Jeudi midi à Brossard, les journalistes patientent devant le casier de Josh Anderson. Dix minutes plus tôt, son entraîneur-chef, Martin St-Louis, venait de consacrer une bonne partie de son point de presse à expliquer sa gestion du gros ailier en panne sèche.

Avant de s’amener, Anderson est intercepté par Chantal Machabée, qui fait son travail de vice-présidente aux communications, soit de breffer le joueur en vue des sujets à venir.

On ignore ce qui se dit, mais Anderson se présente avec le sourire, plutôt que de paraître abattu, comme pourraient l’être bien des attaquants dans sa situation.

Ses mots, en revanche, sont ceux d’un ailier en léthargie.

C’est très dur, je ne mentirai pas. Tu te demandes toujours quand tu vas te sortir de cette léthargie. Je dois venir au travail tous les jours, travailler fort et tirer. Je continue à me dire que ça va rentrer.

Josh Anderson

Anderson est coincé à un but, marqué dans un filet désert. C’est donc dire que ses 62 autres tirs cette saison ont été bloqués par le gardien adverse, sans oublier les frappes hors cible, comme celle en troisième période mercredi, à bout portant, sur une rondelle que lui a servie Sean Monahan.

« C’est dur de retourner à la maison, a-t-il convenu. Avant, je regardais les faits saillants, tous les matchs. En ce moment, j’essaie de me tenir loin de ça, pour arriver avec une énergie nouvelle sur la glace. Demain, ce sera une nouvelle journée. »

Sa léthargie n’est pas sans rappeler celle qu’il avait connue en 2019-2020, alors qu’il portait les couleurs des Blue Jackets de Columbus. L’Ontarien avait alors inscrit un but en 27 rencontres, mais on a appris par la suite qu’il jouait malgré une épaule amochée. C’est pour subir une opération qu’il avait mis un terme à sa saison en décembre.

Cette fois, la santé ne semble pas un enjeu. Cinq joueurs ont été exemptés de l’entraînement de jeudi, mais pas Anderson, qui a tiré à profusion au filet pendant l’exercice.

Applaudi malgré tout

Si Anderson souriait, c’est notamment parce qu’il sent un certain appui. Les partisans lui ont réservé un accueil chaleureux quand St-Louis l’a désigné lors de l’interminable séance de tirs de barrage mercredi.

Un accueil qu’il a trouvé « cool ». « Ça veut dire beaucoup à mes yeux. J’aurais aimé une conclusion différente, mais c’était cool d’entendre cette réaction. »

Mais quand ça va mal… Le tir d’Anderson a été bloqué, puis le 12tireur des Penguins, Jansen Harkins, a immédiatement répliqué avec un but pour la victoire.

Et le coach ?

En 1990, le légendaire Jeff Healey s’est attaqué à la très quelconque While My Guitar Gently Weeps des Beatles pour en faire un chef-d’œuvre. On dit parfois qu’un artiste « reprend » une chanson ; dans ce cas-ci, le bon Jeff l’a « arrangée ».

Tout ça pour dire que St-Louis se retrouve un peu comme Jeff Healey, avec comme mandat de réparer Anderson.

PHOTO JOSIE DESMARAIS, ARCHIVES LA PRESSE

L’entraîneur-chef du Canadien, Martin St-Louis

Ça commence avec une certaine dose de confiance. N’incluons pas ici la décision de l’envoyer en tirs de barrage : Anderson était le 12joueur du CH à s’élancer. De plus, Anderson n’a jamais été un spécialiste des tirs de barrage.

L’entraîneur-chef du Canadien continue néanmoins à l’employer en avantage numérique, même si le numéro 17 ne compte qu’un point dans cette situation cette saison. Anderson a été employé pendant 48 % des minutes de jeu en avantage numérique du CH jusqu’ici ; seuls Barrett Hayton, T.J. Oshie et Pierre-Luc Dubois jouent une plus grande part de minutes de leur équipe, parmi les attaquants pris à zéro ou un point en supériorité numérique.

« Il était sur la première vague, là il est sur la deuxième, a toutefois précisé St-Louis. Mais on a beaucoup de blessés. On a aussi des gars qui jouent en désavantage numérique, donc j’essaie de répartir le temps. Mais il a eu une [rétrogradation]. »

À cinq contre cinq, il conserve sa permanence dans les trois premiers trios. De toute façon, St-Louis n’a pas l’air d’un coach pressé d’envoyer son vétéran dans les gradins.

Le moment pour le faire, c’est si le joueur abandonne sur lui-même. Si tu abandonnes, je vais abandonner sur toi.

Martin St-Louis

Les signes que St-Louis observe ? « L’attitude, les habitudes de travail, l’engagement. Il est là, Josh. »

On pourrait ajouter, de façon très réaliste, que St-Louis est condamné à trouver une solution. Au terme de la présente saison, il restera trois ans au contrat d’Anderson, qui compte pour 5,5 millions de dollars par saison. Dans les 12 derniers mois, seuls trois joueurs avec trois ans ou plus de contrat de plus de 5 millions de dollars ont été échangés.

  • Erik Karlsson : 4 ans, à 11,5 millions
  • Kevin Hayes : 3 ans, à 7,143 millions
  • Mattias Ekholm : 3 ans, à 6,25 millions

Des bémols s’imposent. Hayes est le seul attaquant du lot, et les Flyers l’ont presque donné : ils ont dû retenir une partie de son salaire et ont obtenu un choix de 6tour.

Karlsson, à défaut d’être le plus fiable défensivement, venait tout de même de gagner le Norris, et les Penguins ont dû larguer du salaire un peu partout pour l’accueillir. Le genre de contorsion plus facile à faire pour un joueur étoile.

Ekholm, lui, a valu aux Predators un choix de 1er tour, mais on parle ici d’un défenseur de deuxième duo, doté d’un bon physique, capable d’inscrire une trentaine de points par année. Bref, une denrée rare.

Un rachat de contrat ? Si Kent Hughes ne l’a pas fait pour la dernière année de contrat du très unidimensionnel Mike Hoffman, il ne le fera pas pour Anderson, un joueur tout de même capable d’aider l’équipe différemment. « Ce n’est pas comme si Josh et les autres qui sont en difficulté n’aidaient pas l’équipe, a d’ailleurs précisé St-Louis. Tu dois trouver d’autres façons, défensivement ou, pour Josh, amener une présence physique. »

Bref, Anderson et le Canadien sont condamnés à ce que ça fonctionne. Ils ont maintenant une cinquantaine de matchs pour effacer les 30 premiers.

En bref

Harris sur patins, Primeau en congé

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Jordan Harris

Jordan Harris a été aperçu sur la patinoire du centre d’entraînement du Canadien, jeudi. Rappelons que mardi, l’équipe avait annoncé qu’il était à « 10 à 14 jours » d’un retour au jeu. Par ailleurs, cinq joueurs ont eu droit à une journée de traitements et ont été exemptés de l’entraînement. Il s’agit des attaquants Brendan Gallagher, Jake Evans et Christian Dvorak, du défenseur Mike Matheson et du gardien Cayden Primeau. Gallagher avait été ébranlé lors de la défaite de mercredi contre Pittsburgh. Le congé de Primeau était plus étonnant, par contre, puisque l’homme masqué n’a pas joué depuis samedi.

De la visite particulière

PHOTO GREG M. COOPER, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Jack Hughes

Surprise à notre arrivée à Brossard : deux jeunes tout vêtus de rouge s’exerçaient en compagnie du directeur du développement hockey du Canadien, Adam Nicholas. Il s’agissait de Jack Hughes (pas le joueur des Devils, calmez-vous) et Jack Gorton, les fils de Kent Hughes et de Jeff Gorton. Les deux portent les couleurs de Boston University cette saison, et la saison de hockey est en pause pour les Fêtes. Gorton n’est pas repêché, mais Hughes est un choix de 2tour des Kings en 2022. Disons qu’il était particulier de voir un espoir d’une autre organisation porter une culotte du Canadien…