La solitude et le désert affectif de la vie urbaine sont au coeur du quatrième roman de Grégory Lemay, Les modèles de l'amour.

On y suit les histoires parallèles d'un couple, Christelle et Geoffroy, qui gagnent leur vie en faisant des spectacles érotiques chez les gens, et d'un désadapté social qui vit «dans son sous-sol de mamie». Ils finiront par se croiser, les deux premiers étant engagés par le dernier, mais autant Christelle et Geoffroy prennent de la place dans sa vie, autant le magnifique couple ne se soucie guère de ce gros garçon solitaire. C'est pourtant lui qui mène le jeu dans ce livre écrit sur deux niveaux: pendant qu'il raconte ses états d'âme et ses fixations, on comprend que c'est probablement lui qui se fait le narrateur de la vie du couple d'exhibitionnistes, qui cherche à remplir le vide de son présent et qui est uni par un passé pas très jojo.

Une bonne idée, mais le rythme des Modèles de l'amour s'en retrouve parfois décousu, puisqu'on passe de l'un à l'autre souvent et rapidement. L'univers sombre et l'humour résolument noir donnent cependant une unité de ton à ce roman où le seul amour qui semble sain est celui qui relie le jeune homme à sa grand-mère, et dans lequel toute relation humaine un tant soit peu «normale» ressemble à une mission impossible.