Bien des investisseurs échaudés par l'écroulement de la Bourse se sont réfugiés dans les obligations depuis deux ans. Mais ce repli vers la sécurité leur réserve peut-être d'autres mauvaises surprises.

«Je pense que la prochaine déception des investisseurs va venir des obligations», dit Vincent Delisle, stratège chez Scotia Capitaux. «Ce qui nous inquiète le plus, ce sont les obligations gouvernementales à long terme», enchaîne-t-il

L'année prochaine, leur rendement risque d'être négatif si l'économie redémarre, si l'inflation remonte et si les banques centrales relèvent les taux qui sont présentement à un plancher historique.

Il faut savoir que la valeur des obligations fluctue même si elle est garantie à l'échéance. Leur prix varie en fonction du risque de crédit et de la tendance des taux d'intérêt. Lorsque les taux d'intérêts montent, la valeur des obligations déjà en circulation baisse, car leur taux d'intérêt devient subitement inférieur au taux des nouvelles obligations, ce qui réduit leur attrait.

Or, les économistes s'attendent à une remontée des taux en 2010. Le taux de la Banque du Canada s'élèvera de 0,25% aujourd'hui, jusqu'à 1,50% à la fin de l'année prochaine, estime Paul-André Pinsonnault, du Groupe financier Banque Nationale.

Il s'attend à ce que les investisseurs perdent environ 3% d'ici la fin de 2010 s'ils restent cantonnés dans les obligations du Canada à long terme... sans compter les frais de gestion.

Des obligations... malgré tout

Malgré tout, les épargnants doivent conserver une part d'obligations dans leur portefeuille. Simple question de répartition d'actifs, de gestion de risque.

Grosso modo, les experts disent que le pourcentage de titres à revenus fixes dans un portefeuille doit équivaloir à l'âge de l'investisseur. Par exemple, si vous avez 65 ans, vous gardez environ 65% en obligations.

Dans le contexte actuel, les retraités n'ont pas la tâche facile. «Depuis environ six mois, tous les experts qui s'expriment dans votre chronique « Sur le radar » donnent la même réponse à la question «Que doit-on éviter?» : Les obligations à long terme», observe Serge Langlois, un lecteur assidu (voir encadré).

À l'aube de la retraite, il veut acheter davantage d'obligations. Comme il investit à l'aide de fonds négociés en Bourse (FNB), il aimerait savoir lesquels choisir. Les FNB sont des paniers bien diversifiés de plusieurs titres, un peu comme les fonds communs de placement. Mais leurs frais de gestion sont plus faibles, car les FNB reflètent la composition d'un indice, sans intervention d'un gestionnaire.

Les meilleurs FNB

Pour évaluer le risque de chaque FNB, on peut s'attarder à la durée, une mesure qui permet d'évaluer la sensibilité d'un portefeuille d'obligations à une remontée des taux d'intérêt. La durée s'exprime en années. Plus elle est longue, plus le portefeuille est vulnérable.

En fait, la durée est inversement proportionnelle à la baisse que subirait le portefeuille advenant une hausse de 1% des taux. Ainsi, le fonds iShares CDN Bond Index qui a une durée de 6 ans, perdrait environ 6% de sa valeur si les taux grimpaient de 1% (voir tableau). Cela effacerait complètement son taux de rendement de 3%. En fait, les investisseurs seraient dans le rouge.

Dans la famille iShares, le meilleurs choix est le CDN Short Bond Index dont la durée est inférieure à 3 ans, estime le conseiller en fonds d'investissement Fabien Major, de Major Gestion d'actifs. Évidemment, le rendement n'est pas mirobolant (2%). Mais dans le contexte actuel, il n'y a pas de solution miracle.

Sinon, les investisseurs peuvent regarder du côté de la famille Claymore et BMO, qui offrent aussi des FNB d'obligations à court terme.

Chez BMO, le fonds d'obligations provinciales (ZPS) donne une poussière de plus (2,2%) et le fonds d'obligations de sociétés (ZCS) livre 2,9%, mais le risque de crédit est supérieur.

Pour ceux qui veulent rester encore plus court terme, il existe un FNB de marché monétaire: Claymore offre le CMR qui investit dans les Bons du Trésor 3 mois. Le FNB est quasiment sans risque, mais il ne rapporte pratiquement rien.

À ce compte-là, il est préférable de déposer son argent dans un compte d'épargne à intérêt élevé, comme celui de la banque virtuelle ING Direct qui verse présentement 1,05%.

D'autres idées de fonds

M. Major ne lève pas le nez sur les fonds communs, même s'ils prélèvent davantage de frais (1,5% en moyenne pour les fonds d'obligations canadiennes). Il explique que les gestionnaires de fonds communs ont un meilleur accès aux émissions d'obligations dont les quantités sont parfois limitées. De plus, les gestionnaires peuvent sélectionner les obligations en tenant compte du contexte économique.

Parmi ses préférés, M. Major cite le fonds Bissett obligations canadiennes court terme, qui a réussi à surpasser le FNB iShare d'obligations à court terme depuis 1 an, malgré des frais de gestion de 1,3%.

Il pointe aussi le fonds Fidelity obligations canadiennes court terme et le fonds PH&N hypothèques et obligations court terme, champion de sa catégorie sur 10 ans.

Pour les investisseurs qui veulent limiter leur facture fiscale, particulièrement salée sur les revenus d'intérêt dans les comptes hors-REER, M. Major suggère aussi les fonds structurés en corporation.

Leurs distributions périodiques sont considérées comme un remboursement du capital de l'investisseur, ce qui permet de reporter la facture d'impôt au moment de la vente, sous forme de gain en capital, plutôt que de revenu d'intérêt.

Par exemple, la famille Franklin Templeton offre un produit obligataire à court terme de cette nature. Et le mois dernier, la famille Claymore a aussi mis en marché FNB obligataire doté de ce genre d'attrait fiscal : il s'agit du Claymore Advantaged Canadian bond (CAB).