Ossip Mandelstam était un poète de grande notoriété dans les années 20, en Union soviétique. La consolidation de Staline au pouvoir et l'imposition de la doctrine du réalisme socialiste en arts n'a pas eu l'heur de plaire à Mandelstam, dont l'oeuvre était beaucoup inspirée et pétrie de la musique des mots et de la résonance des sens.

Il s'est vite heurté aux autorités qui ont renoncé à le publier. Dans un geste de provocation, Mandelstam a composé une épigraphe sur le petit père des peuples, vite venue aux oreilles de la police secrète. Cela lui a valu la déportation en Sibérie, deux fois plutôt qu'une, et sa mort.

Après une minutieuse enquête, Robert Littell reconstitue la vie adulte du poète. Pour y arriver, il donne la parole à quelques personnages qui l'ont rencontré: amis, compagnons de cellule, garde du corps de Staline.

Ce choeur brise la linéarité du récit et présente plusieurs points de vue de la dureté et de la précarité de la vie durant les grandes purges staliniennes.

Littell est cependant, avant tout, journaliste. Il profite de son procédé pour nous livrer beaucoup d'informations, mais il oublie parfois de se cacher derrière ses personnages. Cela devient agaçant par exemple quand les mêmes expressions sont reprises par deux d'entre eux pour décrire le visage moucheté par la vérole ou le bras infirme du dictateur.

Il s'agit cependant là de menues réserves pour un livre captivant.

L'hirondelle avant l'orage,

Robert Littell, traduit par Cécile Arnaud

Baker Street, 332 pages, 34,95$

*** 1/2