Le mouvement PEGIDA, qui compte tenir une manifestation «contre l'islamisation du Québec» dans le Petit Maghreb demain, n'est pas le «bienvenu à Montréal», a dit hier le maire Denis Coderre. Ce dernier ne compte pas pour autant interdire le rassemblement.

«Si des propos haineux sont tenus, il y aura une intervention de la police», a affirmé le maire lors d'un point de presse.

Le mouvement PEGIDA, acronyme de Patriotes européens contre l'islamisation de l'Occident, est connu pour ses positions anti-immigration et anti-islam. Fondé à Dresde, en Allemagne, l'an dernier, le mouvement s'est depuis répandu dans plusieurs pays occidentaux.

Demain, PEGIDA Québec tiendra sa première action publique dans l'arrondissement de Villeray-Saint-Michel-Parc-Extension, qui abrite une large population de confession musulmane. Hier, 164 personnes prévoyaient participer à l'événement sur la page Facebook du groupe.

Les manifestants comptent notamment se rendre devant le Centre communautaire islamique de l'Est, dirigé par Adil Charkaoui. «On va lancer un seul message. Soit l'islam se réforme, soit il quitte l'Occident. La charia et les hadiths [enseignements du prophète Mahomet] doivent être abandonnés», a dit hier à La Presse Jean-François Asgard, un des fondateurs de PEGIDA Québec. L'homme de 33 ans s'oppose notamment au port du voile islamique au Québec. «Si tu es une femme en Occident, tu ne peux pas choisir si tu es libre ou non. On va t'imposer ta liberté», a-t-il lancé hier.

Crainte d'islamophobie

Les propos de PEGIDA Québec inquiètent le maire de Montréal. «Je condamne fortement tout ce qui touche l'islamophobie et les gestes antisémites. On a une communauté musulmane extraordinaire, Montréal est une ville de diversité et on a une belle quiétude», a ajouté Denis Coderre, affirmant que PEGIDA n'a «pas sa place» dans le paysage montréalais.

Plusieurs autres politiciens sont montés au créneau contre le groupe. «Le droit de manifester est garanti par la Charte des droits et libertés. Par contre, l'incitation à la haine est non seulement illégale, mais inacceptable», a dit Sylvain Ouellet. Membre de Projet Montréal, il est conseiller municipal dans le district où aura lieu la manifestation de PEGIDA.

Député fédéral de Rosemont-La Petite-Patrie, le néo-démocrate Alexandre Boulerice craint l'impact de cette manifestation sur le climat social. «Je vois plusieurs personnes qui font de dangereux amalgames et j'ai peur que ce genre d'événement raciste ne fasse qu'empirer les choses», a dit le député.

Des mouvements de gauche et d'extrême gauche organisent un rassemblement pour s'opposer à la marche de PEGIDA, demain. Hier, les organisateurs disaient y attendre plus de 1000 personnes.

Interdire?

Au cours des derniers jours, des voix se sont élevées pour demander l'interdiction de la manifestation de PEGIDA. Or, selon l'avocat Julius Grey, une telle interdiction est difficile à justifier avant que des gestes répréhensibles aient été observés. «On ne peut pas savoir d'avance si les propos qui seront tenus seront extrêmes. On peut punir des gestes posés», a dit l'avocat spécialisé dans les droits de la personne.

PEGIDA a soumis son itinéraire et ses slogans au Service de police de la Ville de Montréal pour obtenir le droit de manifester.