Rarement un roman cumule-t-il autant de qualités que cet Arbre qui glapit de Françoise Cliche, avec son petit plaisir caché dans ses feuilles. L'histoire est de prime abord réjouissante: un groupe de retraités de Québec plonge avec plus ou moins de véritable empathie dans l'aventure de la coopération internationale au Guatemala afin d'y aménager une cour d'école.

Le récit de voyage narré par l'attachant Roméo Morin, ancien plombier dont l'humour irrésistible et la sensibilité parviennent à transformer la mauvaise foi, sert toutefois de prétexte à d'intelligentes incises décrivant les joies et tempêtes de la vie de l'homme, de sa relation tumultueuse avec sa mère à la rencontre déterminante avec sa femme et leurs pas accordés sur plusieurs années, première maison, premier enfant. Se déploie le portrait complexe et émouvant d'un homme confrontant le sentiment amoureux et le bonheur aux épreuves. On y bataille, on y lutte, on s'y résigne aussi.

 

Au rythme du mortier qui scelle les briques sous le soleil du Sud, Françoise Cliche aborde avec beaucoup de finesse la fuite en avant de la jeunesse, mais aussi les paradoxes de ces programmes de développement où la prétention nord-américaine rencontre le réel: manque de confort, promiscuité des dortoirs, et où le ridicule de notre idéalisme se heurte à la misère. Avec la légèreté d'un roman de vacances qui nous arrache de nombreux éclats de rire, L'Arbre qui glapit pose de grandes questions et frappe droit, nous laissant habité de cet espoir d'être un meilleur humain, tout simplement.

L'Arbre qui glapit

Françoise Cliche

XYZ, 272 pages, 25$

****1/2