Après le grand retour de Passe-Partout et du thermos dans les lunchs, la mode «vintage» touche aujourd'hui la littérature jeunesse.

Vous souvenez-vous de Jiji et de son bébé tamanoir mangeur-de-fourmis-pour-vrai? La célèbre série de Ginette Anfousse se refait une beauté et paraît dans une nouvelle édition chez la Courte Échelle, 35 ans après sa publication. Une nouvelle qui réjouira particulièrement les parents et professeurs nostalgiques.

Que les puristes se rassurent, le texte des Jiji et Pichou demeure intégral, les modifications n'étant que visuelles. «Je trouvais que les dessins, le graphisme, bref, le visuel était désuet», admet l'auteure et illustratrice Ginette Anfousse, visiblement emballée par la mise en beauté de sa série. «Je savais que les histoires étaient encore racontées. Ce sont des livres qui sont encore beaucoup utilisés à l'école et à la maison. Alors, ils méritaient que je m'y penche de nouveau.»

 

La technologie ayant changé avec le temps, c'est le traitement des images qu'il a fallu modifier. «La typographie a changé, l'utilisation de la couleur aussi, souligne Mme Anfousse. La lecture de l'image n'est pas du tout la même qu'il y a 40 ans. La qualité du papier change. Aussi, mes livres de l'époque étaient brochés. Or, j'ai profité de la mise à jour pour proposer une version avec couverture cartonnée.» D'autant plus que chacune des couvertures (souple ou cartonnée) abrite désormais plus de 400 nouveaux dessins!

 

L'auteure, qui n'avait pas dessiné depuis au moins 10 ans, a d'ailleurs retrouvé dans cette mission un plaisir qu'elle avait oublié. «En aucun cas je n'ai eu peur de dénaturer l'oeuvre, soutient-elle, parce que le texte n'a pas changé du tout. J'ai bien compris que les thèmes y sont universels, qu'ils traversent aisément le temps. Jiji n'a pas changé non plus, il était important pour moi que les gens la reconnaissent, avec son chapeau, son tamanoir. Aussi, les derniers titres de la série ayant été écrits et dessinés il y a 11 ans, Jiji avait donc déjà un peu changé. J'ai, en quelque sorte, uniformisé le tout.»

L'auteure et son éditeur ont, par le fait même, sauvé de l'élagage une série précieuse du patrimoine littéraire québécois. «J'ai signé des livres dont les pages tenaient encore à peine, tellement vieux, tellement utilisés, des livres de professeurs qui reprenaient les leurs, s'amuse l'auteure. J'ai même signé des livres dont le tour était tout noir!» C'est probablement le cas des miens. Merci madame Anfousse.

Le retour d'Anne... la maison aux pignons verts

Jiji n'est pas la seule à se montrer le bout du nez. C'est également le retour attendu d'Anne Shirley, la célèbre orpheline née de l'imaginaire fécond de l'auteure canadienne Lucy Maud Montgomery, dont la succession a commandé un antépisode à une des auteures jeunesse les plus intéressantes du Canada anglais, Budge Wilson.

Le défi était de taille: raconter la naissance et l'enfance de la petite orpheline jusqu'à son arrivée chez les Cuthbert, tout en gardant le ton de l'auteure décédée en 1942. Malgré toutes les embûches qu'un tel projet présentait, le pari est gagné. Le roman Anne... Avant la maison aux pignons verts fait mouche. L'auteure parvient avec maestria à nous replonger rapidement dans un univers que l'on reconnaît aisément (et pourtant fort éloigné de celui de l'Île-du-Prince-Édouard). Wilson avait également la pénible tâche d'imaginer comment une enfant orpheline de naissance et privée de stimulation pouvait un jour devenir l'amatrice de poésie qui grimpe pour la première fois dans la charrette de Matthew Cuthbert. Encore ici, rien à redire. Les nombreux échos traduisent le travail colossal que l'auteure a entrepris avec un souci du détail remarquable. La «filiation» frôle ici la perfection.

La magie opère tellement qu'une fois la dernière page tournée, il est difficile de résister à l'envie de poursuivre la lecture en se replongeant dans ses vieux tomes cornés. Anne Shirley est bel et bien de retour, avec ses cheveux carotte et sa même avidité romanesque. Seulement, elle y rêve d'une amie de coeur qu'elle espère tendrement et qui aurait idéalement les cheveux noirs et le teint rose...

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Anne... Avant la maison aux pignons verts

Budge Wilson

Éditions Trécarré, 576 pages, 25,95$

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La série Jiji et Pichou (12 titres)

Ginette Anfousse

La Courte Échelle 32 pages

15,95$ (cartonnée) 12,95$ (souple)

0-6 ans

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