Plusieurs joueurs de la LNH, actuels et anciens, tentent de minimiser la portée des railleries de certains joueurs des Sénateurs d'Ottawa à l'égard de l'un de leurs entraîneurs.

Se plaindre ou se moquer de son patron ou d'un collègue remonte à la nuit des temps, évidemment. Et avoir accès à toutes les conversations privées entre joueurs donnerait lieu à de vilaines surprises.

Mais une phrase me trouble particulièrement dans cette vidéo filmée dans une voiture Uber lors d'un voyage des Sénateurs en Arizona, la semaine dernière.

On y entend le premier centre de l'équipe, Matt Duchene, se vanter en rigolant de ne pas écouter son entraîneur depuis trois semaines lors des meetings visant à améliorer le jeu de l'équipe en infériorité numérique.

Je cherche depuis hier à m'imaginer des leaders tels Shea Weber, Patrice Bergeron ou Zdeno Chara à Boston, Jonathan Toews, Sidney Crosby, agir de la même façon et donner un si mauvais exemple aux meilleurs joueurs de l'organisation. Je n'y arrive pas.

Un vrai leader aurait été proactif. Il aurait proposé des solutions. Il aurait fait partie des solutions. Il ne se serait pas caché dans un coin de la pièce en faisant mine d'écouter tout en se foutant éperdument des consignes comme un mollusque.

Les Sénateurs ont payé cher pour obtenir Matt Duchene. Non seulement ont-ils cédé un vétéran apprécié de ses coéquipiers, Kyle Turris, un espoir, le choix de première ronde de 2017 Shane Bowers, mais aussi leur choix de 2019 qui pourrait bien devenir le premier choix au total si Ottawa continue à couler au classement.

Je ne sais pas qui a commandé cette transaction. Le propriétaire Eugene Melnyk? Était-ce l'initiative de Pierre Dorion?

Toujours est-il que Duchene trainait déjà une vilaine réputation. Malgré tout son talent, le DG au Colorado, Joe Sakic, n'a pas annoncé à la terre que son attaquant était sur le marché pour rien. Il cherchait à se débarrasser d'une influence négative dans son vestiaire. Sakic savait trop bien que sans des leaders forts, une équipe est vouée à l'échec.

L'Avalanche venait de rater les séries éliminatoires trois années de suite lorsque Duchene a été échangé à Ottawa. Ils venaient d'amasser 48 points la saison précédente, la pire performance par un club de la LNH depuis l'instauration du plafond salarial.

Le Colorado, mené par Nathan MacKinnon, a pris son envol après le départ de Duchene le 5 novembre 2017. Ils ont maintenu une fiche de 42-28-12 depuis son départ et participé aux séries l'an dernier.

Les Sénateurs étaient passés à un but en prolongation d'atteindre la finale de la Coupe Stanley dans les mois précédant la transaction. Ils avaient une fiche de 6-3-5, au deuxième rang de la division Atlantique, lorsqu'ils ont acquis Duchene. Leur fiche s'établit à 27-46-9 depuis son arrivée.

Duchene deviendra joueur autonome sans compensation à compter du 1er juillet. Il touche déjà six millions par saison. Les Sénateurs sont-ils prêts à lui offrir un lucratif contrat et ainsi rebâtir leur organisation avec un tel joueur comme leader principal? Et si on cherche à l'échanger, quelle équipe voudra offrir la lune pour un athlète dont l'influence est néfaste à ce point?

Le jeune homme de 27 ans n'était pas le seul dans la voiture Uber. Mais il constituait l'un des initiateurs de cette séance de lynchage avec Chris Wideman.

Matt Duchene a déjà été accusé de leadership négatif au Colorado. Il y a quelques années, Patrick Roy l'avait blâmé publiquement pour une célébration excessive après son 30e but de la saison. L'équipe perdait alors 4-0, mais cette marque allait permettre à Duchene de toucher un important boni.

Les déclarations de Patrick Roy après la rencontre, ce 4 avril 2016, auraient dû servir d'avertissement aux Sénateurs.

«Nous avons du bon leadership, mais pas assez de la part de notre noyau, avait déclaré Roy. Notre noyau ne nous a pas prouvé qu'il possédait le leadership voulu pour nous permettre d'atteindre le prochain niveau. "Landy" (Gabriel Landeskog) est essentiellement le seul dans cette catégorie. Erik Johnson fait de son mieux. On a besoin de plus. Nos meilleurs joueurs ont de la difficulté à transporter cette équipe. Point final.»

Joe Sakic est mort de rire. Non seulement a-t-il hérité en outre de Samuel Girard, Vladislav Kamenev et un choix de deuxième ronde dans cette transaction, mais chaque frasque de Duchene, chaque défaite supplémentaire des Sénateurs le rapproche du premier prix: le jeune Jack Hughes, probable premier choix au total en juin 2019.

Les Sénateurs ont ce qu'ils méritent.

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