SNC-Lavalin change de nom et devient AtkinsRéalis. Après une dizaine d’années mouvementées, la firme d’ingénierie montréalaise veut démontrer qu’elle est arrivée à un « tournant », explique son président et directeur général, Ian Edwards, en entrevue.

L’entreprise veut faire peau neuve après une décennie marquée par des enjeux éthiques, par la contre-performance de ses activités, notamment une acquisition mal avisée dans le secteur du pétrole, et par les dépassements de coûts des contrats clés en main. Le changement de nom est aussi l’occasion de donner un sentiment d’appartenance commune à tous les employés qui travaillent pour les différentes filiales de l’entreprise, explique M. Edward.

Le dirigeant affirme que le redressement de SNC-Lavalin porte ses fruits et que la société est en bonne posture pour croître, lors d’une entrevue au siège social de la société.

« Quand je suis arrivé en poste, j’ai été très transparent, raconte-t-il. Nous avons dit qu’une partie de l’entreprise fonctionnait vraiment bien et que ce n’était pas le cas pour une autre partie. Notre stratégie est simple. On arrête de faire ce qui ne fonctionne plus et on fait ce qui marche vraiment bien. »

La société a vendu en 2021 ses activités non rentables dans le secteur du pétrole, pour une fraction de ce qu’elle avait payé en 2014. Aussi, la firme ne soumissionne plus sur des contrats clés en main depuis 2019, car ces projets connaissent souvent des dépassements de coûts. Entre-temps, les contrats restants ont tout de même affiché des dépassements de coûts, mais la direction ne s’attend plus à de mauvaises surprises, maintenant qu’ils sont presque tous achevés.

« Quand nous sommes arrivés au point où nous croyons que tous ces problèmes étaient derrière nous, c’était au quatrième trimestre, assure le dirigeant. À partir de ce moment, c’est le temps de la croissance. »

Ce tournant espéré pourrait marquer la fin d’un long purgatoire pour les investisseurs de SNC-Lavalin. L’action affiche une bonne remontée depuis le début de l’année, mais elle reste à des seuils comparables à ceux de 2012, moment du dévoilement des premières affaires de malversation. La valeur de sa rivale WSP s’est multipliée par près de 6,7 fois depuis cette période.

Notons que le sigle de l’action à la Bourse de Toronto sera également changé, passant de « SNC » à « ATRL ». La modification est prévue pour la séance du lundi 18 septembre.

Des doutes persistent dans la communauté financière que ce nouvel élan ne sera pas freiné par d’autres mauvaises surprises tandis que la performance de SNC-Lavalin a été inconstante au cours des années, indique l’analyste Maxim Sytchev, de Financière Banque Nationale. Il souligne que cette perception masque le fait que l’entreprise a toutefois une direction et un conseil d’administration complètement renouvelés.

Pour arriver à ses fins, AtkinsRéalis devra démontrer qu’elle est en mesure d’afficher des marges bénéficiaires comparables à celles de ses concurrentes et qu’elle est capable de générer des flux de trésorerie de manière constante. « Si nous pensons qu’il est possible d’améliorer les marges, c’est loin d’être une tâche facile à accomplir », prévient l’analyste financier.

Des acquisitions aux États-Unis

Si les choses se passent comme prévu, AtkinsRéalis sera prête à faire des acquisitions à partir de 2024. Cette stratégie nourrit autant les espoirs que les inquiétudes chez les investisseurs, qui se remémorent les erreurs du passé. « Il vaut mieux que l’entreprise ne s’empresse pas à réaliser une transaction », prévient M. Sytchev.

L’entreprise n’a pas l’intention de prendre de trop grandes bouchées, répond M. Edwards. Il évoque la possibilité de deux petites acquisitions en 2024. « On va y aller étape par étape. On ne fera pas de grandes transactions. »

L’objectif principal de la stratégie sera d’étendre l’empreinte géographique d’AtkinsRéalis aux États-Unis. « C’est aux États-Unis que nous avons le plus besoin de faire des acquisitions. […] Nous avons beaucoup de succès aux États-Unis, mais seulement dans un petit nombre d’États dans le Sud. »

Un nom francophone et montréalais

Si SNC-Lavalin choisit d’intégrer le nom de sa filiale britannique Atkins, elle inclut aussi « Réalis » à sa raison sociale. Cela fait allusion au fait de réaliser des projets, explique le dirigeant.

Avec un accent aigu, cette portion de la raison sociale est également une allusion « claire » à l’identité montréalaise et francophone de la firme, assure M. Edwards. Originaire du Royaume-Uni, M. Edwards avait annulé un discours uniquement en anglais, en 2021, dans la foulée de controverses entourant la présence de patrons unilingues anglophones dans plusieurs entreprises montréalaises.

Par le passé, des commentateurs se sont inquiétés de voir le pouvoir du siège social et l’héritage montréalais de SNC-Lavalin se diluer. Lorsqu’on lui demande si le changement d’identité pourrait marquer une coupure avec l’histoire montréalaise de la firme, M. Edwards sourit.

« Nous avons mis Réalis pour être clair que cette entreprise est établie à Montréal et que c’est une entreprise québécoise. Nous avons acheté Atkins. Ce n’est pas l’inverse. Nous avons l’intention de rester ici. Nous espérons que l’inclusion de Réalis à la raison sociale va atténuer ces craintes. »

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