Au lieu de cibler certaines races de chien - à la manière du projet de loi 128 -, mieux vaut créer un grand registre québécois des chiens mordeurs et «mieux faire respecter» les règles applicables.

Voici les principales recommandations du coroner qui s'est penché sur la mort de Christiane Vadnais, tuée par un pitbull dans sa cour de Pointe-aux-Trembles, l'an dernier.

Huit mois avant cette tragédie, une jeune fille s'était retrouvée à l'hôpital Santa Cabrini après avoir été gravement blessée par le même animal. L'arrondissement n'a alors jamais fait le suivi requis. « L'application des règlements, pourtant déjà en place, représente souvent une grave lacune », déplore le coroner Ethan Lichtblau.

Ses recommandations ont été plutôt bien reçues hier, sauf celle de laisser tomber toute mesure visant les pitbulls. « En le lisant, j'étais hors de moi, lance Lise Vadnais, soeur de Christiane Vadnais. Le coroner colle à tous les arguments des pro-pitbulls et ignore tout ce qui va dans l'autre sens. Pour quelqu'un qui a mis un an à livrer son rapport, c'est inacceptable ! »

Un chien «mal socialisé» et «sous-stimulé»



Une analyse génétique a montré que le chien meurtrier était « à 87,5 % de la race American Staffordshire Terrier », de la famille des pitbulls. Le rapport révèle aussi que l'animal était souvent enfermé dans une cage dehors, qu'il était « mal socialisé » et « sous-stimulé ». Des « facteurs qui ont probablement produit un chien extrêmement frustré, agressif et violent », écrit le coroner.

Une heure avant qu'un homme n'aperçoive le corps inerte de Mme Vadnais et n'appelle le 9-1-1, une autre voisine avait entendu des appels à l'aide et des grognements de chien. Mais elle « n'a pas fait de lien », écrit le coroner.

Lorsque les policiers sont arrivés dans la cour pleine de sang, il était trop tard. Le chien avait lacéré le bras de la victime jusqu'à l'os et dévoré sa jambe. L'animal a foncé sur un agent, gueule ouverte, puis s'est mis à tourner autour du corps et à foncer sur la clôture en montrant les crocs. Dans la maison, il avait déchiqueté une couverture et des déchets, alors que son bol de nourriture était plein.

Le projet de loi 128

La SPCA espère que le gouvernement suivra les recommandations du coroner et procédera à une révision importante de son projet de loi, pour ne pas entraîner « la mise à mort systématique et massive des chiens dans les refuges », lit-on dans son communiqué.

Sommité en matière de traumatismes pédiatriques et d'épidémiologie, le Dr Barry Pless estime au contraire que le projet de loi 128 est « excellent ». Et que le coroner s'est trop fié au rapport de l'Ordre des vétérinaires en « négligeant les preuves opposées », soit les études médicales montrant que les chiens qui mordent gravement sont très souvent des pitbulls. Et les études montrant que cibler des races peut avoir une incidence positive. Le coroner écrit qu'il n'y en a « aucune », alors qu'il y en a « au moins deux », précise le Dr Pless, professeur émérite à l'Université McGill.

En mêlée de presse, le maire de Montréal, Denis Coderre, a indiqué qu'il ne changerait pas son règlement : « Je n'attendais pas le rapport du coroner pour dire si j'avais raison ou pas. [...] Nous, on a eu ce débat-là et gouverner, c'est choisir. On a trouvé une façon, à notre avis, qui est équilibrée. On est rendus ailleurs. »