Le micro-ondes trône dans la majorité des cuisines. Que ce soit pour cuire, réchauffer ou décongeler des aliments, il est devenu un allié quasi indispensable de nos vies pressées. Retour sur cette technologie qui remonte à la Seconde Guerre mondiale.

La découverte des micro-ondes en cuisine serait le fruit d'un heureux hasard. Durant la Seconde Guerre mondiale, Percy Spencer, ingénieur de l'entreprise Raytheon, au Massachusetts, travaillait sur un générateur de micro-ondes pour les radars quand il a réalisé qu'une friandise placée dans sa poche avait fondu. Intrigué, il a poussé ses recherches plus loin en pointant son générateur sur un oeuf, puis un épi de maïs : le premier a explosé, tandis que le deuxième a donné du popcorn !

La découverte a vite été brevetée. Dès 1947, Raytheon a lancé un four à micro-ondes destiné à un usage industriel : le Radarange. Il a cependant fallu attendre 20 ans afin que la technologie soit assez avancée pour produire un modèle plus compact et moins cher. Ce n'est qu'en 1967 que l'entreprise Amana a commercialisé un premier micro-ondes à usage domestique assez petit pour être installé sur un comptoir de cuisine.

Cet appareil révolutionnaire était vendu 640 $ à l'époque, soit l'équivalent d'environ 5000 $ aujourd'hui* : une petite fortune, mais est-ce si cher payé pour un appareil censé être « la plus grande invention en cuisine depuis le feu », comme le clamait sa publicité ? Peut-être bien... Dans les années 80, l'arrivée sur le marché de modèles japonais a fait baisser les prix et a ainsi contribué à l'essor des ventes.

En 1986, 25 % des foyers possédaient un micro-ondes. En 2009, ce chiffre avait grimpé à 96 %.

Source : The New York Times - Susan Strasse, professeure d'histoire américaine à l'Université du Delaware

UN SUCCÈS MI-CHAUD, MI-FROID

« Eh bien, voilà un grand pas qui change et changera beaucoup de choses... les fours à micro-ondes », annonçait Jehane Benoit en 1989, en préface de son Encyclopédie illustrée de la cuisine au four à micro-ondes. Malgré les pronostics de Mme Benoit, alors associée, précisons-le, au fabricant Panasonic, l'utilisation du micro-ondes n'a pas détrôné la cuisinière.

Au Canada, les dépenses des ménages canadiens pour les micro-ondes sont restées relativement stables entre 1997 et 2016, d'après Santé Canada. Les ventes ont toutefois connu une baisse importante aux États-Unis*, qui s'explique, selon certains experts, par un désir de privilégier la qualité plutôt que la rapidité en cuisine. Aussi, le micro-ondes dispute maintenant l'espace sur nos comptoirs avec de nouveaux appareils comme la mijoteuse, le cuiseur à riz ou le Vitamix.

Aujourd'hui, il sert essentiellement à décongeler, à réchauffer les restants et les plats préparés ou à faire éclater les grains de maïs. « C'est un effet de mode qui a passé », croit Anne-Marie Desbiens, chimiste et auteure du blogue Foodie scientifique, qui s'est intéressée à cet appareil. Les micro-ondes ne sont plus vendus avec des sondes thermométriques et d'autres accessoires qui permettaient de cuire divers aliments plus compliqués, comme la viande, souligne-t-elle, et l'option de cuisson à convection n'est plus aussi populaire. « J'ai l'impression qu'ils étaient plus technologiques dans les années 80 qu'ils ne le sont aujourd'hui. Il y a un savoir-faire qu'on a perdu. »

* Estimation basée sur des chiffres cités par le New York Times.

Photo fournie par Amana

Ancienne publicité pour un micro-ondes de marque Amana

Photo fournie par Thermodor

Ancienne publicité pour un micro-ondes de l'entreprise Thermodor

Quatre mythes déboulonnés

IL DONNE LE CANCERLes ondes électromagnétiques du micro-ondes sont non ionisantes. Elles ne peuvent arracher les électrons des atomes, contrairement aux ondes ionisantes utilisées notamment pour les rayons X qui, elles, peuvent causer le cancer, soutient Dominic Deslandes, professeur au département de génie électrique de l'ETS. « Beaucoup d'études ont été faites et il n'y a absolument aucune corrélation prouvée entre l'utilisation du micro-ondes et le cancer. » Ce n'est pas tant l'appareil en lui-même que le type de contenant utilisé pour cuire les aliments qui est problématique. Certains plastiques, une fois chauffés, libèrent en effet des substances soupçonnées d'être cancérigènes.

IL DIMINUE LA QUALITÉ NUTRITIVE DES ALIMENTS« Toute source de chaleur va dégrader les qualités nutritives d'un aliment. Ce n'est pas davantage le cas pour le micro-ondes que pour la cuisinière, selon l'ingénieur. La cuisine à l'eau est pire parce qu'elle dilue les vitamines. Le micro-ondes a un avantage sur ce point, parce qu'il cuit à la vapeur », ajoute l'ingénieur.

DES ONDES PEUVENT S'ÉCHAPPER DE L'APPAREILLe danger, si on pouvait l'actionner sans fermer la porte, serait... de cuire. Les anciens modèles étaient en effet moins étanches, mais les micro-ondes d'aujourd'hui sont munis d'un double mécanisme de sécurité pour contenir les ondes, assure le professeur de l'ETS. Les fabricants de micro-ondes sont soumis à des règles de construction très rigoureuses, rappelle Santé Canada. À moins d'en faire un mauvais usage ou d'utiliser un appareil endommagé, il n'y a aucune raison de le craindre, confirme également l'organisme.

DES ONDES DEMEURENT À L'INTÉRIEUR DE L'ALIMENTLes ondes cessent de vibrer dès que l'appareil est en mode « arrêt », un peu comme lorsqu'on éteint le poste de radio. « Les "bips" en fin de cuisson indiquent tout simplement le temps nécessaire pour que la chaleur finisse de se distribuer dans la nourriture et non pas la période requise pour que les ondes se dispersent », précise Dominic Deslandes.

Au-delà de la touche popcorn

Comment ça fonctionne

Le micro-ondes utilise une fréquence de 2,4 GHz, comme un routeur ou des appareils Bluetooth. « Il envoie un signal de 1000 W qui agite les molécules présentes à l'intérieur d'un aliment. Ce mouvement entraîne une friction qui se transforme ensuite en chaleur, explique Dominic Deslandes, professeur au département de génie électrique de l'École de technologie supérieure (ETS). Pour que ce mouvement de molécules se produise, il doit y avoir de l'eau, ce qu'on retrouve dans tous les aliments. » Ce phénomène explique pourquoi des objets solides, comme une assiette de porcelaine, restent froids alors que la nourriture cuit.

Les +

Il produit moins de vaisselle sale et est moins énergivore qu'un four. Il chauffe aussi rapidement les liquides. Les gras et sucres des aliments peuvent aussi accélérer la cuisson, indique la chimiste Anne-Marie Desbiens. « Les meilleures applications maintenant, je dirais que c'est pour cuire les légumes à la vapeur. Ils cuisent rapidement, et comme les vitamines sont plus solubles dans l'eau, on perd moins de la valeur nutritive de l'aliment », ajoute-t-elle.

Les -

« Quand je regarde le temps de cuisson nécessaire pour réaliser plusieurs plats [dans les anciens livres de recettes], ça revient un peu au même qu'au four », souligne la chimiste, qui ajoute à la liste de ses points faibles la complexité de cuire des aliments plus délicats comme la viande ou les gâteaux, à moins d'être équipé d'une plaque de cuisson adaptée (rare et coûteuse).

Le micro-ondes ne peut saisir, comme c'est le cas sur une cuisinière, ou braiser, comme la mijoteuse ou le four. Toutefois, le plus gros problème, selon elle, c'est qu'il cuit de manière inégale. Et ce, malgré l'ajout du plateau tournant et d'un dispositif améliorant la répartition des ondes. « Les ondes pénètrent dans l'aliment à une profondeur de 3 cm, explique la chimiste. Pour bien les cuire, il faut donc les couper en petits morceaux, ou les changer de côté en cours de cuisson et bien les répartir dans l'assiette. » L'intérieur d'un plat reçoit moins d'ondes que les côtés, souligne également Beth Hensperger dans son livre Not Your Mother's Microwave Cookbook. Les parties plus délicates d'un aliment (la pointe d'une asperge, par exemple) doivent, par conséquent, être placées à l'intérieur du plat.

41 %

Selon un sondage commandé par Panasonic, 41 % des ménages utilisent leur micro-ondes chaque jour, soit aussi souvent que la cuisinière.

La cuisine de Jehane Benoit remise au menu

On raconte qu'à l'époque où elle travaillait avec Panasonic, Jehane Benoit avait une dizaine de micro-ondes chez elle, démontrant ainsi que cette nouveauté était non seulement pratique, mais inoffensive. Dans les années 80, la « grande dame » de la cuisine québécoise a décliné son Encyclopédie illustrée de la cuisine au four à micro-ondes en sept volets, desquels nous avons extrait les trois recettes testées.

Note : le temps de cuisson peut légèrement varier d'un micro-ondes à un autre.

PAIN DE BOEUF AU BACON

Préparation : 15 minutes

Cuisson : de 12 à 15 minutes

Ingrédients

1 lb (500 g) de boeuf haché de votre choix

1 tasse (125 ml) de biscuits soda écrasés

1 oignon moyen émincé

2 oeufs battus

1/4 de tasse (60 ml) de crème légère ou riche

1 c. à thé (5 ml) de sel

1/4 de c. à thé (1 ml) de poivre et autant de muscade

1/2 c. à thé (2 ml) de thym et autant de quatre-épices

De 6 à 8 tranches de bacon

Préparation

1. Mettre tous les ingrédients dans un bol, sauf le bacon. Bien mélanger et former en une grosse saucisse.

2. Étendre les tranches de bacon les unes à côté des autres sur une feuille de papier ciré.

3. Placer la viande au milieu des tranches de bacon. À l'aide du papier ciré, ramener les extrémités des tranches de bacon sur la viande. Répéter l'opération de l'autre côté. Bien former le tout en un gros boudin rond, ce qui est facile si vous le roulez quelque peu sur la table en le serrant avec le papier ciré.

4. Placer le rouleau dans un plat de 8 po sur 8 po (20 cm sur 20 cm), cuire à « HIGH » de 11 à 12 minutes, jusqu'à ce que les tranches de bacon sur le dessus soient bien dorées. Retirer du plat avec une spatule large. Servir chaud ou froid.

Nos impressions

Notre plat préféré parmi les trois recettes testées : simple et goûteux. Le bacon est étonnamment doré. À retenir pour un repas vite fait en semaine. Ce pain de viande pourrait aussi être tranché pour être servi en burger.

Note : ++

SOUPE AUX POIS TRADITIONNELLE

Préparation : 30 minutes

Cuisson : 1 heure

Attente : 1 heure

Ingrédients 

De 1 à 1 1/2 tasse (250 à 375 ml) de pois jaunes trempés

8 tasses (2 L) d'eau tiède ou chaude

2 oignons émincés

2 gousses d'ail finement hachées

1/2 lb (250 g) de lard salé en un seul morceau ou 8 tranches de bacon en dés

1 c. à thé (5 ml) de sarriette

1/2 c. à thé (2 ml) de poivre

1/2 tasse (125 ml) de feuilles de céleri émincées

Sel au goût

Trempage

Il n'est pas nécessaire de faire tremper les pois secs la veille. Les mettre dans un grand bol, ajouter 8 tasses (2 L) d'eau chaude. Couvrir et faire cuire 15 minutes à « HIGH ». Laisser reposer couvert pendant une heure ou deux. Égoutter, puis poursuivre la recette.

Préparation

1. Mettre tous les ingrédients dans un bol de 16 tasses (4 L), couvrir.

2. Cuire 30 minutes à « HIGH », brasser et cuire encore 30 minutes à « MEDIUM ».

3. Brasser. Laisser reposer 1 heure, couvert.

4. Réchauffer au moment de servir.

Nos impressions 

Éviter le temps de trempage (normalement d'une nuit) est assurément un plus. Par contre, vous serez déçu si vous pensez retrouver le goût de la soupe aux pois de votre grand-mère. Les pois restent fermes et le bouillon est très liquide. La soupe aurait gagné à cuire davantage. Elle est également meilleure réchauffée. Notre conseil : pour obtenir un goût plus onctueux, passez le tiers de la soupe au mélangeur et ajoutez-le au reste de la préparation.

Note : +/-

GRANDS-PÈRES AUX BLEUETS

Préparation : 30 minutes

Cuisson : 13 minutes

Ingrédients

Sauce

2 1/2 tasses (625 ml) de bleuets frais

1/3 de tasse (80 ml) de sucre

1 bonne pincée de sel

1 tasse (250 ml) d'eau

1 c. à soupe (15 ml) de jus de citron frais

Grands-pères

1 tasse (250 ml) de farine tout usage

2 c. à soupe (30 ml) de sucre

2 c. à thé (10 ml) de poudre à pâte

1/4 de c. à thé (1 ml) de sel

1 c. à soupe (15 ml) de beurre

1/2 tasse (125 ml) de lait

Préparation

1. Mettre dans un bol de 4 tasses (1 L) les bleuets, le sucre, le sel, l'eau et le jus de citron.

2. Cuire quatre minutes à « HIGH ». Bien remuer.

3. Tamiser ensemble dans un bol la farine, le sucre, la poudre à pâte et le sel. Y couper le beurre avec un couteau.

4. Ajouter le lait, tout d'un coup, remuer juste pour humecter la farine.

5. Cuire la sauce aux bleuets trois minutes à « HIGH ».

6. Laisser tomber la pâte dans les bleuets chauds du bout d'une cuiller à soupe. Vous devriez avoir de six à sept grands-pères.

7. Couvrir et cuire six minutes à « HIGH ».

8. Servir tels quels ou avec crème ou crème glacée.

Nos impressions 

Le coulis a bon goût, mais les grands-pères ont sombré dans la sauce. Leur texture était également caoutchouteuse. Le deuxième essai n'a pas été plus concluant. Note : nous avons utilisé des bleuets congelés en omettant l'ajout d'eau. Le coulis était très liquide. On retient toutefois l'idée de cuisiner une sauce fruitée express pour accompagner une crème glacée, un gâteau ou les rôties du matin. Laissez tiédir avant de servir.

Note : +

Photo François Roy, La Presse

L'Encyclopédie illustrée de la cuisine au four à micro-ondes en sept volets, par Jehane Benoit.