(Buffalo) Si Cole Hutson devait être repêché par le Canadien, il arriverait en terrain connu. Et ça n’a rien à voir avec ce que son grand frère Lane a pu lui raconter.

En mars dernier, Cole Hutson, défenseur membre du Programme national de développement des États-Unis, a subi une blessure à une cheville. Comme il est un protégé de la firme Quartexx, située à Montréal, c’est dans la métropole qu’il a été convié pour sa rééducation.

« J’en ai profité pour assister à environ huit matchs du Canadien, raconte-t-il à La Presse. C’était fou parce que des fans m’ont reconnu, m’ont demandé des photos, des autographes. En voyant ça, tu comprends que tu es dans une ville de hockey. C’est incroyable. »

Par procuration, il a donc pu comprendre l’enthousiasme avec lequel Lane Hutson était attendu. Il n’a toutefois pas eu droit à la totale ; le 16 avril, quand Lane a disputé son premier match au Centre Bell, Cole était en direction de la Finlande pour le Championnat du monde des moins de 18 ans. En fait, il décollait cette journée-là, ce qui lui a permis d’assister, la veille, au tout premier match de Lane, à Detroit.

Ce qu’il en retient ? « Je ne me rappelle pas où j’étais assis tellement c’est flou dans ma tête ! », admet-il. C’est toutefois moins flou quand on lui demande si une séquence l’a marqué pendant le match. « Son premier point, évidemment. Il a reçu la passe de David Savard, a patiné le long de la ligne bleue, il a tiré et [Brendan] Gallagher a fait dévier la rondelle. Je vais m’en souvenir jusqu’à ma mort ! »

Gallagher a plutôt marqué sur le retour, mais donnons-lui les points pour l’effort.

Le fardeau des petits défenseurs

C’est au camp d’évaluation des espoirs en vue du repêchage de la LNH que l’on rencontre Cole Hutson, par une fin d’après-midi ensoleillée.

Le jeune homme est catégorique. « Mon but, toute ma vie, a été de faire tout ce que Lane fait, mais mieux », lâche-t-il. Il marche dans les traces de son frère en participant à ce camp, et l’automne prochain, il lui succédera à la ligne bleue de Boston University, où il « espère en faire encore plus que lui ! » Pas une mince tâche, sachant que Lane Hutson a battu des marques d’un certain Brian Leetch dans la NCAA…

Au camp d’évaluation, les équipes enchaînent les entrevues. Les espoirs sont aussi soumis à des tests physiques et médicaux, ils sont mesurés et pesés.

Cette étape est particulière pour les frères Hutson. Lors de son passage ici en 2022, Lane avait remis aux équipes un rapport médical attestant que sa croissance n’était pas terminée. Il avait tout de même glissé au 62rang du repêchage.

Cole ne sera jamais, lui non plus, confondu avec Jeff Juden. La LNH l’a mesuré à 5 pi 10 ¼ po cette semaine. À titre indicatif, sur les 57 défenseurs repêchés dans les deux premiers tours depuis 2021, seulement 8 mesuraient moins de 5 pi 11 po. Et nous voici en pleine finale de la Coupe Stanley avec deux équipes qui comptent seulement des arrières de 6 pi ou plus. Chez les Oilers, le plus petit défenseur, Brett Kulak, fait 6 pi 2 po.

Or, Cole devra faire face aux mêmes défis que son frangin, car il a un profil similaire. Même s’il a établi le record de points en une saison pour un défenseur du programme américain, rien n’assure qu’il sera réclamé au premier tour. Ce ne sera pas le cas si les 32 équipes ont la même lecture que la Centrale de recrutement de la LNH, qui le classe 55e parmi les patineurs nord-américains.

Mais grâce à son grand frère, Cole Hutson était prêt à affronter les doutes. « Je sais comment répondre aux questions sur ma taille. »

Lane et moi avons dû combattre l’image du défenseur de petite taille, pas très bon en défense, toute notre vie. On a toujours essayé de prouver aux gens qu’ils avaient tort, et ça fonctionne.

Cole Hutson

Il reste évasif au sujet des reproches des recruteurs. « Des détails, lance-t-il. Ils ne nomment rien que je fais horriblement mal, mais ils ne pensent pas que des gars plus petits peuvent jouer comme défenseurs dans la LNH. »

La situation fait bondir Joe Pereira. Ce dernier est entraîneur adjoint à Boston University, où a joué Lane Hutson ces deux dernières saisons. Pereira a aussi participé au recrutement de Cole Hutson.

« Les gens devraient parler de ce qu’il peut faire ; piloter un avantage numérique, produire de l’attaque à 5 contre 5. C’est un défenseur qui finit toujours dans le positif, donc au bout du compte, il t’aide à gagner des matchs », plaide Pereira, au bout du fil.

Le coach esquive habilement la question sur les habiletés défensives. « Je vois un gars qui a souvent la rondelle, donc il n’a pas à se défendre souvent. Mais son jeu défensif ne me fait pas si peur que ça. Je comprends que les recruteurs ont un travail à faire et que certains ont peur d’associer leur nom à un petit défenseur. Mais il a eu du succès partout. »

C’est un talent de 1er tour, et s’il glisse au 2tour, une équipe sera très heureuse.

Joe Pereira, entraîneur adjoint à Boston University

Cette équipe sera-t-elle le Canadien ? Il avait rendez-vous avec Montréal cette semaine, mais la rencontre n’avait pas encore eu lieu au moment de notre entrevue, mardi.

« Je pense que ça pourrait fonctionner, croit Cole Hutson. Lane et moi nous sommes beaucoup entraînés ensemble ces derniers étés. On fonctionne très bien ensemble. On cadrerait bien avec le personnel du Canadien. Martin St-Louis était lui aussi un petit joueur et il sait coacher. Je serais bon avec lui. »

Un grand sage a déjà dit qu’un verre de lait, c’est bien, mais que deux, c’est mieux. On peut toutefois se demander si les équipes de la LNH en diront autant des défenseurs de petit gabarit.