Les 20 visites en six mois du collecteur de fonds libéral Charles Rondeau au cabinet du premier ministre Jean Charest ne témoignent pas d'un mode d'opération déterminé. En fait, ce serait l'exception, si on observe d'autres périodes qui ont suivi le départ de Marc Bellemare de la politique.

C'est ce qui ressort du registre des entrées du bureau du premier ministre Charest pour la période allant de février 2005 à avril 2007, qui correspond au séjour du ministre Yvon Marcoux à la Justice. Les procureurs de la commission Bastarache ont demandé ces renseignements à la Sécurité publique afin de savoir si la visite des collecteurs de fonds au cabinet du premier ministre était une habitude bien ancrée à Québec.

Or, durant cette période, on ne trouve qu'une mention de Charles Rondeau et de Franco Fava. Les deux hommes s'étaient présentés à la passerelle entre le cabinet de M. Charest et le parlement, le jour de la prestation de serment du gouvernement minoritaire, le 5 avril 2007.

Dans son témoignage, l'ancien ministre de la Justice Marc Bellemare a soutenu que Franco Fava, responsable important du financement du PLQ à Québec, allait toutes les semaines dans le bureau de Chantal Landry, responsable des nominations au cabinet de Jean Charest. Or, les documents produits pour les procureurs montrent plutôt que pendant les six mois où Me Bellemare dirigeait la Justice, c'est plutôt Charles Rondeau qui s'y rendait de façon quasi hebdomadaire.

Dans son témoignage, Franco Fava a par exemple dit que les choix des assesseurs patronaux et syndicaux à la Commission des lésions professionnelles n'étaient pas des nominations du gouvernement.

Or, on trouve dans le registre une rencontre de huit heures entre Charles Rondeau et Chantale Landry le 10 mars 2004. Une semaine plus tard, pas moins de 202 assesseurs ont été nommés ou renouvelés au cours de la réunion suivante du Conseil des ministres.

Cette semaine, la Commission terminera une étape importante en mettant fin aux audiences liées aux déclarations de Me Marc Bellemare sur le trafic d'influence pour la nomination de magistrats. Chantale Landry doit comparaître aujourd'hui. Elle insistera sur son rôle de simple «messagère» dans les nominations de juges, mais on peut prévoir que les procureurs de Marc Bellemare voudront l'amener sur le terrain beaucoup plus vaste de son rôle dans l'ensemble des nominations gouvernementales.

Stéphane Bertrand, ancien chef de cabinet de M. Charest, doit aussi être entendu aujourd'hui.

Après quelques spécialistes universitaires, André Brochu, ancien haut fonctionnaire responsable des emplois supérieurs, sera appelé à la barre. Enfin, on pourra entendre les témoignages des anciens ministres de la Justice libéraux Jacques Dupuis, Yvon Marcoux et Kathleen Weil.

Par la suite, la Commission doit poursuivre ses travaux sur la question plus théorique du processus de nomination des juges. Elle entendra des experts en droit qui indiqueront les façons de faire à l'étranger.

Le rapport Michel Bastarache est désormais attendu pour la fin du mois de janvier 2011. Le commissaire a obtenu une prolongation de son mandat original, qui se terminait le 15 octobre.

Baie-Comeau: trois donateurs du PLQ nommés juges

Les trois derniers juges nommés à la Cour du Québec à Baie-Comeau auraient tous déjà contribué à la caisse du Parti libéral du Québec, selon ce qu'aurait découvert l'équipe de l'émission Enquête de Radio-Canada. Le plus récent cas remonterait à 2009 lors de la nomination de François Boisjoli.

Celui-ci aurait été choisi à l'issue d'un deuxième appel de candidatures et, donc, d'une deuxième série d'entrevues, alors qu'il n'avait pas participé au premier processus d'embauche. Le juge Boisjoli et les deux autres sélectionnés précédemment auraient tous versé de l'argent à la caisse du PLQ en 2002 et proviendraient du même cabinet d'avocats.