La nature a horreur du vide, et, franchement, y a-t-il plus vide que trois jours de suite sans match du Canadien en plein mois d’octobre ?

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Ce vide se fait particulièrement sentir quand le dernier match avant lesdits trois jours de congé s’est soldé par un cuisant revers du CH et que le capitaine et plus haut salarié du club, Nick Suzuki, se cherche. C’était un peu le thème du jour en ce samedi au Centre Bell.

Ça a commencé après l’entraînement matinal, quand Martin St-Louis avançait que les médias sont plus prompts à se concentrer sur « le négatif, sur ce qui doit être corrigé ». C’est là que le collègue Luc Gélinas est intervenu avec des mots de sagesse comme lui seul en détient le secret.

« C’est pire quand vous ne jouez pas ? », a-t-il suggéré à St-Louis.

Réponse de l’entraîneur : « Je sais. Il faut que tu t’accroches à quelque chose ! »

Cette fois, cependant, St-Louis n’aura pas à se préoccuper de propos trop négatifs sur son équipe d’ici au prochain match, puisque le Tricolore a vaincu les Capitals 3-2 en prolongation, samedi soir.

L’avantage numérique n’a mis que 27 secondes à générer un but, tandis que Nick Suzuki et ses ailiers Cole Caufield et Rafaël Harvey-Pinard ont bourdonné en zone adverse dès leur première présence. Bref, d’entrée de jeu, les fameux aspects négatifs qui avaient dominé les conversations prenaient le bord.

PHOTO DAVID KIROUAC, USA TODAY SPORTS

Cole Caufield (22) et Hardy Haman Aktell (4)

« J’étais mauvais »

Cela dit, les doutes formulés sur la tenue du capitaine étaient visiblement justifiés. St-Louis lui-même avait indiqué cette semaine que Suzuki devait « être meilleur ».

L’Ontarien ne comptait qu’une passe en trois matchs. Un échantillon certes mince, mais c’était d’ailleurs une fiche identique à celle de son homologue des Capitals, Alexander Ovechkin, et lui non plus n’a pas échappé aux questions sur ses performances vendredi.

« Des fois, vous posez questions difficiles, a rappelé St-Louis, samedi. Je ne veux pas mentir. J’ai eu des conversations avec lui, il a été le premier à dire qu’il doit mieux jouer. »

Suzuki venait tout juste de parler exactement dans ce sens dans le vestiaire. « J’étais assez mauvais dans les deux matchs précédents, a-t-il admis. Je savais que je devais mieux joueur pour que l’équipe connaisse du succès. […] Contre Chicago, je tournais en rond sans que ça mène à quoi que ce soit, et ça a comme continué contre le Minnesota. »

Ses insuccès ont-ils été suranalysés pendant la pause ? « Tout le monde analyse tout, et je le fais moi-même. Je savais que je devais être meilleur », a-t-il martelé.

Ce qu’il a accompli. Il a conclu le match avec deux aides, pas exactement un hasard au terme d’une soirée où le numéro 14 a continuellement alimenté le 22. Caufield a d’ailleurs terminé la rencontre avec 12 tentatives de tirs, dont cinq cadrées. La rondelle se rendait à lui.

« C’est notre meneur, je ne suis pas inquiet pour Nick, a assuré l’autre héros de ce match, le gardien Jake Allen. C’est le dernier gars dans ce vestiaire pour qui je suis inquiet. Tout le monde aura quelques matchs où il se sent moins comme lui-même, où il marque moins. Il a montré son calme ce soir. »

PHOTO CHRISTINNE MUSCHI, LA PRESSE CANADIENNE

Le gardien de but du Canadien de Montréal Jake Allen (34) fait un arrêt contre Connor McMichael (24) des Capitals de Washington.

L’idée sera maintenant de trouver une certaine constance, un objectif formulé par St-Louis. Chose certaine, le calendrier ne sera pas de tout repos, le Canadien amorçant une série de cinq matchs en huit jours. « Notre prochain entraînement est seulement vendredi », a rappelé le coach.

Cette cadence vient toutefois avec l’avantage de ne pas laisser de vides à combler. C’est vrai pour ceux qui les couvrent comme pour ceux qui s’analysent un peu trop.

En hausse : Sean Monahan

Il a marqué en avantage numérique, a abattu de la besogne en désavantage numérique et a été dominant aux mises en jeu. Deux points bien mérités pour lui.

En baisse : Michael Pezzetta

Il a connu une première présence du tonnerre, faisant résonner le poteau de Darcy Kuemper. Mais les nombreuses pénalités des deux côtés l’ont éliminé du script du match.

La citation du match

En quatre matchs, c’est la troisième fois qu’on se retrouve en avance de deux buts en troisième période. Ça, j’aime ça.

Martin St-Louis, au sujet des avances perdues par le Canadien en troisième période

Dans le détail

« Allen ! Allen ! »

C’était déjà arrivé, mais ça faisait un bail. Le nom de Jake Allen a résonné dans les gradins du Centre Bell, samedi soir, une salutation méritée à l’endroit du gardien du Tricolore qui a reçu la première étoile après une performance de 30 arrêts. Il a réservé ses deux plus belles actions à Anthony Mantha, sur un deux contre un en première période, et à Nicklas Bäckström, arrivé en deuxième vague en fin de deuxième période. Sur cette dernière séquence, Allen a fini les deux jambières dans les airs, comme à l’époque où il y avait juste 21 clubs. « La situation à trois gardiens est difficile, mais Jake est un pro, a souligné Martin St-Louis. Tu sais à quoi t’attendre avec lui. Cette première étoile, il l’a méritée. » Allen, lui, a surtout mis l’accent sur la manière dont ses coéquipiers l’ont protégé. « Après [la défaite] contre le Wild du Minnesota, c’est impressionnant de voir la manière dont le groupe a répondu », a-t-il dit. Et à propos des partisans qui ont scandé son nom, il a noté que c’était « le genre de chose dont on se souvient à la fin d’une carrière ».

Ovechkin se dégêne

On a fait grand cas des deux matchs consécutifs sans qu’Alexander Ovechkin se voie attribuer de tirs au but, une première dans toute sa carrière. Le Russe s’est rapidement assuré que sa sécheresse ne s’étire pas davantage. Dès la septième minute de la première période, en avantage numérique, il a reçu la rondelle au point de mise en jeu à la droite du gardien, son lieu de travail favori. Son tir n’a pas été très puissant, mais il a atteint la cible. Dans l’ensemble de la rencontre, il a obtenu huit tentatives de tirs, dont cinq cadrées. Or, étrangement, c’est par ses passes qu’il a été le plus menaçant. Au premier vingt, sa remise soulevée, en surnombre, était quasi parfaite pour Anthony Mantha, qui s’est buté à Allen. Puis, en troisième, c’est lui qui a mis la table pour le premier but de Ryan Strome, qui réduisait l’écart à 2-1. Voilà néanmoins qu’Ovechkin n’a toujours pas trouvé le fond du filet après quatre matchs cette saison, se contentant de deux mentions d’aide. C’est la deuxième fois de sa carrière qu’il connaît un si lent départ, alors qu’en 2012-2013, il n’avait brisé la glace qu’à sa cinquième sortie.

Six joueurs pour un but

De Jake Allen à Mike Matheson, derrière le but du Tricolore. De Matheson à Brendan Gallagher, devant le filet. De Gallagher à David Savard, le long de la bande à sa droite. De Savard à Tanner Pearson, en sortie de zone. De Pearson à Sean Monahan, par le truchement d’une longue remise en territoire adverse. Monahan transporte la rondelle, se défait du défenseur adverse, remet le disque vers le centre alors qu’une mêlée se forme devant le but. Gallagher fonce sur la rondelle libre et marque. Le premier but de la saison du petit numéro 11 a été le fruit d’un effort collectif qu’on pourrait qualifier de quasi parfait. « J’ai vu Pearson foncer vers le filet. Généralement, de bonnes choses arrivent quand il y a autant de monde là », a analysé Sean Monahan. « C’était du vintage Gallagher, a renchéri Jake Allen. Depuis des années, c’est comme ça qu’il gagne son salaire. Je suis content pour lui qu’il marque son premier but de la saison de cette façon. De la bonne façon. »

Simon-Olivier Lorange, La Presse