(Vancouver) « Prends l’Pacifique, j’garde l’Atlantique », chantait Charlebois. Alex Newhook, lui, veut les deux.

L’attaquant numéro 15 du Canadien a grandi à St. John’s, à un bout du pays. À 16 ans, il s’est exilé à l’autre bout, à Victoria, le temps de deux saisons, afin de jouer dans la BCHL.

« Les gars me posaient justement la question. En avion, l’itinéraire le plus court prenait 10 heures, 10 heures et demie, se souvient Newhook, en entrevue avec La Presse. Ma maison à St. John’s est à cinq minutes du mile 0 de la Transcanadienne. Et à Victoria, j’habitais à 10 minutes du mile 0. Donc j’étais à 15 minutes d’être d’un océan à l’autre, littéralement. C’est fou ! J’ai pris des photos aux deux endroits. »

La performance de Kaiden Guhle devant les siens jeudi à Edmonton a fait beaucoup jaser. Mais quand, comme Newhook, on vient d’un coin de pays aussi reculé que Terre-Neuve, il n’y en a pas vraiment, des matchs à la maison. Seulement des occasions ici et là de renouer avec de vieilles connaissances.

Dans son cas, ces lieux sont Toronto, où il est parti à 14 ans ; Boston, où il a joué son hockey universitaire ; le Colorado, où il a été repêché et a fait ses premiers pas chez les pros. Et Vancouver, où il jouera ce jeudi contre les Canucks, soit à trois heures d’auto et de traversier du lieu où il a fini son adolescence.

« Ma tante, la sœur de mon père, habite à Victoria. Donc j’ai de la famille et des amis qui vont prendre le traversier [ce jeudi] pour venir me voir », a-t-il expliqué, assis à son casier, après l’entraînement de mercredi.

Pour réaliser son rêve de jouer dans la LNH, Newhook savait qu’il serait poussé vers un mode de vie nomade. Ainsi va la vie quand on vient d’une province de 500 000 habitants répartis sur un territoire deux fois grand comme la Grande-Bretagne.

Plus petit, je jouais surtout autour de St. John’s. Mais une fois dans le AAA, on se promenait plus, on allait sur la côte ouest, au centre de l’île, des trajets de quatre heures, parfois de huit heures, juste pour un tournoi.

Alex Newhook

« C’était différent de l’Ontario ! Je m’ennuie de cette époque. Mais je devais éventuellement faire mes preuves auprès des autres bons joueurs du Canada. À Terre-Neuve, il n’y a pas tant de profondeur », ajoute-t-il.

S’il a dû s’imposer davantage de sacrifices que les joueurs qui proviennent des grands centres, Newhook demeure fier de ses origines. « Peu de gars de la LNH viennent de là. J’en suis très fier et je veux être un bon ambassadeur pour ma province. Quand tu viens de là, tu veux montrer que peu importe d’où tu viens, tu peux atteindre la LNH. Ça m’a toujours motivé. »

Un rôle majoré

Le résultat de ce long parcours, c’est un joueur de 23 ans, avec encore trois ans de contrat à écouler, qui occupe un rôle de plus en plus important à Montréal.

C’est en partie lié aux circonstances. Les centres Kirby Dach et Christian Dvorak auront raté la quasi-totalité de la saison, et Sean Monahan a été échangé. Mais le pari de Kent Hughes était de sortir son ancien client de l’Avalanche, une équipe à maturité qui n’était pas en mode développement, pour l’amener à Montréal, sous les bons soins de Martin St-Louis, qui veut faire du développement sa marque de commerce.

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Alex Newhook (15), en conversation avec Juraj Slafkovsky et Mike Matheson

« J’aime sa façon de coacher. C’est très clair qu’il a toute une tête de hockey, dit Newhook, au sujet de son entraîneur actuellement à l’écart de l’équipe. Il est très impliqué. Les conversations individuelles qu’on a, c’est très positif. J’ai beaucoup appris de lui dans cette courte période. »

Avant sa blessure, fin novembre, il jouait en moyenne 16 minutes par match, un chiffre qui est passé à 17 minutes depuis son retour, en raison des circonstances susmentionnées. Tout le contraire des neuf minutes par match qu’on lui donnait lors des dernières séries chez l’Avalanche.

Commençait-il à broyer du noir ?

Je ne dirais pas ça, mais c’était frustrant. Je suis compétitif. J’essayais d’obtenir du temps de jeu, et quand tu n’as pas les réponses que tu cherches, c’est difficile.

Alex Newhook

« Je me demandais comment jouer plus et ça ne s’améliorait pas. Mais on avait une bonne équipe, donc il fallait mettre son ego à la porte et prendre sa place pour être dans une équipe gagnante. »

« Ici, je sens que j’ai plus un impact. C’est beaucoup grâce au temps de jeu, mais je joue mieux, j’ai fait un pas dans la bonne direction et je sens que je peux en faire un autre. Mais c’est bien de sentir que je peux faire pencher la balance dans chaque match, que ce soit défensivement ou offensivement. »

Ce rôle, il l’a occupé depuis son retour au sein d’un trio avec Joel Armia et Joshua Roy. Un improbable assemblage de joueurs, si on se reporte à octobre dernier, puisqu’Armia et Roy ont commencé la saison à Laval dans des circonstances bien différentes. Newhook a lui-même affronté l’adversité en étant à l’écart du jeu pendant plus de deux mois.

Malgré la présence d’une recrue, Roy, et d’un joueur qui doit rattraper le temps perdu, Newhook, l’unité présente un bilan neutre jusqu’ici : 8 buts marqués, 8 buts accordés.

« Aucun de nous ne doute de ses capacités. On sait quel genre de joueurs on peut être et on l’a montré ces dernières semaines. On peut tous s’aider et on est bons pour faire bien paraître les autres. »

La blessure de Roy (voir la capsule) pourrait signifier la fin de cette association pour cette saison. Mais ce qui va rester, c’est que Newhook ressemble de plus en plus à un centre apte à jouer dans la LNH, ce qui donnera davantage de flexibilité au Tricolore quand viendra le temps de concocter la formation de la saison prochaine.

Le sacrifice de Roy

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Joshua Roy

Joshua Roy s’est blessé mardi à Edmonton et est « en direction de Montréal », a annoncé le Tricolore mercredi après-midi. Il va y subir « une évaluation approfondie », selon l’équipe, et sera absent pour une période « indéterminée ». Aucun détail n’a été donné sur sa blessure. En troisième période, il a bloqué un tir du défenseur Evan Bouchard avec sa main droite. Roy a tout de même effectué deux autres présences après cette séquence. Mercredi matin, le confrère de TVA Sports Anthony Martineau a croisé Roy à l’aéroport de Vancouver, et Roy portait une attelle à la main droite. Newhook a eu de bons mots pour son jeune compagnon de trio. « C’est un match serré. On place le jeune dans une situation où il doit être fiable défensivement. Qu’il fasse ce genre de jeu en dit long sur son caractère, sur ce qu’il est prêt à faire pour nous aider à gagner. C’est plate de le voir se blesser. Souhaitons que ça ne soit pas trop grave. »