S'il est un auteur contemporain dont les romans se prêtent particulièrement bien à être lus à voix haute, c'est sans doute Philippe Claudel, dont les livres fourmillent de descriptions fouillées, et dont la plume comme le style est classique, au sens noble du terme.

Pour Le rapport de Brodeck, qui a valu à Claudel le Goncourt des lycéens 2007 et le Prix des libraires du Québec 2008 (catégorie roman étranger), la maison Audiolib a fait appel à la voix d'un jeune comédien français peu connu, mais lui aussi de formation classique, Sylvain Machac. On soulignera tout de suite la bonne idée que de faire appel à une voix très belle, tout en n'évoquant aucun visage de comédien connu: c'est bel et bien Brodeck, être anonyme, qui s'exprime à voix haute, nous semble-t-il.

Mais ce n'est pas la seule vertu de cet audiolivre sobre, respectueux de l'intégralité du texte, composé d'un seul CD MP3: c'est en entendant la prose de Claudel qu'on mesure à quel point l'auteur est inspiré par le souffle particulier de Victor Hugo, dont il a d'ailleurs mis une citation en exergue de son roman. La beauté de la langue telle que maniée par Claudel n'a d'égale que sa maîtrise des retours en arrière, des digressions nécessaires, qui fait de son livre une oeuvre, non pas touffue, mais vivante, humaine.

Lu à voix haute ou à voix basse, Le rapport de Brodeck est aussi inquiétant. Car dans l'une et l'autre version, le même constat: le danger absolu que constitue le concept de «pureté de la race», qui fait qu'un camp de concentration, en pleine guerre, et un village perdu, en pleine paix, se ressemblent douloureusement lorsqu'il est question d'éliminer toute trace de l'autre, de l'étranger.

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Le rappport de Brodeck

Philippe Claudel, lu par Sylvain Machac Éditions Audiolib. Durée: 10h30.