Il y a un intérêt renouvelé pour les inégalités sociales chez les jeunes écrivains. On pense à Edouard Louis en France ou à Kevin Lambert au Québec. Et il faut ajouter Emmanuelle Richard, jeune écrivaine française dont le troisième roman, Désintégration, est une charge à fond de train contre l'exclusion dont sont victimes les travailleurs ordinaires, ceux qui font des heures de fou sans jamais améliorer leur sort.

Ceux dont la voix, au sein de la société française, compte peu ou pas. Dans la même veine autofictionnelle qu'Annie Ernaux - un modèle pour l'auteure, c'est évident -, Richard raconte sa vie de fille de banlieusards qui n'a pas fréquenté les bonnes écoles, ne porte pas les bons vêtements, ne connaît pas les codes.

Dans une société aussi hiérarchisée et codée que la France, c'est la honte. Et Emmanuelle Richard a un talent fou pour décrire cette honte qui se mue en colère, puis en haine, en réaction à la violence psychologique dont elle est victime.

Sa plume est rageuse pour décrire une classe de jeunes argentés qui n'est pas consciente de ses privilèges et qui exclut tous ceux qui ne font pas partie du «bon» groupe.

Il y a un souffle incroyable dans ce texte. L'auteure, qui a finalement «traversé le miroir» grâce à ses livres, n'oublie jamais d'où elle vient.

* * * 1/2

Désintégration. Emmanuelle Richard. Éditions de l'Olivier. 208 pages.