À compter de lundi, le 16e festival littéraire multilingue Metropolis bleu envahira Montréal. Ce festival hors norme comprend aussi un volet thérapeutique qui est fait un événement vraiment essentiel dans le paysage culturel.

«Lire, écrire, c'est donc prendre soin de soi»: ce sont les tout premiers mots du programme du festival littéraire Metropolis bleu 2014, tirés d'un essai de Dominique Loreau. Lire, écrire, deux actes d'égale importance à Metropolis bleu. Le festival? Oui, mais aussi la fondation du même nom. Car, au-delà des rencontres avec des écrivains célèbres, des prix et des lancements, il y a aussi la littérature comme remède à l'exclusion sous toutes ses formes.

C'est d'ailleurs l'une des particularités de ce festival littéraire multilingue né en 1999: son volet «festival» existe en bonne partie pour ramasser des fonds afin de financer les activités littéraires «thérapeutiques» offertes toute l'année par la fondation Metropolis bleu. Et aussi pour donner de la visibilité à ses nombreuses activités de médiation culturelle qui permettent à des jeunes à risque (intimidation, homophobie, etc.), des femmes fragilisées par la violence ou l'itinérance, des personnes aux prises avec des maladies mentales, etc., d'enfin arriver à «parler» en écrivant.

Ces programmes sont désormais si nombreux que Metropolis bleu vient de refondre son site internet pour en faire deux: metropolisbleu.org pour le volet festival et desmotspourchanger.org pour le volet programmes éducatifs et sociaux. Ce dernier est divisé entre activités pour adultes et activités pour adolescents.

Changer, échanger

Des mots pour changer, se changer et échanger: dans ce portail aéré et bien pensé, on trouve rencontres virtuelles avec des écrivains, concours, ateliers de BD ou de paroles de chanson, suggestions de lectures, etc. Autant d'outils créés en collaboration avec divers organismes et mis à la disposition de ceux et celles qui ont besoin «des mots pour le dire». Dire la souffrance et dire aussi la résilience.

Un exemple? «Dans le cadre du programme Libre comme l'art, qui s'adresse à des élèves du secondaire, explique William St-Hilaire, PDG et directrice artistique de Metropolis bleu, le thème cette année était... autisme et dépression! Sujet pas facile ni évident, n'est-ce pas? L'écrivain associée à ce projet [Monique Polak] a d'abord rencontré une classe de l'école Riverdale, afin de décider de la forme que prendrait leur démarche. Monique a ensuite lu aux élèves un article qui racontait une histoire véridique, celle d'une famille qui avait reçu une lettre haineuse à l'intention de son enfant autiste. Cet enfant autiste faisait une fixation sur les avions. À partir de ces éléments, des explications de Monique sur sa méthode de travail [aller rencontrer des gens qui travaillent dans l'aéronautique, par exemple[, les jeunes se sont mis à discuter de la situation, puis à imaginer une trame narrative, à développer des personnages, et ils ont ainsi alimenté Monique... qui a écrit un roman dont une version abrégée sera lancée dans le cadre de Metropolis bleu.» L'histoire ne s'arrête pas là: l'éditeur de Monique Polak a trouvé le roman tellement bon qu'il a décidé de le publier l'an prochain dans sa version intégrale!

Aspect scientifique

Des projets de ce genre, la plate-forme desmotspourchanger.org en fourmille. Comme chaque année depuis sa création, le festival Metropolis bleu sera l'hôte de divers lancements d'ouvrages et d'expositions nés de ces activités.

«Il y a donc un caractère poétique et créatif de ces activités qui est présenté au Festival, reprend William St-Hilaire. Mais, en plus, il y a aussi un aspect «scientifique»: pendant le festival, nous avons par exemple une table ronde sur la démence [alzheimer] et son traitement, en collaboration avec l'Institut universitaire Douglas. Ou l'atelier Dis-moi, tu t'en souviens: inspiré du livre Les souvenirs de David Foenkinos, l'atelier propose des méthodes pour faire resurgir les souvenirs aux grands-parents, parents et petits-enfants et ainsi les unir de nouveau à travers l'évocation de moments importants. Parfois, il faut aussi des mots pour sourire...»

Nos choix

Il n'y a pas moins de 233 événements au 16e festival Metropolis bleu, autour et avec la centaine d'auteurs invités - ainsi que 87 activités à l'intention du jeune public dans le volet Festival des enfants. Quelques suggestions - dont la première est bien sûr d'aller jeter un coup d'oeil au programme très fourni (metropolisbleu.org), en français, en anglais, en italien, en espagnol, en mandarin, etc.!

BEDTIME STORIES - SOUS LA COUETTE

Mardi 29 avril, 18h, Lion d'or

Événement-bénéfice à 70% francophone! Revêtues de beaux vêtements de nuit de la boutique La vie en rose, plusieurs femmes d'affaires montréalaises proposent un défilé de mode-lecture, au cours duquel elles liront des extraits de livres «épeurants» de Patrick Senécal, Stephen King, les frères Grimm, Edgar Allan Poe, etc. Les fonds amassés par ces «belles de nuit» d'un soir serviront à financer les activités éducatives (offertes à l'année) de Metropolis bleu.

BOXE ET LITTÉRATURE

Jeudi 1er mai, 20h, hôtel 10

Primo, les mots peuvent être frappants. Secundo, la boxe a inspiré plusieurs auteurs. Partant de ces deux prémisses, le boxeur et comédien français Jocelyn Lagarrigue (Incendies de Mouawad, Ma belle gosse...) propose un match de boxe littéraire multimédia, où seront conviés des textes de Joyce Carol Oates, Patrice Lelorain et Norman Mailer. Le spectacle sera suivi d'une causerie d'Alexandre Choko, un homme d'affaires montréalais qui a tout investi dans sa passion de la boxe pour écrire The Future of Boxing (2012), soit ses rencontres avec 55 des plus grands boxeurs du monde. Si on achète un billet VIP, on assiste au cocktail donné ensuite... et on soutient Metropolis bleu.

SIMON ET GABRIELLE

Mercredi 30 avril, 20h, maison de la culture Marie-Uguay

L'improbable Simon Boulerice se penche sur l'oeuvre de Gabrielle Roy, qu'il lit, commente, interpelle... Boulerice participe aussi, le 2 mai, à la soirée d'ouverture du 13e Festival du Jamais lu, présenté dans le cadre de Metropolis bleu au Théâtre des Écuries. À cette occasion, 16 auteurs de 10 pays francophones (du Québec au Burkina Faso) seront lus et «mis en scène».

DAVID FOENKINOS

Où est le romancier français David Foenkinos? À Metropolis bleu. Un peu plus tôt cette année, ses livres ont fait l'objet d'un cours en ligne mis au point par Metropolis. Cette semaine, Foenkinos est en personne au festival: aussi bien en entrevue avec René Homier-Roy (2 mai, 18h, librairie Gallimard), en atelier d'écriture sur le thème «Êtes-vous l'esclave de votre dos» (3 mai, 9h30, librairie Las Americas), en entretien à propos du travail de romancier sur le deuil et la résilience (3 mai, 15h, à Radio-Canada) qu'en train de lire des extraits de son roman La tête de l'emploi (3 mai, 16h30, à la librairie de l'hôtel 10) et, enfin, comme source d'inspiration pour l'atelier d'écriture «Dis-moi, tu t'en souviens?» (4 mai, 17h, hôtel 10).

LES LECTURES-EXPRESSO

3 et 4 mai, heures variées, petit chapiteau de l'hôtel 10

Pendant 20 minutes, un auteur vient lire des extraits de son plus récent roman, dans une ambiance décontractée: Mélanie Vincelette, Joan-Lluis Lluis, Dany Laferrière, Chantal Thomas, Olga Duhamel-Noyer, Luc Lang, Emmanuel Kattan, David Homel, etc. À noter: Dany Laferrière présente également une conférence, «Les promesses de la littérature», le 3 mai, à 19h, dans la verrière de l'hôtel 10.

LUC LANG

L'écrivain français Luc Lang se passionne pour la cruauté, l'esthétique, l'art contemporain, la manipulation... Auteur de huit romans (dont Mille six cents ventres, Goncourt des lycéens en 1998) et de plusieurs essais, il sera de plusieurs activités: un atelier d'écriture sur le thème «La muséification de l'Europe» (1er mail, 14h, Institut Goethe), une conférence intrigante intitulée «Écrire, c'est réécrire» (2 mai, 21h, hôtel 10), une table ronde avec l'écrivain tunisien Habib Selmi (Prix arabe Al Majidi Ibn Dhaher Metropolis bleu 2014) et l'écrivain catalan Joan-Lluis Lluis (3 mai, 11h30, hôtel 10), une autre table ronde cette fois avec la Française Chantal Thomas sur le thème de la cruauté au quotidien (3 mai, 17h30, hôtel 10)...

BIBLIOTHÉRAPIE

(3 mai, 14h, et 4 mai, midi, hôtel 10)

Vous venez de perdre votre emploi? Vous souffrez du manque de soleil? Vous avez le coeur brisé? Quel que soit votre mal, Katy Roy, «apothicaire littéraire», posera un diagnostic et vous recommandera un «médicament» à forte teneur en mots, c'est-à-dire des lectures qui pourront vous apaiser et peut-être même vous guérir un peu. Elle tiendra ses consultations sous la tente dressée dans la cour de l'hôtel 10. La lumineuse Katy Roy donnera également un atelier-conférence sur la bibliothérapie créative, pour mieux «éclater de lire» (3 mai, 10h, libraire Las Americas).

Photo: fournie par Metropolis bleu

Katy Roy, bibliothérapeute