(Columbus) L’anecdote qu’on nous avait racontée était prometteuse. Il était question de Pascal Vincent, chez les Régents de Laval-Laurentides-Lanaudière, qui avait retranché le fils du président de l’organisation. Ledit président était également concessionnaire automobile et fournissait une voiture au jeune coach qu’était Vincent dans les années 1990.

La rumeur veut même qu’au lendemain de la décision de Vincent, le concessionnaire ait repris les clés de la voiture !

Nous voici donc dans la salle de presse du Nationwide Arena, lundi soir, après l’éclatante victoire de 5-2 des Blue Jackets contre les Bruins de Boston. En sa qualité d’entraîneur-chef à Columbus, Vincent s’adresse aux médias locaux, avant de prendre quelques minutes pour s’entretenir avec La Presse, qui avait une maudite bonne anecdote à se faire confirmer, dans les circonstances actuelles de son club.

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Vincent sourit lorsqu’on lui déballe l’histoire. À notre grand dam, la version de notre homme diffère quelque peu. « Je ne rendrai pas ça plus dramatique que ce que c’est ! », dit-il, presqu’en s’excusant.

« C’était un bon joueur, mais son conditionnement n’était pas à point. Des jeunes poussaient et il n’a pas eu sa place. Mais mon contrat n’a pas changé. J’avais une auto fournie. M. Langevin a été vraiment bon avec moi. Mais c’est sûr qu’il était déçu, car c’est un père de famille. »

Un fait demeure, cependant. Vincent devait prendre une décision déchirante au sujet d’un joueur bénéficiant d’un certain statut, et il l’a prise. Comme il a dû le faire à répétition au cours des dernières semaines, après son arrivée en catastrophe dans la chaise d’entraîneur-chef en remplacement de l’éphémère Mike Babcock. On croyait avoir tout vu en début de saison, mais il a renchéri en envoyant Patrik Laine dans les gradins et en clouant au banc Johnny Gaudreau.

« J’ai un système de valeurs. Je coache une équipe, j’ai été élevé comme ça, je ne fais pas de politique. Je ne joue pas de game avec les joueurs, martèle-t-il. On donne des occasions, on prend des notes, on prend des décisions.

« De la façon que je l’explique, il y a l’individu et le joueur. On prend soin de l’individu comme on peut, mais quand vient le temps d’évaluer le joueur, j’ai un sifflet et je suis un coach. Et je n’ai pas beaucoup de marge de manœuvre. Tu as une job à faire. La fais-tu ?

« Prends Mario Lemieux. Il y a Mario, on prend soin de Mario. Et il y a le 66. Quand vient le temps de jouer, c’est le 66. Ce sont deux approches. Ce n’est pas si compliqué que ça. Je sais que ça peut paraître drastique de l’extérieur, mais la communication avec les joueurs est constante, ils savent à quoi s’attendre. On gère les problèmes, je ne les laisse pas traîner, et on passe à autre chose. »

Trois en quatre

La décision n’est évidemment pas passée inaperçue auprès des joueurs. « Ce sont deux gros morceaux de notre équipe, a convenu le capitaine des Jackets, Boone Jenner. C’est arrivé, mais ils ont très bien joué depuis. On est affamés et Pascal est affamé. »

« C’est un message fort envers tout le monde, que ce soient des vétérans ou des jeunes. Il n’y aura pas de cadeau et il faut travailler encore plus fort, a ajouté l’attaquant Alexandre Texier. Peu importe le statut, si tu ne fais pas le travail, tu ne joueras pas. On a plusieurs jeunes talentueux qui poussent et on doit faire la job, car on connaît la sanction, entre guillemets. On a bien compris, et je pense que ça a fait du bien à l’équipe. »

Laine compte un but et une aide en quatre matchs depuis son séjour sur la passerelle le 19 novembre à Philadelphie. Gaudreau a quant à lui inscrit cinq points en six matchs, avec un différentiel de + 5, depuis qu’il a été cloué au banc le 16 novembre. Il aurait pu gonfler sa fiche lundi contre les Bruins, obtenant deux échappées qu’il n’a pas pu convertir en buts.

Collectivement, c’est encore mieux. Depuis la défenestration – figurée, on s’entend – de Laine, Columbus a signé trois victoires en quatre matchs : 7-3 contre Chicago, 2-1 contre le New Jersey et le 5-2 de lundi contre Boston. Et dans leur seule défaite, ils menaient 2-0 en milieu de troisième période, mais la Caroline a remonté la pente.

On aurait pu être quatre en quatre.

Pascal Vincent

L’entraîneur-chef refuse toutefois de s’approprier le mérite pour l’électrochoc. « On jouait du bon hockey avant, mais on ne gagnait pas », plaide-t-il. On note que dans leur séquence de neuf défaites du 4 au 19 novembre, ils ont perdu six fois par l’écart d’un but, dont deux fois en bris d’égalité.

« On avait l’avantage, mais on ne finissait pas en force. C’était une minute, une présence. En Caroline, on a joué un bon match, mais c’était trois séquences, bang, bang, bang. Ils ont marqué.

« Je ne sais pas si c’est lié, mais il y a une chimie qui se crée derrière ça, parce que le joueur X se sent aussi important que le joueur Y. Ils savent qu’ils seront traités de la même façon. On a des standards très élevés et si on ne les atteint pas, il y aura des conséquences. Ce n’est pas le fun à faire. Je n’ai pas de plaisir le soir quand je rentre chez nous, mais je n’ai pas de problème à prendre ces décisions-là. »