En ces temps tragiques où la solitude, la dépression, mènent à la mort brutale de gens que l'on croyait au-dessus du malheur, ce titre en forme de prière (Ne meurs pas) nous touche tout particulièrement.

Écrit par Andrée Quiviger (prononcer Quivigère), auteure méconnue d'essais et de récits, mère de la très talentueuse romancière Pascale Quiviger, psychoéducatrice de formation, et bénévole, depuis quatre ans, à l'organisme Suicide Action Montréal (qui parraine ce livre), Ne meurs pas est un récit en forme de lettre ouverte. Une voix du coeur qui s'adresse à vous, personnellement.

 

Vous qui «êtes pauvre d'espérance». Vous qui «n'en pouvez plus de souffrir, au point de songer à mourir». Mais aussi vos proches, vos parents, votre famille, qui vous regardent dépérir sans savoir que faire, quels mots choisir, quels gestes faire.

«Je voudrais dire à la mère d'un enfant terrifié sans raison apparente, au compagnon d'une femme angoissée, à l'ado dont l'ami s'est enfermé dans le silence: reconnaissez leur courage de rester en vie», écrit-elle.

Au téléphone, la voix d'Andrée Quiviger est belle et posée, pleine de chaleur. On imagine à quel point elle doit être réconfortante à l'oreille de celui qui appelle à l'aide.

«Pour moi, ce livre-là est un livre d'espérance, dit cette femme elle-même rescapée d'une profonde dépression, et qui a réussi, en s'accrochant aux plus petites choses, à remonter la pente. J'aimerais qu'il incite les êtres qui souffrent, adultes, adolescents, à demander de l'aide. Il y en a tant - des hommes, surtout - qui ne vont pas chercher d'aide. C'est à ces gens-là que j'essaie de parler.»

Pour Andrée Quiviger, des tragédies comme celle de Piedmont («absolument inimaginables») nous démontrent à quel point il est dangereux d'enfermer sa douleur dans le silence. «Il y a des gens qui sont seuls et incapables de s'exprimer. Il faut qu'ils aient le courage d'appeler à l'aide.»

Et l'aide est là, nous rappelle-t-elle. Dans la vie communautaire, les groupes d'entraide, les organismes de prévention du suicide, entre autres. Mais aussi chez nos pairs, ceux qui sont dotés «d'un surplus d'âme». «Décider de faire le moindre pas vers la vie quand tout en nous cherche à démissionner revient carrément à vaincre la mort», écrit-elle.

Si Ne meurs pas est à classer au rayon des livres de psychologie, il relève aussi de la littérature. L'auteure de Casser maison et d'Entre le fleuve et l'infini est, à n'en pas douter, une écrivaine. Les portraits qu'elle fait des gens qu'elle a croisés, «des miraculés», dit-elle, des jeunes hommes ou des femmes qui ont réussi, à force de minuscules pas, à sortir leur vie du marasme, sont de fins bijoux polis par la compassion. Et ses mots sont un véritable baume pour l'âme.

__________________________

Ne meurs pas

Andrée Quiviger

Bayard Canada, 148 pages, 19,95$

****