«La seule chose que je pourrais lui dire: «Arrête d'être poli». Si quelqu'un frappe les meilleurs joueurs de ton équipe ou que tu veux changer l'allure d'un match, tu dois jeter les gants et frapper. Quand il aura passé ce message quatre ou cinq fois, les équipes vont y aller plus tranquillement. »

«Bien sûr, c'est plus facile pour moi de commenter alors que je suis à la retraite et que je vois ce qui se passe. Mais je me souviens du match où Milan Lucic des Bruins frappait tout le monde et Georges est allé le voir pour lui demander s'il voulait se battre. Qui veut se battre contre lui? Personne. Je pense plutôt que dès qu'un joueur a pris la liberté de frapper tes jeunes et tes vedettes, tu n'as pas à lui demander la permission de jeter les gants. »

«Étant donné que Boogaard frappe les meilleurs joueurs des équipes adverses, toutes les formations de l'Ouest ont besoin d'un homme fort. Ça change quoi si Laraque se bat avec Shawn Thornton (Bruins) par exemple. Mais s'il frappe plutôt Marc Savard et Phil Kessel, ça va changer le match. Ça serait le temps que les adversaires courent après Georges et non le contraire ce qui lui permettrait de jouer encore quatre ou cinq saisons. Laraque est de loin le meilleur bagarreur de la Ligue nationale et c'est un très bon joueur de hockey. Qu'il arrête d'être gentil, ça il peut le faire en dehors de la glace. »

L'intégrale de cette interview se retrouve ici sur RDS.ca, sous la plume du collègue Éric Leblanc, qui a eu la bonne idée de nous donner des nouvelles de l'ancien dur à cuire du Canadien, désormais établi dans la région de Vancouver.

J'ai toujours apprécié Odjick, que j'ai eu le privilège de côtoyer pendant les quelques saisons qu'il a passées à Montréal. J'aimais sa bonhommie, son franc-parler, son humanité.

Dans le cas de Laraque, je dois admettre qu'il frappe Ă  nouveau dans le mille.

Je n'oublierai jamais Gino Odjick, comme d'ailleurs tous ceux qui ont eu le privilège de le croiser,  j'imagine. En 2002, il m'accordait une entrevue touchante. C'est le papier dont je suis le plus fier en quinze ans de carrière.

















La Presse

Sports, samedi 16 mars 2002, p. G1

Odjick sans réserve

Brunet, Mathias



Il a grandi dans une réserve amérindienne à Maniwaki et aujourd'hui, il parle russe. Il a terrorisé bien des joueurs sur la glace au fil de sa carrière et pourtant, dans la vie de tous les jours, il est doux comme un agneau. Il est parfois souriant et boute-en-train, parfois complètement perdu dans ses pensées. Certains le disent réfractaire à la médecine moderne.

Malgré son salaire de millionnaire, il habite un sous-sol chez une famille amie à Kahnawake. Il y a quelques semaines, il a fait les manchettes parce qu'il a choisi de rentrer à la maison plutôt que d'accompagner le Canadien à Chicago à la suite d'une algarade avec son " coach ".

Gino Odjick,  31 ans, est sans doute l'un des personnages les plus intrigants du Canadien. Et attachants aussi. Quand on interroge l'entourage de ce robuste ailier droit, on entend souvent la même réponse : " Gino, c'est Gino. Un oiseau rare. Il n'a pas grandi dans un milieu comme le nôtre. Il ne réagit pas comme nous."

Mais ces interlocuteurs s'empressent d'ajouter, en fixant l'index sur leur poitrine : "C'est un homme de coeur. Il pourrait donner sa chemise pour aider un autre. Un homme de parole aussi. Reconnaissant. Sois bon pour lui et il ne t'oubliera jamais. Il sera ton ami pour la vie. Les Amérindiens sont comme ça, fidèles à leur parole et à leurs amis..."

Nous avions fixé le rendez-vous vers midi. "Tu viendras me rejoindre après la pratique. Ce serait mieux qu'on rentre dans la réserve ensemble. Sinon, certains pourraient se demander ce que tu fais là, surtout avec un photographe..."

Vers midi, Odjick a quitté le Centre Molson pour prendre quelques frères de race en visite. Dont Ron Delorme, un ancien joueur des Rockies du Colorado qui oeuvre désormais dans le développement des jeunes hockeyeurs amérindiens et à qui Odjick doit sa carrière. La veille, il avait servi de guide à son coéquipier Jan Bulis, qui désirait acheter de l'artisanat amérindien.

Les deux Jeeps sont garées devant le bungalow où il habite. "Avant l'entrevue, on dîne tous ensemble. Tu es notre invité."

On se met à table. Odjick s'installe sur un bout de comptoir pour laisser une place à notre photographe. Quand son mentor Ron Delorme parle, Odjick n'ose pas ouvrir la bouche. Il écoute avec respect. Dans la cuisine, une voix féminine autoritaire ordonne aux invités de se servir de la soupe dans l'immense chaudron de fonte. Tous se lèvent sans tarder. C'est Rose Lahache, la patronne de la maison...

" La force de notre peuple provient de nos femmes, lance-t-il. Elles ont un rôle très important dans nos communautés. Elles mènent, elles décident tout et on ne s'en rend même pas compte. Comme ici où j'habite. Elles sont nos guides. Nous nous référons à elles. Elles se chargent d'élever les enfants. Parce que les pères sont souvent partis pour gagner des sous pour la famille. Ici, à Kahnawake, la plupart des pères de famille travaillent du lundi à l'aube au vendredi soir tard à New York dans l'industrie du fer. Ils sont ici seulement les fins de semaine. La mère s'occupe de tout. Chez nous, on ne voyait pas souvent mon père parce qu'il travaillait très fort. Ma mère s'occupait de tout à la maison en plus de travailler elle même. "

Gino fait visiter ses quartiers au sous-sol. Sur les murs, des portraits d'illustres chefs indiens. Dont il connaît évidemment l'histoire par coeur.

" De tous les Amérindiens de la Ligue nationale de hockey, Gino est sans doute l'un des plus attachés aux valeurs traditionnelles amérindiennes, lance Ron Delorme. La chasse et la pêche est au coeur de sa vie, chez lui à Maniwaki. Il prie Dieu dans des petites habitations spécialement aménagées qu'on appelle les Sweat Lodge. Il rend bien tout ce qu'on lui a donné. Il ne dit jamais non à des activités de bienfaisance. "

Sa chambre n'est pas trop grande. Il n'y a aucun objet superflu. Pourquoi un sous-sol chez des amis et non une grande maison Ă  lui ? Ou un condo dans le Vieux ?

" Non. Je suis un gars de tribu. J'ai besoin de vivre avec des gens. Nous étions toujours 10, 15, 20 à la maison à Maniwaki. J'ai six soeurs, et il y avait toujours plein d'enfants de tribus différentes que nous hébergions parce qu'ils fréquentaient l'école dans notre coin. J'ai toujours vécu dans des familles depuis le début de ma carrière. La famille David à Laval, une famille à Vancouver, puis avec la famille Lahache, ici à Kahnawake. Quand on est habitué de vivre d'une certaine manière, c'est plus facile de vivre avec une famille. On a les mêmes traditions. Lorsque l'on vit en groupe, on ne manque jamais de support. Quand les choses vont moins bien, je peux en parler avec eux. De toute façon, j'ai toujours aimé vivre dans des sous-sols. C'est frais, c'est relaxant... "

Sa famille, sa famille naturelle, de descendance algonquine, il la retrouve dès qu'il peut, l'été surtout, à Maniwaki, au nord de Mont-Laurier, où il a grandi. La forêt est assez grande pour vivre en parfaite harmonie avec la nature, chasser et pêcher pour assurer sa subsistance. " C'est une communauté qui a été construite dans la période des Grandes Guerres mondiales. On nous a légué ces terres en échange d'une participation à la guerre. Avant, nous vivions dans la région d'Oka, ou ailleurs. On voulait retourner dans le bois avec les animaux. La vie était devenue trop facile parce qu'on nous donnait trop de choses. On aimait mieux s'éloigner et garder nos traditions dans le bois. "

Odjick a appris à chasser très tôt. " Quand j'étais plus jeune, il était nécessaire de chasser pour fournir de la viande à ma grand-mère, à ma soeur et aux autres. Mon père et mon grand-père, comme mes oncles, m'ont appris les rudiments de la chasse. On le sait vite quand le temps est venu d'être assez vieux pour chasser. Quand la grand-mère te dit en te regardant dans les yeux qu'elle mangerait bien un bon steak d'orignal, pas besoin de te faire un dessin. Tu comprends. Et on partait pour un, deux, trois, quatre jours. On ne rentrait pas sans avoir ramené la bête. C'est trop gênant de rentrer les mains vides... "

C'est également dans la forêt que Gino Odjick admet avoir appris à se battre. Mais à se battre contre qui ? " Pas vraiment à se battre pour vrai, répond-il, mais à se chamailler, à lutter entre amis. Il fallait bien passer le temps. On se battait, on lançait des roches sur les arbres. On était en pleine forêt. Il n'y a pas d'arcades là-bas. Ni de parcs, ni de " Toys'R Us "... "

Odjick, acquis des Flyers de Philadelphie l'an dernier, dit n'avoir manqué de rien dans son enfance. " Nous n'étions pas très riches, ajoute-t-il, mais je n'ai jamais eu faim. S'il y a de la soupe pour un, il y en a pour deux, pour trois, pour quatre, on se débrouille pour que tout le monde mange. Quand un membre de notre tribu est malade, nous sommes dix à l'hôpital et on est tous un peu malade pour donner de la force. Si un autre vient de recevoir une grande nouvelle, on fête tous avec lui. Il n'y a jamais personne de seul parmi nous. Si quelqu'un touche à un membre de la famille, on va tous défendre son honneur."

" Aussi, il n'y a pas beaucoup de burn-out chez les Indiens. Quand quelqu'un n'a pas réussi un projet, il n'a pas raté sa vie. C'est simplement un projet qui n'a pas marché. On recommence. Si ça va bien, on mange du filet mignon. Si ça va moins bien, on mange du baloney. Mais on se tient."

" À vivre ainsi en groupe, on apprend le respect. C'est très important pour nous. Nos personnes âgées sont vénérées. Ce sont les personnes que l'on respecte le plus et vers qui on se tourne régulièrement pour prendre conseil. Certaines sociétés traitent leurs aînés de façon différente, mais ce n'est pas à moi de juger comment vous vivez. Nous ne sommes pas mieux qu'une autre culture, nous sommes ce que nous sommes. Pour nous, la présence des aînés est essentielle car la transmission des connaissances et des traditions se fait uniquement oralement. C'est pour ça que je ne disais pas un mot tantôt quand Ron Delorme parlait à table. Parce que c'est lui qui m'a permis de faire carrière au hockey. "

Odjick aime bien faire le vide dans les Sweat Lodge, ces espèces de saunas aménagés pour faire la prière. " C'est construit comme le ventre d'une mère. On peut y passer plusieurs heures. Ensuite, on plonge dans la rivière à côté, même si elle est glacée. Le chaud et le froid, c'est une façon de créer un équilibre. Je prie beaucoup. Je crois en Dieu, aux esprits. Je crois que les esprits nous accompagnent et nous guident. C'est pourquoi je n'ai nullement peur de la mort. Quand on a mené une bonne vie, et que le Créateur a décidé qu'il était l'heure de mourir, à 70 ans, il n'y a pas de problème. On a fini de se battre. On donne notre esprit et notre pensée à l'autre à côté de soi et on se retrouve dans le monde des esprits. Nos esprits ne meurent jamais. Même si tu n'es plus là physiquement, tu es toujours là. Les femmes en pleurent un coup quand il y a des morts, mais on se dit aussi que c'est la fin de la souffrance. On est heureux parce qu'on sait que tout va être correct dans le monde des esprits. "

Aujourd'hui, le colosse du Canadien ne chasse plus comme jadis. " J'aime retourner à Maniwaki pour retrouver mon clan, me ressourcer dans ma cabane de bois et pêcher. Le téléphone ne sonne jamais, il n'y a pas de bruit. Ma mère me demande de ne plus chasser l'orignal et le chevreuil, de les laisser pour ceux qui en ont vraiment besoin. Elle a bien raison, le Canadien me paie bien. Si j'ai besoin de 10 poissons et que j'en pêche 25, j'irai porter le surplus à mes oncles. "

Odjick a sept enfants, de quelques mamans différentes. " Ils habitent à Maniwaki et tout le monde s'en occupe, les mamans, les grands-mamans, les tantes et les autres. Je veux que mes enfants demeurent là-bas pour qu'ils apprennent l'importance de qui ils sont et aussi qu'ils prennent conscience de la force d'un groupe. En plus, ils sont bien protégés là-bas. Personne ne s'attaque aux enfants sur la réserve. Il y a deux des mamans qui habitent à Laval et qui offrent du bon support aux enfants. Et elles ont des chums qui sont également très bons pour les enfants. Je n'ai pas à m'inquiéter pour les enfants. Moi, je travaille à Montréal pour m'assurer qu'ils ne manquent jamais de rien. " (Notons qu'Odjick doit, comme nous tous, payer ses impôts fédéraux et provinciaux pour l'argent gagné à l'extérieur de la réserve.)

Et comment un Amérindien en vient-il à apprendre le russe ? " C'est en me liant d'amitié à Vancouver avec Pavel Bure, mon grand copain avec Donald Audette. Je trouve que les cultures russe et amérindienne se ressemblent beaucoup dans le sens que nous sommes très attachés à nos valeurs ancestrales et familiales. Les Russes aussi écoutent beaucoup leurs aînés. Le respect dans sa culture est très important. Nous nous sommes retrouvés à Vancouver, éloignés de nos clans qui nous protégeaient, et nous étions un peu perdus dans ce nouveau contexte. Ça nous a rapprochés. Et Pavel, malgré son succès, n'a jamais oublié ses origines. Après la saison, il rentre en Russie retrouver son monde. Même quand il ne jouera plus au hockey, il restera mon ami. Ce n'est pas ce que la personne peut nous apporter qui fait de quelqu'un un ami à nos yeux. C'est le coeur de la personne qui est important. Et nous sommes tous égaux. Toi et moi, il n'y a pas de différence. Chaque jour, on se lève et on va aux toilettes."

" Donald aussi sera mon ami pour la vie. La famille Audette m'a beaucoup aidé quand j'étais junior. Ça s'est poursuivi. Son père m'emmenait souvent au restaurant. Quand il changeait de sofas, il les donnait pour mes enfants. Il y a plusieurs sofas des Audette à Maniwaki. À Vancouver, les parents de Pavel nous faisaient des bouffes. Je peux vous dire une chose, sur la réserve, il y a beaucoup de gens qui prient régulièrement pour Donald et Pavel... "

Gino Odjick souhaiterait une plus grande harmonie entre son peuple et les autres, et de l'espoir pour les jeunes de sa communauté aussi. " C'est important pour moi de travailler avec les jeunes dans nos écoles de hockey en compagnie de Ron Delorme et d'autres joueurs amérindiens de la Ligue nationale, comme Arron Asham, Sheldon Souray et Wade Redden. Pour que nos jeunes partout à travers le Canada croient en leurs chances de réussir dans n'importe quel domaine. On veut que notre peuple devienne meilleur. Dans mon coeur, je crois que c'est ça ma job dans la vie. Rendre ma famille et mon peuple fiers. Qu'on ne soit pas gêné d'être indien, qu'on croit en nous et en notre culture. Je ne suis pas parfait, mais je fais mon possible. Je suis comme je suis. Pas meilleur qu'un autre, mais pas pire non plus. "

Pour cette raison, Odjick n'aime pas beaucoup jeter les gants contre un membre de sa communauté. " C'est comme si on leur envoyait un message contradictoire. On leur dit qu'il faut s'unir pour réussir et ils nous voient nous battre sur la glace. Si on n'a pas le choix, on va le faire. Comme lorsque Sandy McCarthy a débuté sa carrière à Calgary ; c'était le dernier match préparatoire des Flames et il devait prouver qu'il voulait son poste. Je lui ai dit qu'on pouvait y aller. Ç'a été tout un combat, il y a eu une ovation monstre après la bataille. On s'est donné une petite tape dans le dos et après le match, on a soupé ensemble et on en a ri. "

Gino Odjick, lui, a appris son hockey à la réserve. Jusqu'à ce qu'il reçoive, à 17 ans, un appel de Bob Hartley qui dirigeait une équipe junior à Hawkesbury. " Je me rappelle de mon premier entraînement, j'étais appuyé contre la bande et je ne comprenais rien à ce qu'on disait. Je n'avais jamais eu d'entraînement comme tel. Ces expressions comme les attaques à trois contre deux, les replis, j'étais complètement mêlé. Je m'y suis fait tranquillement... "

Odjick se trouvait encore au Québec, avant le camp d'entraînement des Canucks de Vancouver, quand la crise d'Oka a éclaté. " Ce fut un conflit difficile. On espère toujours que la situation soit meilleure. Tout ce qu'on demande, c'est de ne pas avoir à changer notre façon de vivre, sans déranger personne. En retour, tout ce qu'on veut, c'est de ne pas être dérangé. Il s'est produit quelque chose de politique à Oka et ce n'est pas à moi de juger. Une chose est sûre, cependant, c'est qu'on veut vivre et se faire respecter. Si on se fait respecter, il n'y aura jamais de problème avec un Indien. Pendant la crise d'Oka, j'étais fier de mon monde parce qu'ils se sont tenus debout. Ils ne croyaient pas qu'on pouvait construire un terrain de golf sur notre cimetière parce que nos morts à nous, ils sont vivants, on les respecte."

" La situation aurait pu se dérouler de façon différente, mais ce n'est pas à moi de décider qui avait raison ou tort dans cette histoire. J'ai toujours respecté ceux qui se tenaient debout. Je vais donner un exemple. Avec les Canucks, il y a plusieurs années, Mike Keenan avait décidé, lors d'une visite à Montréal, de laisser tous les Québécois dans les estrades. Sans doute pour prouver son autorité. Enrico Ciccone l'a " blasté " dans les journaux. Lors du match suivant, à Philadelphie, Keenan lui a demandé de s'excuser devant tout le monde dans le vestiaire, sinon, il le mettait à la porte. Enrico s'est levé et il a refusé. Keenan s'en est débarrassé. Et Enrico jouait le meilleur hockey de sa carrière à l'époque. Je regrette de n'avoir pas été plus âgé et expérimenté à ce moment-là. Je l'aurais défendu. Mais son geste n'a pas été oublié. À mes yeux, Enrico c'est un homme parce qu'il s'est tenu debout pour ses coéquipiers et je vais le respecter toute ma vie pour ça. Le respect, c'est ça. "

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