(Québec) Le gouvernement Legault évalue la possibilité d’exempter les Canadiens qui viennent étudier dans une université francophone de sa réforme des tarifs imposés aux étudiants étrangers et aux citoyens d’une autre province.

La semaine dernière, la ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry, a annoncé que Québec imposera un « tarif plancher » aux étudiants universitaires canadiens non résidents du Québec à environ 17 000 $ par an, soit près du double de ce qui est actuellement facturé. Cette mesure s’appliquera à ceux qui fréquentent des programmes de 1er cycle et du 2cycle professionnel. Les étudiants étrangers auront également un tarif minimum de 20 000 $, montant sur lequel le gouvernement fera une ponction d’environ 3000 $ pour assurer une équité entre les établissements francophones et anglophones.

Dans un point de presse mardi au Parlement, le premier ministre François Legault a réitéré que ces mesures s’inscrivaient dans le plan gouvernemental pour inverser le déclin du français au Québec. À l’heure actuelle, a-t-il dit, les universités anglophones représentent 25 % des places totales des universités au Québec, un pourcentage largement supérieur au poids démographique de la population québécoise d’expression anglaise.

« On a pris [cette] décision qui n’est pas facile, mais qui était nécessaire. C’est le prix à payer pour avoir un équilibre entre des objectifs économiques, mais aussi des objectifs de survie du français au Québec. Je ne ferai aucun compromis », a dit le premier ministre.

« C’est rien contre les anglophones, c’est pour la survie du français », a-t-il ajouté. M. Legault a également fermé la porte à une demande exprimée par la mairesse de Sherbrooke, Évelyne Beaudin, qui souhaite que l’Université Bishop’s ne soit pas touchée par la réforme afin d’assurer la survie de l’institution.

Les universités anglophones sous le choc

En mêlée de presse, la ministre Déry a reconnu que la mesure pourrait avoir pour effet de réduire le nombre d’étudiants non résidents du Québec qui fréquentent certaines universités, notamment dans le réseau anglophone.

« Un étudiant canadien qui vient ici peut venir étudier ici, mais il faut qu’il paie au moins un diplôme à sa juste valeur. […] Les deux mesures qu’on met de l’avant vont nous permettre justement d’aller réduire le nombre d’étudiants canadiens qui viennent ici », a-t-elle affirmé.

Or, selon l’annonce faite la semaine dernière par le gouvernement, un étudiant canadien qui viendrait étudier en français au Québec verrait aussi ses droits de scolarité doubler, même s’il ne participe pas, par sa présence, à l’anglicisation de la province.

Au cabinet de la ministre Déry, on affirme désormais réfléchir à une voie de passage qui permettrait à une personne canadienne non résidente du Québec, mais qui choisit d’étudier dans une université québécoise francophone, d’être exemptée de l’augmentation des tarifs. Selon le député péquiste Pascal Bérubé, l’annonce du gouvernement n’inversera pas le déclin du français au Québec.

« Pour moi, ce n’est pas une politique pour le français, ce n’est pas une mesure pour le français. Une vraie politique pour le français, en deux temps : tenir compte des immigrants temporaires, dont plusieurs viennent aux études et ne parlent qu’anglais, par exemple, et [imposer] le cégep en français », a-t-il dit. Le PQ appuie toutefois la réforme du gouvernement Legault, justifiant qu’elle corrige une forme d’iniquité face aux tarifs universitaires imposés aux étudiants québécois ailleurs au pays.

Le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, a pour sa part affirmé que d’augmenter les droits de scolarité n’était pas la bonne façon de corriger le déséquilibre qui se creuse entre le réseau francophone et anglophone. Son parti proposera une alternative au cours des prochains jours.

Le chef du Parti libéral du Québec, Marc Tanguay, a pour sa part réitéré mardi que le gouvernement Legault devrait revenir sur sa position qui « n’aidera pas la langue française » et causera des conséquences importantes pour les universités anglophones.