Y a-t-il une équipe dont le championnat a été plus souvent célébré que le Canadien de 1993 ?

Aucune mesure scientifique n’existe, évidemment, pour connaître la réponse. Mais il reste que chaque année qui finit par un 3 ou un 8 est l’occasion de célébrer ce que l’équipe menée par Jacques Demers a accompli en 1993.

Cette année, la célébration a lieu cette semaine, et on profite de l’occasion pour souligner la retraite du DDavid Mulder.

PHOTO JOSIE DESMARAIS, LA PRESSE

Le DDavid Mulder

Guy Carbonneau est bien placé pour parler des célébrations. Capitaine en 1993, il a aussi occupé le poste d’entraîneur-chef du Canadien. Hormis une parenthèse de deux ans à Dallas, il est resté à Montréal depuis qu’il a accroché ses patins, et il connaît maintenant l’appareil médiatique derrière le CH, de par son rôle à RDS.

Carbonneau se souvient qu’en 1993, les joueurs se faisaient rappeler que l’équipe n’avait jamais passé « plus de sept ans sans Coupe ». Ces gens avaient visiblement oublié la disette de 1931 à 1944, mais qu’importe : depuis que Maurice Duplessis était redevenu premier ministre, jamais l’équipe n’avait attendu plus de sept ans.

« Donc, en 2003, 10 ans, c’était déjà spécial. Puis ça a monté : 15 ans, 20 ans, 25 ans, et là, 30 ans, a raconté Carbonneau, en mêlée de presse au Centre Bell. Au début, ça faisait un petit velours d’être la dernière équipe à avoir gagné, mais je trouve ça long, là.

« Et pas juste à Montréal. Au Canada, c’est encore plus difficile à comprendre. »

Éric Desjardins, qui habite lui aussi dans la grande région montréalaise, a renchéri sur cette double sécheresse : celle du Tricolore, mais aussi celle des clubs canadiens. Une disette d’autant plus dure à comprendre que la part des équipes canadiennes dans la LNH, sans être à près du tiers comme c’était le cas en 1993, s’est quand même maintenue à 20 % ou plus tout au long de cette période. Toutes proportions gardées, les équipes canadiennes auraient donc dû gagner la Coupe Stanley au moins six fois depuis que Paul DiPietro, Ed Ronan et Gary Leeman l’ont fait.

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Éric Desjardins

Proportion des équipes canadiennes dans la LNH

  • Depuis 2021 : 21,9 %
  • 2017-2021 : 22,6 %
  • 2011-2017 : 23,3 %
  • 2000-2011 : 20 %
  • 1999-2000 : 21,4 %
  • 1998-1999 : 22,2 %
  • 1996-1998 : 23,1 %
  • 1995-1996 : 26,9 %
  • 1993-1995 : 30,8 %

Pour nous, c’est fantastique de se retrouver. Mais pour les fans, ce n’est pas plaisant. Je suis maintenant un fan. Je suis un ancien, mais je suis un fan, et j’ai hâte de revoir la Coupe à Montréal, mais aussi au Canada. Je regarde beaucoup de hockey et j’espère que des équipes seront compétitives pour nous faire vivre ça.

Éric Desjardins

Pour Patrice Brisebois, la longue période sans Coupe ne fait que prouver le côté « exceptionnel » du millésime 1993 du CH. « La façon dont on l’a fait, c’est exceptionnel. Dix victoires en prolongation, évoque-t-il. Personne ne nous voyait là. Il y avait Québec, Boston… Pittsburgh, c’était l’équipe à battre. »

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Patrice Brisebois

« En tant que jeune, je trouvais que plus les séries avançaient, meilleurs on était. On arrivait en prolongation et j’étais confiant, je savais qu’on allait gagner. C’est facile à dire après coup, mais on avait le meilleur gardien, Patrick rentrait dans la tête des autres équipes. On ne savait jamais qui allait marquer, mais on savait qu’on gagnerait. C’est ça qui était beau de 1993. »

Réunion de famille

Une forte majorité des membres de l’édition y étaient. Selon une liste fournie par le CH, il ne manquait que Jean-Jacques Daigneault, John LeClair, Kirk Muller et Kevin Haller parmi ceux qui ont disputé la plupart des matchs en séries. Jacques Demers, dont l’état de santé complique désormais de telles sorties, n’y était pas non plus.

Le groupe s’est retrouvé mercredi pour un souper, et remettait ça jeudi. « Ça ne change pas vraiment, les caractères restent les mêmes, on est juste plus blancs, plus vieux, on a des enfants, des petits-enfants. Les comiques restent les comiques, les plus sérieux restent plus sérieux », décrit Desjardins.

On devine, bien sûr, que les quinquagénaires que la plupart sont devenus vont fêter moins fort que les jeunes adultes de naguère. Parlez-en à Éric Desjardins, qui, en tant que Québécois ET héros du match no 2 en finale, a eu de nombreuses occasions de festoyer.

Un été au Québec, comme gagnant de la Coupe Stanley avec le Canadien, c’était comment ? « C’est ben fatigant ! répond-il en riant. Ils parlent du hangover de la Coupe Stanley… Je pense qu’on a eu ça ! »

Desjardins écorche les Flyers

Les trois décennies sans Coupe Stanley du Canadien font peut-être jaser, mais Éric Desjardins a aussi joué pour les Flyers qui, eux, atteindront visiblement les 50 ans sans gros trophée en 2025. L’ancien défenseur n’a pas été tendre envers son ancienne organisation. « Ils ne se rapprochent pas. Danny Brière [le DG] a beaucoup de travail à faire. Ils ont fait des “moves” qui m’ont un peu déconnecté. L’échange de [Claude] Giroux… C’est peut-être une décision commune, mais il n’y a plus d’identité. C’est dur à regarder pour un ancien. Ça va peut-être changer. Ils ramènent des anciens, Keith Jones, John LeClair dans l’organisation. Et l’entraîneur, on peut toujours se questionner… » L’entraîneur en question étant bien sûr John Tortorella.