La littérature vient de faire une belle entrée dans la Revue de Bibliothèque et Archives nationales du Québec dont le numéro 3 vient de paraître. Publiée annuellement, la Revue dirigée par Sophie Montreuil propose des «articles d'érudition» écrits à partir de recherches sur les fonds d'archives et les collections patrimoniales, ou sur des études consacrées à des sujets liés aux missions de la plus grande institution culturelle du Québec: l'acquisition, la conservation et la diffusion du patrimoine documentaire québécois.

Yves Navarre et Gaston Miron, qui ont tous deux légué des archives à BAnQ, se retrouvent donc les premiers «littéraires» à faire l'objet d'un article dans cette revue (15$) que l'on souhaiterait semestrielle tellement elle occupe un champ important dans la connaissance de l'histoire culturelle du Québec (voir le contenu complet sur le site banq.qc.ca/revue).

À partir du journal tenu par Navarre entre 1971 et 1990, corpus de 43 cahiers, qu'il a laissé à son départ de Montréal où il avait passé deux ans (1989-1991), Sylvie Lannegrand de l'université irlandaise de Galway a analysé les rapports «entre textes publiés et écriture intime». Les cahiers d'écritures-collages d'Yves Navarre, lit-on, tiennent autant du document de société que du témoignage sur la vie littéraire ou sur l'oeuvre d'art. Une belle entrée dans l'oeuvre de l'auteur de Ce sont amis que vent emporte, roman écrit durant le séjour montréalais de Navarre, qui raconte l'histoire d'un couple homosexuel aux prises avec le sida.

Karine Villeneuve, pour sa part, a tiré son article sur Gaston Miron de son mémoire de maîtrise sur la genèse de La Batèche, suite poétique inachevée incluse dans le recueil L'homme rapaillé. Parti à Paris une semaine après la mort de Duplessis, en septembre 1959, Miron a essayé de mettre en mots la misère culturelle des Canadiens français - on ne parlait pas encore de Québécois - «peuple sclérosé par son état de colonisé». Cela a donné d'abord Le damned Canuck, «le maudit Canadien français». Curieux: Miron avait choisi une vieille acception, peu usitée, du mot «Canuck» qui, déjà dans les années 60, désignait simplement un Canadien. Confusion identitaire?