(Londres) « Mon seul regret dans la vie, c’est de ne pas être né dans les années 1990. »

Venant d’un enfant de 11 ans, la réflexion fait sourire.

« Pourquoi ? », lui demande-t-on, en se doutant de la réponse alors qu’on s’apprête à franchir l’allée de baguettes magiques géantes menant au « Warner Bros. Studio Tour London » – les studios dans lesquels a été filmée la quasi-intégralité des films Harry Potter.

« J’aurais voulu naître avant la publication du premier livre ! », précise-t-il sur le ton de l’évidence. Fiston aurait aimé être parmi les premiers Potterheads – surnom des fans du jeune sorcier – pour vivre l’anticipation accompagnant la publication de chaque nouveau roman de la saga et la sortie de chacun des films.

PHOTO ARCHIVES REUTERS

À l’époque, jeunes – et moins jeunes – faisaient la file devant les librairies à minuit, à la levée de l’embargo, pour découvrir la suite des aventures du sorcier.

À l’époque, jeunes – et moins jeunes – faisaient la file devant les librairies à minuit, à la levée de l’embargo, pour découvrir la suite des aventures du sorcier, lui a-t-on expliqué en évitant le « dans mon temps… » pour ne pas paraître (trop) vieille.

Fiston a englouti les sept tomes en quelques mois à peine. Il avait alors 8 ans. C’était la condition pour ensuite pouvoir regarder les huit films… qu’il a revisionnés un nombre incalculable de fois.

Depuis, il rêve de partir sur les traces de son héros aux lunettes rondes à Londres. L’objectif ultime : visiter les studios de tournage transformés en musée interactif où l’on s’immerge dans les décors, certains véritables, d’autres reconstitués, en plus de découvrir les costumes et les accessoires de la saga cinématographique.

À chaque anniversaire, Fiston a mis de côté tous les sous qu’il a récoltés, en plus de s’être très souvent porté volontaire pour les tâches ménagères (moyennant rétribution, bien sûr). Il a aussi convaincu toute la famille et plusieurs voisins de lui remettre leurs canettes vides et ainsi amasser l’argent nécessaire pour contribuer aux dépenses du voyage.

Le jour J

PHOTO CAROLINE TOUZIN, LA PRESSE

C’est le grand jour !

Et voilà le grand jour arrivé ! Nous sommes un mercredi d’octobre aux studios de Leavesden, situés à une trentaine de kilomètres au nord-ouest de Londres. Devant nous se dressent les immenses hangars qui abritent les studios Warner Bros.

Les portes ouvrent à 10 h. Déjà, de nombreux enfants vêtus de capes à l’effigie de Gryffondor – quelques Serdaigle et Serpentard aussi – trépignent dans la file d’attente. Pas de Poufsouffle en vue.

Pourquoi personne n’aime la maison Poufsouffle ?, demande-t-on naïvement à notre jeune expert. « Ce n’est pas qu’on ne les aime pas. Aucun héros de la série n’est associé à cette maison », explique Fiston sur le ton de l’évidence à sa mère.

Dans la file, on entend du français, de l’allemand, du polonais, en plus de l’anglais, bien sûr. Pas qu’on ait douté du succès planétaire – et durable – du petit sorcier, mais on en a une preuve de plus.

Nous avons acheté les billets pour la visite trois mois à l’avance. C’est essentiel de s’y prendre tôt pour obtenir une plage horaire de visite en matinée, même hors saison touristique.

Car bien que la visite prenne théoriquement trois heures, on prévoit y passer la journée.

Ce matin-là, on a d’ailleurs pris la première navette gratuite (à la présentation des billets) chargée de nous amener de la gare de train de Watford Junction aux fameux studios. Le trajet de Londres jusqu’à Watford Junction en train est simple et beaucoup plus abordable que l’option du bus nolisé (qui part aussi de la capitale anglaise). Décorée des couleurs et des graphiques de la série, la navette est impossible à rater.

À notre arrivée, on récupère un audioguide qui comblera notre jeune expert tout le long de sa visite. Il contient un niveau de détails impressionnant sur le making of de la série, même pour celui qui sait « presque tout » sur l’école de sorcellerie de Poudlard. « Pour faire la boutique de baguettes, cela a pris 17 000 boîtes étiquetées à la main ! », s’exclame-t-il, les écouteurs vissés sur la tête.

« Savais-tu que des milliers de plumes ont dû être insérées et coupées à la main pour fabriquer l’hippogriffe Buck ? »

PHOTO MURRAY CLOSE 20D, FOURNIE PAR WARNER BROS.

Daniel Radcliffe dans une scène du film Harry Potter et l’Ordre du Phénix, paru en 2007. À lui seul, l’interprète d’Harry Potter a cassé 80 baguettes durant les tournages des films de la série.

Ou encore : « Les acteurs ont eu besoin de 3000 baguettes. À lui seul, Daniel Radcliffe [l’interprète d’Harry] en a cassé 80 ! »

Avant de pousser la lourde porte qui mène vers le hall de Poudlard, nous avons droit à un court métrage dans lequel les trois grandes vedettes de la saga – Daniel Radcliffe, Emma Watson et Rupert Grint – nous parlent de la « famille géante », composée des équipes de tournage, et des décors qui furent « pendant 10 ans [leur] maison ».

« Dix ans », répète Fiston pour lui-même en se projetant dans un avenir qui lui semble une éternité. « Les acteurs sont même allés à l’école ici », ajoute-t-il, rêveur. On ne va certainement pas briser la magie en lui soulignant qu’un cours de maths dans un studio de cinéma, cela reste un cours de maths.

Puis, nous pénétrons dans l’envers du décor.