Documentariste et exploratrice, Céline Cousteau sillonne le globe depuis l'enfance, transportant dans ses bagages les enseignements de son grand-père, Jacques-Yves, alias le commandant Cousteau, et de son père, Jean-Michel. La Presse a discuté avec elle de voyage responsable, de pérennité culturelle et du pouvoir qui se cache dans chaque touriste.

Vous travaillez à un documentaire, Tribes on the Edge, qui porte sur les tribus de la Vale do Javari, en Amazonie. Pourquoi ce sujet en particulier?

Mon grand-père y était passé dans les années 80 et j'y suis allée pour la première fois avec mon père en 2007. J'ai rencontré là-bas six tribus aux prises avec plusieurs problèmes: entre 50 et 80 % de la population souffre d'hépatite, plusieurs menaces pèsent sur leur territoire ancestral et, par conséquent, leur vie même est menacée.

J'ai réalisé que notre survie à tous est liée à la leur, car là où il y a des peuples autochtones établis, il n'y a pas de déforestation. On sait que la déforestation, en particulier en Amazonie, contribue grandement aux changements climatiques. Les autochtones sont les gardiens de cet écosystème.

Comment, comme voyageurs, pouvons-nous contribuer à la survie de ces communautés plus vulnérables et, par ricochet, à la diversité des cultures?

Il faut avoir conscience des choix qu'on fait pour s'assurer que les bénéfices économiques reviennent à la population locale. Par exemple, il faut éviter les entreprises qui transforment les humains en objets. Aller voir des humains qui sont comme dans un zoo, font leur cérémonie rituelle et remettent leur t-shirt après, c'est vulgaire.

On peut aussi faire une recherche avant le départ pour trouver une ONG qui contribue à une cause auprès de la culture visitée et faire un don. C'est plus utile que d'apporter des bonbons aux enfants. Les bonbons, on les laisse à la maison, ça ne sert à rien!

Pour les cadeaux et les souvenirs, il faut aussi soutenir les petits artisans sur place plutôt que d'acheter des produits fabriqués à l'étranger. C'est une bonne façon de contribuer à l'économie locale et de soutenir la communauté.

Le touriste a donc un pouvoir de faire bouger les choses?

Oui, les touristes peuvent provoquer des changements par l'économie, en choisissant avec conscience. C'est aussi vrai d'ailleurs pour le traitement des animaux. Est-ce que notre amusement à monter sur le dos d'un animal justifie que ce dernier souffre?

Si on arrête d'aller là où les animaux sont maltraités, des changements de pratiques peuvent survenir. Il faudra toutefois se résoudre à renoncer à certaines choses... C'est à nous de changer, d'en prendre conscience.

Ce n'est pas toujours facile de bien faire les choses, je sais. En vacances, on a le goût de s'amuser, pas forcément de réfléchir. Alors je crois qu'il est préférable de réfléchir avant de partir, pour être certains de bien faire une fois à destination!

Le tourisme, en particulier celui dit de masse, est souvent mis au banc des accusés, en raison des pressions qu'il exerce sur les écosystèmes. Est-ce que le tourisme actuel vous inquiète?

Le tourisme est une arme à double tranchant. D'un côté, il peut avoir des impacts négatifs : je pense notamment au Machu Picchu ou aux îles Galapagos. Il faut s'obliger à limiter le nombre de touristes là-bas, mais je ne suis pas d'accord que ça passe par une hausse excessive des prix. Tout le monde doit comprendre que certains milieux doivent être protégés. Il faut tous être conscients qu'il y a un problème...

D'un autre côté, lorsque le tourisme est bien fait, le voyageur vit et ressent des expériences - avec un peuple, un animal, un écosystème - qu'il va intégrer dans sa vie et partager autour de lui. Ce genre de tourisme est important.

Vous êtes ambassadrice pour la Fondation TreadRight, qui prône un tourisme plus responsable. Quels gestes faites-vous vous-même afin de minimiser l'impact écologique de vos voyages?

Je fais des petites choses toutes simples. J'apporte toujours mes petites bouteilles de shampooing, de savon, pour ne pas avoir à ouvrir une bouteille de plastique à l'hôtel. En plus, je peux choisir des produits le plus naturels possible.

J'ai toujours avec moi une fourchette, un couteau et une cuillère en bambou pour éviter de prendre des couverts en plastique. Et ça passe la sécurité aux aéroports!

Parce que j'ai un enfant, je prends toujours une paille de métal, pour qu'il puisse boire sans utiliser des pailles en plastique. J'ai aussi une bouteille en métal pour l'eau et une gourde pour le thé, car les boissons chaudes sont souvent servies dans du plastique ou des contenants qui génèrent des déchets.

Ce sont des choses faciles à faire, universelles.

_______________________________________________________________________________

Consultez la page Facebook de Céline Cousteau: https://www.facebook.com/CelineCousteau/

Pour consulter le site de la Fondation TreadRight: www.treadright.org

PHOTO FOURNIE PAR Tribes on the Edge

Céline Cousteau a consacré son dernier documentaire aux tribus de la Vale do Javari, en Amazonie.