Cinq histoires, cinq destins contrariés par le Mur de Berlin: une bande dessinée raconte les expériences douloureuses de Berlinois confrontés à la division de leur ville. Une piqûre de rappel pour les jeunes générations.

En 1961, la jeune Ursula Malchow travaille à l'hôpital Lazarus de Berlin-Ouest. De l'autre côté de la rue, derrière le Mur de Berlin, un autre État, la République démocratique allemande.

Ursula Malchow et son mari infirmier assistent impuissants à plusieurs tentatives de fuite vers l'Ouest, qui se terminent parfois aux urgences de l'hôpital. Jusqu'au 4 septembre 1962, où Ernst Mundt, 41 ans, est tué sous leurs yeux par les tirs d'un policier est-allemand en essayant de franchir le Mur pour rejoindre sa mère à l'Ouest.

Mme Malchow a aujourd'hui 75 ans et vit toujours à deux pas de l'hôpital. Son histoire, comme quatre autres, est retracée dans la bande dessinée Berlin, ville divisée, des jeunes illustrateurs Thomas Henseler et Susanne Buddenberg. «Tout ce qui est raconté dans le livre est vrai», a-t-elle déclaré, émue, lors de la présentation de l'ouvrage au Mémorial du Mur de Berlin.

«Nous voulions raconter des histoires personnelles, situées dans des lieux authentiques, et en travaillant comme des historiens», explique à l'AFP Thomas Henseler.

Un passé proche mais déjà oublié

Témoignages, photographies, films, cartes, livres d'histoire et archives: pendant un an, les deux auteurs/dessinateurs ont effectué un travail de fourmi pour coller à la réalité historique.

«Il était important pour nous que les acteurs soient encore en vie, et que les lieux existent toujours», a ajouté Thomas Henseler.

À partir de leurs recherches documentaires, ils ont retenu «cinq histoires entre 1961 et 1989, qui recouvrent une variété de situations liées au Mur», détaille Susanne Buddenberg.

La bande dessinée raconte ainsi l'histoire de Detlef Matthes, jeune Est-Allemand intrigué par la moitié Ouest de la ville, qui photographie le Mur et ses environs malgré l'interdiction. Sa curiosité lui vaudra six semaines de prison.

Ou encore de la famille Holzapfel, qui s'échappe de Berlin-Est depuis le toit du bâtiment du ministère de l'Air du Reich (actuel ministère des Finances), grâce à une tyrolienne reliée à des proches situés en contrebas, de l'autre côté du Mur.

La bande dessinée vise à illustrer la réalité quotidienne dans Berlin coupé en deux et sous la dictature est-allemande, notamment pour les jeunes générations. «Les jeunes ne sont pas toujours conscients de ce passé, pourtant proche», regrette le jeune illustrateur.

Selon une enquête réalisée par l'Université libre de Berlin et parue fin juin, sur 7500 élèves de 14 à 16 ans interrogés, un tiers seulement qualifiaient la République démocratique allemande de dictature.