(Québec) La place de plus en plus grande des écrans chez les jeunes, « c’est une possible catastrophe sanitaire et éducative qui est devant nous », a lancé le premier ministre français Gabriel Attal vendredi matin. Son homologue François Legault lui faisait alors visiter une école flambant neuve de Québec où la présence de tableaux numériques a attiré son attention.

« J’ai vu qu’il y avait quelques tableaux numériques. Mais sinon, quel usage vous avez des écrans ? » a demandé M. Attal, ex-ministre de l’Éducation, à la direction de l’école de l’Ancrage. On lui a expliqué que toutes les classes sont dotées de tableaux numériques, que les élèves de cinquième et sixième année ont un Chromebook chacun « qui n’est pas utilisé tout le temps », et qu’il y a un « plan de déploiement du numérique » pour augmenter le ratio d’appareils comme des tablettes et des ordinateurs.

Le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, a souligné que le cours de Culture et de Citoyenneté québécoise est axé « beaucoup sur la compétence numérique, des dangers des écrans, des dangers des réseaux sociaux et tout ça ». Il a rappelé que le cellulaire est interdit en classe depuis le 1er janvier.

« Est-ce que vous avez ça ? » a demandé François Legault à M. Attal.

« Nous, on l’a interdit dans les collèges », dès 2018, a-t-il répondu. « On a été un des premiers pays au monde à le faire. » L’interdiction existait déjà dans les écoles — et pas seulement en classe. Cela signifie que les jeunes Français jusqu’à 15 ans ne peuvent avoir de cellulaire à l’école. Gabriel Attal a expliqué que c’est plus complexe pour le lycée, car les élèves « ont le droit de sortir quand ils sont entre deux classes. Si on interdit le téléphone dans le lycée, ils vont sortir à chaque fois ».

Bernard Drainville est intervenu que c’est en raison de ce « danger » qu’il a limité l’interdiction à la classe. « Il y en a qui souhaitent qu’on fasse comme chez vous, qu’on interdise pendant toute la journée. On n’est pas rendu là. »

« Je pense que c’est important », a répliqué aussitôt Gabriel Attal.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Gabriel Attal, Bernard Drainville et François Legault

François Legault lui a demandé s’il y a eu de la « résistance » au sujet de cette mesure. « Pas tant que ça », a dit M. Attal. « En tout cas pas chez les Français. Chez les élèves, forcément un peu. »

« C’est un vrai défi parce qu’on voit que moi je suis très préoccupé par la place des écrans, notamment chez les tout petits », a-t-il ajouté.

« C’est une possible catastrophe sanitaire et éducative qui est devant nous parce qu’on a des enseignants, des professeurs, des écoles qui nous disent que même en CP (cour préparatoire), donc à cinq ou six ans, on a des enfants qui ont du mal à se concentrer, qui sont beaucoup moins patients et c’est probablement lié aux écrans qui se sont développés. On a une étude récente qui montre qu’à six ans, un enfant passe autant de temps dans l’année devant un écran que dans la classe. C’est aussi l’éducation à la parentalité. »

Pour François Legault, en effet, « on peut agir dans les écoles, dans les services de garde, et à la maison, il faut aussi responsabiliser les parents et on fait de la publicité pour expliquer. » Puis le premier ministre a mis fin à l’échange, car « on est attendus ».

Plus tard en conférence de presse, Gabriel Attal a déclaré qu’il a été « impressionné par l’énergie, par l’enthousiasme qui se dégageait de l’école, impressionné par le projet pédagogique innovant, ambitieux, notamment sur la question de la lutte contre le harcèlement ».

Avec la collaboration d’Hugo Pilon-Larose, La Presse