Les écoles ont été moins nombreuses que prévu cette année à cogner à la porte du Salon du livre de Montréal pour obtenir une place aux matinées scolaires. À la surprise générale, l'organisation de l'événement a connu une baisse marquée d'environ 7000 enfants parmi ceux qui tentent de participer à ce volet jeunesse. Du jamais vu.

Trois journées sont réservées aux enfants de Montréal et des régions avoisinantes au Salon du livre, qui amorcera ses activités mercredi à la Place Bonaventure. Chaque année, 18 000 écoliers peuvent ainsi rencontrer les vedettes de la littérature jeunesse et participer aux nombreuses activités d'animation préparées spécialement pour eux.

Ce laissez-passer, offert gratuitement, est victime de son immense succès. Les organisateurs effectuent normalement un tirage au sort pour attribuer les places au plus grand nombre d'écoles qui en font la demande, limitant l'accès à 200 enfants par établissement sélectionné.

Or, comme cela s'est vu à Sherbrooke et à Jonquière dans les deux salons du livre qui ont précédé l'édition montréalaise, la demande a diminué cette année.

«Nous sentons qu'il y a de l'incertitude dans le milieu de l'éducation, une certaine morosité qui s'explique en partie en raison des directives [budgétaires] du ministère de l'Éducation», a affirmé à La Presse Francine Bois, directrice générale du Salon du livre de Montréal depuis près de 25 ans.

Contrairement aux années antérieures, Mme Bois et son équipe n'ont même pas eu à organiser un tirage au sort pour choisir les écoles qui participeront aux matinées scolaires. Malgré tout, a-t-elle assuré, environ 18 000 enfants fréquenteront tout de même le salon cette année encore, qui atteindra sa capacité maximale d'accueil.

«Mais je crois que certains se sont retenus de s'inscrire en raison du climat actuel. Je ne suis toutefois pas inquiète pour le long terme, nous retrouverons notre rythme de croisière. Ça ne prend pas grand-chose, vous savez, pour qu'on observe des répercussions et des dommages collatéraux aux décisions et déclarations faites par d'autres personnes», a ajouté la directrice générale.

L'Outaouais craint le pire

À Gatineau, les organisateurs du Salon du livre de l'Outaouais se préparent au pire. Après Jonquière, Sherbrooke et désormais Montréal, la directrice générale de l'événement, Anne-Marie Trudel, craint que sa région soit à son tour victime de «la morosité budgétaire du secteur de l'éducation».

«Nous analysons présentement si les compressions dans le système scolaire affecteront la capacité des écoles à recevoir des auteurs ou à venir nous visiter au salon. Dans les deux cas, on demande une participation financière aux écoles, donc ça pourrait avoir un impact», a affirmé Mme Trudel à La Presse.

Son salon, qui se tient à la fin février, organise chaque année une tournée des écoles, où des auteurs jeunesse rencontrent les enfants dans leur classe. «Cette activité hors les murs rejoint normalement 3000 jeunes, alors qu'un autre groupe d'environ 8000 écoliers viennent sur place pour l'événement», a-t-elle expliqué.

Ces écoles pourront-elles de nouveau débourser les sommes requises pour financer l'activité? Rien n'est si sûr, pourrait-on croire, surtout en voyant ce qui est survenu au Saguenay-Lac-Saint-Jean à la fin septembre.

«J'ai senti cette année une diminution importante [de la demande] pour notre fameuse tournée hors les murs. Nous avons organisé moins de rencontres avec les auteurs et les enfants. L'an passé, j'en avais 119, alors que cette année, j'en ai eu à peine 83», a confié à La Presse Sylvie Marcoux, directrice générale du salon du livre au royaume des bleuets.

Selon elle, cette diminution soudaine s'explique en partie en raison du cachet que les écoles déboursent pour payer les auteurs. Le montant exigé est de 200$.

«Il faut mentionner que les auteurs qui viennent nous visiter au Saguenay-Lac-Saint-Jean prennent souvent une semaine de congé à leurs frais», a expliqué Mme Marcoux.

«Mais rappelons-nous que les enfants, quand ils viennent au salon ou reçoivent la visite d'un auteur, vivent souvent un élément déclencheur qui leur donne le goût de lire. Participer à ces activités, comparativement à la portée que ça a pour eux, ça n'a pas de prix», a-t-elle dit.