(Vancouver) Le divertissement pendant les pauses au Rogers Arena vaut à lui seul le prix du billet. La plupart des segments sont réussis à merveille et déclenchent une authentique hilarité dans la foule.

Consultez le sommaire du match

Prenez ce jeu-questionnaire opposant un partisan des Canucks à un partisan du Canadien. Celui des Canucks se faisait poser des questions bêtes, par exemple « Qui est ton joueur préféré ? ». Celui du CH a dû nommer le capitaine de l’équipe en 1915 et la date du premier match de Youppi ! comme mascotte. On vous laisse deviner qui a gagné.

Avant le match, un autre de ces segments mettait en vedette deux gamins qui étaient interviewés. On ignore s’ils étaient des comédiens plantés dans la foule, mais ils avaient le charisme de Macauley Culkin en 1990. À la fin de l’entrevue, ils étaient invités à transmettre un message aux partisans du Canadien.

« Bonne chance, vous en avez besoin », lance l’un. « Vous allez passer une looooongue soirée », ajoute son ami.

Les réseaux télévisés nous bombardent d’« experts » des paris sportifs, mais dans ce cas-ci, les conseils des deux pré-ados auraient suffi. Les Canucks n’ont guère été menacés et ont signé un gain sans appel de 4-1 sur le Canadien.

Pression et frustration

Ils n’étaient pas les seuls à avoir prévu le coup, remarquez. Trevor Letowski lui-même était très lucide, même clairvoyant, à sa rencontre avec les médias jeudi matin.

« Ils ont un style très lourd et ils vont mettre de la pression sur nos jeunes défenseurs, avait prédit l’entraîneur-chef remplaçant du CH. Réussir de belles sorties de zone sera le principal défi ce soir. C’est différent d’Edmonton, qui va te battre en possession de rondelle, en contre-attaque. Vancouver a un style un peu plus simple tout en étant dangereux et très talentueux. »

Comme Madame Minou dans ses bonnes années, Letowski avait vu juste. Nombreuses ont été les séquences où les Montréalais devaient précipiter leurs gestes parce qu’ils avaient un gilet bleu dans le visage.

PHOTO BOB FRID, USA TODAY SPORTS VIA REUTERS CON

Nick Suzuki (14) et Conor Garland (8)

Mais comme le coach l’a sagement rappelé après la joute, « c’est une chose de savoir ce qui s’en vient, mais c’en est une autre de le vivre. »

En plus de cette pression, le Canadien a eu à vivre avec la frustration, tant envers les adversaires que les arbitres. En fin de première période, en particulier, les joueurs ont semblé perdre le contrôle. Josh Anderson était si ulcéré envers les hommes rayés qu’il a oublié de se replier ; son ancien coéquipier des Knights de London Nikita Zadorov n’en demandait pas tant et en a profité pour inscrire son deuxième but du match.

Sa frustration s’ajoutait à celle de Kaiden Guhle, atteint au visage d’un coup de coude de Teddy Blueger quelques instants plus tôt, bardassé toute la soirée. On pourrait même se demander si cette frustration ne s’ajoutait pas à celle de mardi soir, à Edmonton, quand l’équipe a offert deux avantages numériques de suite aux Oilers sur des pénalités que les joueurs ont jugé sévères.

PHOTO BOB FRID, USA TODAY SPORTS VIA REUTERS CON

Teddy Blueger (53)

« C’est une game avec beaucoup d’émotions et tout le monde veut gagner. En même temps, on peut mieux réagir, ne pas être sur les arbitres aussi souvent, a concédé le défenseur Mike Matheson. Ça ne change jamais rien et parfois, ça peut nous éloigner de notre plan de match et devenir une distraction. »

La frustration s’est même transportée dans le vestiaire, où le généralement affable Juraj Slafkovsky était d’humeur massacrante, nous ont dit les collègues qui ont eu le temps de lui parler. Parce qu’après une petite minute de réponses courtes, il tournait déjà les talons.

Longue fin de saison

Le Tricolore conclut donc sa traversée de l’Ouest canadien avec trois défaites (0-2-1), séquence qui correspond avec l’absence derrière le banc de Martin St-Louis, retenu pour des raisons familiales.

En prenant un pas de recul, on note une fiche de 5-11-4 depuis la pause du match des étoiles, qui coïncide cette fois avec l’échange de Sean Monahan. Une pénible fin de saison était prévisible, et même si les Montréalais ont été plus dignes dans certaines de ces défaites, la réalité du manque de talent les rattrape certains soirs, comme en ce jeudi soir dans la ville de Bryan Adams.

Prenez la deuxième vague de l’avantage numérique, où on retrouve Josh Anderson et Tanner Pearson, auteurs d’un but chacun depuis le début février, Rafaël Harvey-Pinard, auteur d’un seul but cette saison, et Brendan Gallagher, trois buts et une passe à ses 16 dernières sorties. Avec autant d’éléments qui se cherchent, difficile de s’attendre à des miracles.

Idem pour le deuxième trio, ébranlé par la perte de Joshua Roy. Le Québécois est rempli de talent, mais il reste qu’un joueur de 20 ans, comptant 23 matchs d’expérience dans la LNH, ne devrait pas être indispensable au succès d’une unité.

Reste à voir si l’air frais de Seattle inculquera un nouveau souffle à ce groupe, qui clopine jusqu’au fil d’arrivée. C’est bien beau de voyager de la sorte, entre frères, mais aucun doute qu’une victoire ici et là remettrait quelques sourires sur les visages.

En hausse :

Jordan Harris

PHOTO BOB FRID, USA TODAY SPORTS VIA REUTERS CON

Jordan Harris

Employé à droite, aux côtés de Mike Matheson, il a bien répondu au défi. Mention honorable à Nearly Neil, fabuleux imitateur de Neil Diamond qui chantait pendant les entractes et les pauses. Look identique, voix identique. Chapeau.

En baisse :

Joel Armia

Nettement moins efficace que ce qu’il a montré dans les derniers mois. Une rare contre-performance pour le gros ailier cette saison.

Le chiffre du match :

6

Avec son but, Juraj Slafkovsky a étiré à six sa série de matchs de suite avec au moins un point.

Dans le détail

Nouveaux duos

On le mentionnait plus haut, Trevor Letowski a jugé qu’il était temps de brasser la soupe en défense. Seul le duo de Gargantua et Pantagruel, Arber Xhekaj et David Savard si vous préférez, a survécu. Jordan Harris a été muté à droite, avec Mike Matheson, ce qui a permis à Kaiden Guhle de retourner sur son côté gauche naturel, aux côtés de Johnathan Kovacevic. Cela dit, Letowski s’est permis d’improviser par moments pour déployer quelques variations. « On a regardé leur formation et on trouvait que leurs deux premiers trios sont à peu près aussi fort l’un que l’autre. Donc on a décidé de séparer Guhle et Matheson pour voir ce que ça donnerait. […] », a expliqué Letowski. On comprend que l’idée était de compter en tout temps sur un des vétérans de la défense, soit Savard, Matheson et Guhle. Une autre preuve de la rapide progression de Guhle.

Un retour sans amour

Ça s’était mal fini pour Tanner Pearson à Vancouver et son retour a été à l’image de cette fin en queue de poisson. Ça a commencé après l’entraînement matinal de jeudi, par une mêlée de presse plutôt terne. La gestion par les Canucks de sa blessure à la main avait viré au fiasco, le sujet est revenu dans les questions et Pearson a aussitôt refermé la porte. « Ce n’est pas un sujet dont j’aime vraiment parler », a-t-il rappelé. Sa présentation à l’écran géant manquait tout autant d’amour. Plutôt que d’attendre une pause publicitaire, son retour a été annoncé pendant un arrêt de jeu, au moment où Pearson s’amenait pour une mise au jeu. Et ses anciens coéquipiers ne l’ont guère ménagé, lui brassant le pommier à quelques reprises. Noah Juulsen lui a d’ailleurs servi un bon coup d’épaule en deuxième période. Et pour en rajouter une couche, il n’a joué que 10 min 31 s, employé au sein du quatrième trio avec Colin White et Michael Pezzetta.

DeSmith hante son ancienne équipe

L’affrontement revanche de Casey DeSmith contre le Canadien était attendu avec impatience. On exagère, évidemment ; DeSmith a été membre du Canadien pendant six semaines, en août et septembre. L’homme masqué a fini la soirée à titre de troisième étoile, mais sans rien lui enlever, il n’a pas été très sollicité, 17 fois pour être précis. Il a tout de même réalisé quelques arrêts cruciaux, notamment contre Joel Armia et Alex Newhook, montrant la rapidité de ses jambières. Avec ce gain, DeSmith a porté sa fiche à 10-5-6, avec une efficacité de,900, légèrement inférieure mais comparable à celle de Samuel Montembeault (,903) et de Cayden Primeau (,905).