C'est le début de la saison des sucres. Avec le redoux prévu dans les prochains jours, des milliers de gourmands se donneront rendez-vous dans des cabanes à sucre pour renouer avec les traditions culinaires d'autrefois. Mais de plus en plus de cabanes s'adaptent au goût du jour. On y offre par exemple des oreilles de crisse sans porc, des fèves aux lards sans lards et d'autres mets végétariens ou végétaliens.

Une simple recherche de La Presse canadienne a permis de trouver une dizaine de cabanes à sucre qui offrent des menus « sans viande » au Québec.

Voici un tour d'horizon d'une tradition qui se modernise.

Samedi matin à la Sucrerie du Domaine, Patrick Noël, le patron, a peu de temps pour discuter avec La Presse canadienne, « parce qu'après 10 heures, c'est la folie » lance-t-il au bout du fil. C'est la première année que sa cabane à sucre, située dans la région de Lanaudière, offre un menu végétalien.

« C'est une très belle saison qui s'annonce et la cabane est presque réservée à pleine capacité jusqu'à la fin des sucres ».

Patrick Noël estime que sa clientèle a augmenté de 30 % cette saison, et cet achalandage s'explique en partie par l'arrivée, sur son menu, de « Fèves au lard pas d'lard », de cretons végétaliens ou encore de la tourtière végétalienne faite à base de champignons et de lentilles.

Le propriétaire de la Sucrerie du Domaine explique que ce sont surtout les clients réguliers, qui adorent pourtant la viande, qui lui ont demandé d'avoir des plats végétaliens.

« Les clients qui aiment beaucoup notre viande nous disaient qu'au lieu d'être un groupe de 20 personnes, ils seraient au nombre de 26 si nous avions un menu végétalien, alors on s'est adapté. »

« On est une cabane hypercarnivore, donc c'est un peu de la bipolarité culinaire », explique en riant celui qui croit que la tendance végétalienne est « là pour rester et n'est pas seulement qu'un effet de mode. »

Des jeunes adultes qui délaissent la viande

En Montérégie, le copropriétaire de la Cabane à sucre Handfield a lui aussi vu sa clientèle bondir depuis qu'il propose un menu « sans viande », tout en conservant le menu traditionnel.

« On a commencé ça il y a quatre ans, à la demande des clients et maintenant c'est la folie. Depuis les menus "sans viande", il y a une augmentation de la clientèle de l'ordre de 30 à 40 % » a précisé Louis-Robert Handfield à La Presse canadienne.

« Il n'y a plus de lard dans nos fèves aux lards et je défie n'importe qui de s'en apercevoir », a-t-il ajouté.

C'est surtout les gens qui ont entre 25 et 40 ans qui demandent le menu « sans viande » selon M. Handfield.

« Ça permet à des gens, qui, autrement, n'iraient pas à la cabane à sucre, de profiter de l'ambiance du temps des sucres », a indiqué le copropriétaire de la Cabane à sucre Handfield.

La pionnière des cabanes végés

Carole Bouthillette, copropriétaire de la Pause Sylvestre, se considère comme la pionnière des cabanes à sucre végétariennes et végétaliennes.

Dans sa cabane située en Estrie, la tourtière est faite avec du millet et des légumineuses depuis près de 20 ans.

Carole Bouthillette a du mal à s'expliquer cette soudaine demande pour des menus à base de protéines végétales. « Je ne comprends pas d'où vient cet engouement, je ne comprends pas que ça prenne une telle ampleur. Mais pour nous, ça ne change rien, on a toujours été à pleine capacité. On reçoit plus d'appels téléphoniques, mais on n'a pas plus de places », dit la propriétaire qui n'a pas l'intention de faire agrandir sa petite cabane de bois rustique malgré la demande.

Si de plus en plus de propriétaires d'érablières revisitent la tradition culinaire du temps des sucres, une chose ne change pas : le sirop d'érable fait sur place demeure la vedette de tous les plats, qu'ils soient à base de millet, ou de porc.