Voici donc, tel qu'annoncé, le second volet du diptyque de Johnnie To, Election, qu'on a tôt fait de comparer, avec raison, à une sorte de pendant hongkongais des Godfather de Coppola.

Le cinéaste reprend ses explorations psychologiques des triades et des mours mystérieuses de la pègre chinoise, de la Wo Shing plus précisément. Le premier opus, avec son final brutal, nous laissait un goût de poussière dans la gorge alors que, contre toute attente, le « héros « se montrait aussi dur et glacial qu'un tueur à gages. Notre «héros» donc, Lok, après avoir été élu président de la Wo Shing pour une période de deux ans, doit déjà céder sa place mais résistera.

Election 2 propose d'autres affrontements de rivaux en quête de pouvoir, d'autres revanches après trahison, d'autres malentendus et d'autres déchirements. Et Dieu (ou Lao Tseu) sait que les déchirements, au sein des triades, ça peut faire très mal...

Lok, qu'on imaginait «tempéré» et respectueux des traditions, par opposition à son rival hystérique dans le premier épisode, n'est plus le même homme. D'abord il bafoue les lois en demandant à être réélu. Puis il semble prêt à toutes les bassesses pour intimider ou anéantir l'adversaire. Son «opposant», le jeune Jimmy, pratiquement forcé de livrer la lutte, n'aspire qu'à devenir un honorable homme d'affaires, à abandonner le milieu interlope et à fonder une petite famille. Son initiation sera brutale et sa «chute» terrible, alors qu'il fera face à un dilemme impossible.

Election, premier et second volets, pourraient se fondre et n'être qu'un seul long métrage de 3h (ce qui n'est plus considéré comme un supplice par le spectateur moyen, depuis les standards revus par Peter Jackson et sa trilogie des Anneaux). Mais les producteurs, ou Johnnie To lui-même, auront préféré la technique Tarantino, façon Kill Bill, et ont offert l'ouvre en deux tranches, aussi parfaitement complémentaires qu'indépendantes l'une de l'autre.

La «violence graphique» était, dans le premier Election, contenue et presque toute concentrée en une seule scène, l'ultime assassinat du rival, scène dénuée d'artifice mais d'un réalisme brutal (assassinat? il s'agissait carrément d'un abattage). Au rayon du gore, ou plutôt de la démonstration de la violence, Johnnie To s'en permet davantage dans Election 2.

Mais cette violence, loin d'être gratuite, et ces scènes dures et cruelles, loin d'être tape à l'oil, ne font qu'ajouter au propos général, triste, amer, sombre et désespéré. Jusqu'où les hommes sont-ils prêts à aller dans leur recherche du pouvoir? Ne cherchez pas trop dans ce film un regard attendri, façon Coppola, sur le petit monde des criminels. En exagérant un peu, on dira que les personnages d'Election feraient passer les Corleone du Parrain pour la famille Plouffe.

Election 2 (Triad...) Drame de Johnnie To. Avec Louis Koo, Simon Yan, Nick Cheung.

Deuxième, donc dernier volet du diptyque de Johnnie To portant sur l'univers inquiétant des triades hongkongaises.

Sombre et dépressif, à l'image du premier volet, avec accès de violence ajoutés.

***