Après 13 semaines de conflit, Line Beauchamp a jeté l'éponge lundi, accusant les leaders étudiants d'intransigeance. Non seulement elle démissionne de son poste de ministre de l'Éducation, mais elle quitte aussi la vie politique. Elle «espère vraiment» que son départ «servira d'électrochoc» pour en arriver à un règlement avec les élèves et les étudiants en grève.

>>> Qu'en pensez-vous ?

«Je n'aurai jamais réussi à leur faire faire des compromis. Alors moi, personnellement, je fais l'ultime compromis que je puisse faire: je cède ma place», a-t-elle affirmé en conférence de presse aux côtés du premier ministre Jean Charest.

Elle s'est défendue de «céder devant la violence et l'intimidation». «Je ne démissionne pas à cause de l'adversité ou de la complexité de la situation. J'en ai vu d'autres. Je démissionne parce que j'estime que je ne fais plus partie de la solution», a expliqué Mme Beauchamp, qui était également vice-première ministre.

«J'ai mené le dossier aussi loin que j'ai pu, de bonne foi, [mais] il faut maintenant passer le flambeau», a-t-elle ajouté, la voix étranglée par l'émotion. «Je n'aurai pas réussi à ce jour à régler un conflit important, et j'en assume la responsabilité.»

Son départ est survenu quelques heures après une conférence téléphonique avec les représentants des quatre associations étudiantes, en matinée. Ces deux heures de pourparlers n'avaient pas permis de trouver un terrain d'entente. «Après tous les gestes posés par le gouvernement, après tous nos efforts, j'en arrive à la conclusion personnelle que j'ai perdu confiance en la volonté des leaders étudiants d'être à la recherche de solutions, à la recherche d'une véritable sortie de crise», a-t-elle laissé tomber.

Elle leur a proposé de confier à une commission parlementaire le mandat «d'identifier les sources d'économies dans la gestion des universités applicables à une diminution de la contribution étudiante», c'est-à-dire des frais afférents. «Ma question était simple: faites-vous confiance ou pas aux élus du peuple québécois? La réponse a été non. Les associations ne font pas confiance aux élus du peuple. Un porte-parole m'a même dit que les députés n'ont pas prouvé leur capacité d'analyse, n'ont pas démontré qu'ils avaient une connaissance suffisante pour se pencher sur la reddition de comptes des universités», a-t-elle déclaré.

Au cours de la conférence téléphonique, elle a également voulu «éclaircir» la position des leaders étudiants quant à l'idée d'un moratoire sur la hausse des droits de scolarité, «bien que cela n'ait jamais été une proposition du gouvernement». «Les leaders étudiants m'ont confirmé que cette proposition de moratoire ne suffit pas pour qu'ils invitent leurs membres à rentrer en classe. Ils y ajoutent une condition: la tenue d'états généraux sur les universités. Même l'hypothèse d'une trêve avancée par certains de nos concitoyens est rejetée par les leaders étudiants», a-t-elle lancé.

Jean Charest a tenu à préciser que Line Beauchamp part de son propre chef. «J'ai tenté de la retenir», a-t-il indiqué. Il se dit «attristé» par sa démission. Il a salué «la patience, le courage et la détermination» de Mme Beauchamp.

Députée de Bourassa-Sauvé, à Montréal, depuis 1998, Line Beauchamp veut maintenant «passer à autre chose, tourner la page».

Elle s'était retrouvée dans l'embarras au début du mois lorsque La Presse avait révélé que Domenico Arcuri, membre important de la mafia, était parmi les 15 ou 20 personnes ayant assisté à un petit-déjeuner de financement de l'association libérale de Bourassa-Sauvé. Mme Beauchamp, alors ministre de l'Environnement, était l'invitée-vedette de cette activité, qui a eu lieu le 6 avril 2009. «Je ne connaissais pas l'individu. Je ne pourrais pas le reconnaître. Je ne le connais pas», avait-elle dit. «À l'évidence, maintenant que les informations sont publiques, dévoilées, et que les liens sont établis, je ne le referais pas. Je vais prendre toutes les précautions pour ne pas me retrouver dans une telle situation.»