La gentille Martine tente de s'adapter aux années 2000. Casterman rééditera cette année les albums de la collection lancée en 1954 dans des versions revues et modernisées. Coup d'oeil sur les changements apportés à l'univers de la plus célèbre fillette de la littérature française pour la jeunesse.

Remis en page

Les dessins de Marcel Marlier demeurent intouchés. Enfin, presque. Comme la mise en page des albums a été entièrement revue en prévision de cette réédition, il arrive que des images qui occupaient jadis les deux tiers d'une page soient désormais réduites et déplacées ailleurs dans la même double page. Ces changements n'altèrent en rien la lisibilité de l'histoire, au contraire. Rien n'est fondamentalement dénaturé, bien que l'arrimage avec les textes fait que les dessins n'ont parfois plus du tout la même signification qu'autrefois.

Dialogues augmentés

Sur le plan du texte, Martine a vécu une transformation majeure. L'action repose maintenant d'abord sur des dialogues, ce qui contribue à conférer un ton plus direct aux histoires. On sent moins le poids du narrateur, son ton trop bien élevé et ce côté donneur de leçons de morale ou de leçons tout court. Ces nouveaux textes ont parfois un impact important sur l'histoire : Martine ne se rêve plus petit rat de l'opéra, elle donne simplement un spectacle avec sa classe de danse.

Passé recomposé

L'aspect le plus amusant de ces rééditions est sans doute le jeu d'équilibriste auquel elles s'adonnent. D'un côté, le côté vieillot - et charmant, il faut le dire - des illustrations est gardé intact. Or, les nouveaux textes prennent aussi acte du décalage entre le monde de Martine et celui dans lequel vivent les lectrices d'aujourd'hui (et que les lectrices aujourd'hui dans la quarantaine devaient constater aussi). Ainsi, un casque qui servait à sécher les cheveux, une balance à plateaux ou un tourne-disque sont clairement présentés comme des artéfacts du passé hérités de maman ou de grand-maman.

Maman... en retrait

L'éditeur assure avoir voulu gommer le côté très stéréotypé de la série Martine. Il faudrait la relire en entier pour être en mesure d'évaluer cette prétention. Ce qui saute aux yeux, par contre, c'est que la jeune fille semble plus indépendante qu'autrefois. Les textes ne réfèrent plus constamment à la maman de Martine qui, qu'elle soit présente ou non dans les images, supervisait, voire dominait symboliquement quantité de gestes commis par la petite. Ce faisant, les histoires perdent une partie de ce côté moralisateur qui laissait entendre que Martine - pourtant déjà parfaite - devait devenir plus que parfaite.

L'apparence compte

C'est peut-être accessoire, peut-être pas. Les couvertures des nouveaux albums sont beaucoup plus colorées que les anciennes versions. Elles s'affichent en bleu, turquoise, rose ou pêche. Un court résumé figure désormais sur la quatrième de couverture. Un peu comme chez Astérix, chaque album débute désormais avec une courte présentation des personnages. Martine demeure au premier plan sur les couvertures des livres, mais les images originales sont souvent décomposées puis recomposées de manière à mettre en valeur le personnage et un peu moins son contexte.