Peu d'individus peuvent se targuer de faire partie des privilégiés, et Milo Burke, un New-Yorkais bien ordinaire, n'est certainement pas l'un d'eux. Ses pairs le traitent de perdant, il travaille pour une université «médiocre», aime son fils «la plupart du temps», mais tente d'être un meilleur père que le sien même s'il considère la paternité avec scepticisme devant ce qu'il conçoit comme le «lent pourrissement des familles».

Lorsque tout menace de s'écrouler et qu'un vieil ami refait surface dans sa vie, il est forcé de remettre sa vie en question. «Amer d'amertume», Milo ressasse ses souvenirs pour tenter de comprendre comment, à 40 ans, il a pu atterrir aussi loin de ses ambitions d'étudiant.

Les rêveurs américains sont une espèce en voie d'extinction, écrit Lipsyte, et le cadavre du capitalisme est en état de décomposition. Ce roman brillant de lucidité jette un regard acerbe et cynique sur une époque «à la fois malade et merveilleuse», une Amérique désillusionnée, rendue anémique par ses rêves brisés, qui se contente de regarder la télé pendant que son monde est au bord de l'implosion.

Seule déception au menu: la traduction exagérément parisienne du slang new-yorkais, qui pourrait en irriter certains.

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Demande, et tu recevras. Sam Lipsyte. Monsieur Toussaint Louverture, 416 pages.