Hier encore, personne ne voulait de ma vieille familiale blanche. Maintenant, il y a mon fils.

Mon fils de 17 ans me donne beaucoup de soucis. Le vôtre aussi, j'imagine, mais peut-être pas pour les mêmes raisons. À la fin du mois, il obtiendra son permis de conduire et il veut une voiture. En fait, il veut l'une de mes voitures. D'accord, lui dis-je, tu m'offres combien?

«Rien, t'es mon père, tu peux m'en faire cadeau, non?»

Raisonnable, il souhaite recueillir l'une de mes plus anciennes autos qui, incidemment, a le même âge que lui. Je ne comprends pas. Il a toujours détesté cette voiture. D'ailleurs, il ne voulait jamais que je le dépose en face de son collège avec cette auto. «Elle me fait honte, voilà pourquoi», m'a-t-il longtemps répété.

Je lui ai rappelé cette anecdote. Et plusieurs autres encore avant de lui poser la question. Et si elle était gratuite, elle te ferait moins honte aujourd'hui?

«C'est une bonne auto, dit-il sur un ton charmeur. Je sais qu'elle a été fort bien entretenue. Et ça se voit. Pas une trace de rouille, son moteur tourne sans hésitation et son coffre est immense, parfait pour mon équipement de hockey. Alors, tu me la donnes!?» (Encore aujourd'hui, je ne sais pas si cette dernière phrase était une exclamation ou une interrogation.)

Au départ, il s'agissait, il est vrai, d'une voiture brisée que j'ai achetée pour une bouchée de pain. Je me suis amusé à la reconstruire, sans y consacrer une fortune, en appliquant à la lettre le principe du TLC (Tender, Loving and Care). Elle m'a bien servi. Elle a (très) bien vieilli. Aujourd'hui, elle a plus de 270 000 kilomètres au compteur. Elle vient tout juste de terminer sa période de rodage, diriez-vous en soulevant son capot.

Donnez au suivant

À la réflexion, de lui donner ou de la vendre à un particulier revient sensiblement au même. La voiture n'a, à proprement dit, aucune valeur monétaire. Quelques centaines de dollars tout au plus. Les deux jeux de pneus - chacun monté sur des jantes - dépassent largement le prix que je pourrais obtenir.

Hormis ses fréquentations assidues des stations-service et ses prétentions de s'abreuver que d'essence Super, cette voiture représente cependant une partenaire idéale pour mon fils. La présence de coussins de sécurité gonflables, d'un dispositif antiblocage des freins et d'un rouage à quatre roues motrices ajoute à ma tranquillité d'esprit. Je le saurais davantage en sécurité qu'au volant des tacots de ses amis vus récemment dans mon entrée de garage.

Mais pourquoi m'en départir? Elle me sert aussi encore très bien. Elle est fiable et solide. Et surtout, je peux la laisser, sans remords ou arrière-pensée, derrière moi. Personne n'a idée de la voler, ni même de la saccager. À l'exception des vidanges d'huile et des pleins d'essence, elle ne me coûte pas plus de 500$ par année. Assurances et immatriculation incluses.

Dans l'espoir de gagner du temps sur une décision - presque - prise, je lui ai demandé de me faire une proposition raisonnable. J'attends toujours.

«Je t'en ai fait une, non: tu me l'offres gratuitement!?»