Apparus en même temps que les sites d'aubaines quotidiennes à la Groupon, les sites d'enchères à un sou, ou «penny auctions», étaient promis à un bel avenir il y a un an à peine. Jusqu'à ce que la magouille éloigne les internautes et que ces sites se mettent à tomber comme des mouches. Exemple d'une bulle techno qui a éclaté plus vite que prévu...

C'est au début de l'année que la vague des enchères à un sou a frappé le Québec. Jusque-là incarnée par une poignée de sites, la déferlante a pris la forme d'une quarantaine de ces services d'enchères nouveau genre, où il est possible de remporter un lot pour une fraction de son prix coûtant, en misant un seul sou à la fois.

Lancé il y a quatre mois, Bidxzone, de Québec, est un de ces nouveaux venus. Maxime Fortin, son créateur, admet qu'il est difficile de se démarquer. Pour ce faire, il tente le grand coup: en septembre, il mettra aux enchères une maison neuve préusinée. Il assure que le gagnant ne paiera pas plus de 20% de son plein prix de détail.

Si cet événement n'attire pas suffisamment de clientèle, lui et ses deux partenaires devront passer à autre chose. «On ne fera pas d'argent avec ça, on veut établir notre réputation. C'est un marché lucratif, mais il y a tellement de sites à la fiabilité douteuse que ça prend du temps pour se faire connaître. Si le coup de la maison ne fonctionne pas, on va devoir oublier ça, je pense.»

Une clientèle irrégulière

Bidxzone n'aura pas la partie facile. Le portail Enchères à un sou répertorie les sites d'enchères québécois. Près de la moitié de la liste est marquée d'une croix rouge, signifiant que ces services ont fermé leurs portes. Le hic, c'est que contrairement aux entrepreneurs flairant le profit facile, les internautes, eux, n'ont pas suivi.

Pour survivre, certains ont fait preuve d'une créativité douteuse: des petits programmes informatiques faisaient monter les enchères artificiellement. Encore aujourd'hui, le spectre de ces magouilles plane sur les entrepreneurs qui tentent de percer ce marché. Les profits sont aussi rares que les nouveaux abonnés.

«Après l'engouement du début, il y a eu une accalmie. Depuis, on a atteint une masse critique, mais stable de plusieurs milliers d'utilisateurs. Il a fallu investir dans la qualité du service à la clientèle et la rapidité de la livraison. On suit le modèle des grands sites américains d'enchères: l'excédent est réinvesti dans le développement de notre service. On fait peu de profits», explique Jean-François René, président de Bidou.ca.

Fondé au printemps 2010, Bidou.ca est un des premiers sites québécois d'enchères à un sou. M. René veille aussi au développement de Bidoo.ca, sa contrepartie anglophone destinée au reste du Canada. Pour assurer une certaine croissance, l'entreprise du Vieux-Montréal songe à diversifier ses activités.

«C'est difficile, il ne faut pas se le cacher: n'importe qui peut lancer un site d'enchères en achetant un programme tout fait à 1000 dollars. Comme Groupon, on a l'impression que c'est hyper profitable, mais les coûts de développement sont plus importants qu'on le soupçonne.»

Philosophe, Jean-François René ne se plaint pas: ce rythme accéléré de croissance et de saturation d'un nouveau marché est appelé à devenir la norme, selon lui. «Sur internet, on risque de voir ce genre de saturation hyper rapide se produire de plus en plus souvent. C'est pour ça que la clé, c'est d'investir dans la qualité du service.»