Devrait-on importer au Canada la déductibilité des frais d’intérêt d’un prêt hypothécaire, comme c’est le cas aux États-Unis ?

Au pays de l’Oncle Sam et dans plusieurs pays européens, les frais d’intérêt d’un prêt hypothécaire résidentiel sont déductibles d’impôt.

« Cette mesure est en vigueur, en partie et sous certaines conditions, en Irlande, au Danemark, aux Pays-Bas, en Norvège, en Suède et aux États-Unis », observe François Des Rosiers.

Faut-il en conclure que la déduction des intérêts sur un prêt hypothécaire mériterait d’être introduite au Canada ?

Ce serait une mauvaise déduction.

« Cette mesure avantage surtout les ménages les mieux nantis et a pour effet de faire gonfler le prix des maisons, rendant l’accès des jeunes ménages à la propriété encore plus difficile, prononce le professeur de l’Université Laval. Dans la plupart des pays où la déduction des intérêts est encore appliquée, on limite la part des intérêts qui sont déductibles et/ou le montant du prêt qui donne lieu à une telle déduction. »

La déduction des frais d’intérêt favorise en effet le phénomène du propriétaire gonflable… en l’incitant à déménager.

« À partir du moment où leurs frais d’intérêt commencent à baisser parce qu’ils remboursent leur prêt, ils sont incités à vendre leur maison, en acquérir une autre plus coûteuse, puis recommencer le jeu. Tout ça a un effet inflationniste sur le prix des propriétés », explique François Des Rosiers.

« Pour ceux qui sont déjà propriétaires, c’est intéressant évidemment, mais pour ceux qui ne le sont pas et qui veulent le devenir, c’est pire, ajoute-t-il. Donc ça crée de l’iniquité intergénérationnelle. Au Canada, les frais d’intérêt ne sont pas déductibles et je pense que c’est une bonne chose. »

Des avantages et des inconvénients

Le prix des propriétés au Canada a monté en flèche depuis 2010, « mais si on avait ça, ce serait encore bien pire ».

Le système hypothécaire canadien a des avantages et des inconvénients.

Il y a du pour et du contre. On a un système financier qui est très solide, mais il y a des éléments qui ne sont pas à l’avantage des emprunteurs canadiens. Par contre, d’autres éléments les avantagent.

François Des Rosiers

La non-déductibilité des frais d’intérêt, par exemple.

« Pour les jeunes acheteurs, dans plusieurs pays, une première maison n’est pas achetable. Alors qu’au Québec, c’est encore raisonnable. »

Rectificatif
La version originale de cet article a été corrigée le 8 janvier 2024 pour refléter le fait que les frais d’intérêt d’un prêt hypothécaire ne sont pas déductibles au Royaume-Uni. Nos excuses.