin qu'il facilite la concrétisation de projets cinématographiques avec des partenaires étrangers, notamment en revoyant les lignes directrices des traités. «Il faut nommer à Ottawa un «capitaine coprod»», dit-elle.

Au sujet des ententes de partenariat, le président de Téléfilm Canada, Michel Roy, assure que l'organisme est conscient que certaines règles doivent être modifiées. Il travaille actuellement sur le dossier avec le ministère du Patrimoine. Des changements pourraient être apportés au cours des prochains mois, assure-t-il.

Également présent lors de l'ouverture de Ciné-Québec, le président de la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC), François Macerola, croit à l'importance du cofinancement et des partenariats étrangers. En décembre, il a annoncé la création d'un comité qui doit se pencher sur la question. Les producteurs Roger Frappier (Dédé à travers les brumes), Denise Robert (De père en flic), Lorraine Richard (Pour toujours les Canadiens) et Lyse Lafontaine (Maman est chez le coiffeur) ont reçu le mandat de trouver des solutions concrètes à ce sujet. Ceux-ci devront rendre leurs conclusions un peu avant le Festival de Cannes, en mai.

«Le cinéma québécois a réussi à prendre tout l'espace qu'il peut occuper au Québec, dit-il. Maintenant, je pense que le succès international passe par la coproduction. Il faut aussi être capable d'aller chercher du financement ailleurs.»

Le président de la SODEC estime toutefois que le cinéma d'ici doit conserver sa spécificité québécoise s'il espère faire des gains à l'étranger. «On doit être très profondément québécois, croit-il, mais d'un autre côté, il ne faut pas être fermés sur les autres réalités.»