La réinitialisation, ou le reset on the fly, expression popularisée par Marc Bergevin à Montréal, est un art difficile à maîtriser.

Elle consiste à conserver ses joueurs vieillissants tout en y amalgamant des jeunes avec parcimonie, en évitant de reconstruire agressivement afin de demeurer compétitif chaque année.

Il faut trouver des perles au repêchage puisque cette méthode vous prive de repêcher parmi les premiers. Il faut aussi des recrues de caractère pour prendre leur place et s’épanouir parmi les vétérans. Et un chef d’orchestre de premier plan derrière le banc pour former un tout homogène avec un groupe de joueurs de différentes générations.

Les Bruins l’ont bien réussi depuis quinze ans. Leur capitaine Patrice Bergeron a bien vieilli, on a déniché des superstars après le top dix au repêchage, David Pastrnak et Charlie McAvoy, et le DG Don Sweeney a réussi de judicieux échanges.

Les Stars constituent l’autre exemple de réussite de cette méthode. Ils n’ont pas eu la vie facile contre le surprenant Kraken, mais ils viennent d’atteindre le carré d’as pour la deuxième fois en quatre ans. Ils avaient disputé la finale de la Coupe Stanley en 2020.

Dallas demeure aussi un club difficile à cerner. Ils ont aussi raté les séries trois fois au cours des sept dernières saisons, dont l’année après leur participation à la finale.

Les changements ont été subtils depuis six ans, mais de l’équipe de 2017, 24e au classement général, après sa deuxième place l’année précédente, reste seulement Tyler Seguin, Jamie Benn, Radek Faksa et Esa Lindell.

Même s’ils ont repêché une seule fois dans le top cinq ces dernières décennies, un observateur pourrait avec un peu de mauvaise volonté faire mal paraitre leurs recruteurs.

Entre 2012 et 2018, la plupart de leurs choix de premier tour n’ont pas connu la carrière espérée : Radek Faksa, Valeri Nichushkin (perdu à l’Avalanche sans rien obtenir en retour), Jason Dickinson, Julius Honka, Denis Gurianov, Riley Tufte et Ty Dellandrea.

Honka a été repêché un rang devant Dylan Larkin, des Red Wings, Tufte devant Tage Thompson, 94 points avec les Sabres cette saison. Mathew Barzal, Thomas Chabot et Kyle Connor étaient encore disponibles lorsque Gurianov a été repêché au 12e rang en 2015. Dallas l’a largué au Canadien pour obtenir le joueur de location Evgenii Dadonov à la date limite des échanges.

Malgré tout, ce même observateur, avec un peu de bonne volonté cette fois, pourrait faire passer les recruteurs des Stars pour des génies.

Gurianov a peut-être constitué un flop en 2015, mais le choix de second tour, Roope Hintz, 49e au total, est devenu le centre numéro un de l’équipe. Ce colosse finlandais de 6 pieds 3 pouces et 215 livres vient de connaitre sa meilleure saison en carrière, à 26 ans, avec 75 points, dont 37 buts, en seulement 73 matchs.

Hintz vient au deuxième rang des compteurs de la LNH en séries avec 19 points en 13 matchs, un seul de moins que Connor McDavid. S’il ne se blesse pas au troisième tour, il surpassera le capitaine des Oilers rapidement.

La fameuse cuvée de 2017 a transformé les Stars. Dallas devait repêcher en huitième place, en vertu de son 24e rang au classement général, mais l’équipe a remporté le troisième lot et choisi Miro Heiskanen derrière Nico Hischier et Nolan Patrick, devant Cale Makar.

Heiskanen est sans doute le secret le mieux gardé de la Ligue nationale. Ce jeune homme de 23 ans vient non seulement de connaitre une saison de 73 points, mais il est aussi très efficace défensivement et possède la pugnacité propre aux Finlandais. Aucun joueur n’a été utilisé davantage en séries. Il est employé en moyenne 28 : 15 par match.

Le directeur du recrutement des Stars, Joe McDonnell, 62 ans, arraché des Red Wings de Detroit lorsque Jim Nill a quitté cette organisation pour accepter le poste de directeur général à Dallas en 2014, a aussi repêché le gardien Jake Oettinger au 26e rang et Jason Robertson au second tour.

Pour obtenir Oettinger, le gardien numéro un des Stars depuis deux ans et l’un des meilleurs de sa profession à seulement 24 ans, Nill a cédé son 29e choix au total et un choix de troisième tour de façon à grimper de trois rangs. Il avait obtenu au préalable ce choix de fin de premier tour des Ducks en retour de Patrick Eaves à la date limite des échanges quelques mois plus tôt.

Robertson, 23 ans, 39e choix au total, vient de connaitre une monstrueuse saison de 109 points, dont 46 buts. Seuls Connor McDavid, Leon Draisaitl, David Pastrnak, Nikita Kucherov et Nathan MacKinnon ont fait mieux. Il n’est pas aussi productif en séries, mais frôle quand même le point par match.

Joe Pavelski, acquis sur le marché des joueurs autonomes il y a quelques années, complète le duo formé de Robertson et Hintz pour former un redoutable premier trio.

Les Stars ont donc trouvé leur gardien numéro un, leur défenseur numéro un, et deux membres de leur premier trio en seulement deux cuvées, et avec seulement un choix parmi les 25 premiers !

Un petit dernier s’est ajouté au groupe cette saison, le centre droitier Wyatt Johnston, 20 ans depuis dimanche, 23e choix au total en 2021, 24 buts cette saison à sa première expérience chez les pros. Johnston a aussi marqué le but d’assurance mardi en fin de troisième période avec un superbe tir du revers pour éliminer le Kraken dans la septième rencontre.

Non seulement ces jeunes ont-ils progressé, mais Jamie Benn semble avoir retrouvé la fontaine de jouvence à 33 ans. Il vient de connaitre une saison de 78 points, dont 33 buts, après une baisse de rendement importante ces quatre dernières saisons. Tyler Seguin a amassé 28 points de moins que son vieux complice, mais il joue de façon inspirée en séries et compte cinq buts, dont quatre au premier tour contre le Wild.

Nill a saupoudré sa formation de quelques acquisitions peu coûteuses, Max Domi, Mason Marchment, Ryan Suter, Colin Miller, Dadonov, et vous avez un club à quatre victoires d’atteindre à nouveau la finale.

Vous avez les adeptes de reconstructions. D’autres comme Boston, Dallas et Los Angeles préfèrent la réinitialisation. Certains s’accrochent trop longtemps à leurs vétérans.

Peu importe la recette, il faut prendre les bonnes décisions.

Une longue traversée du désert… canadien

Avec l’élimination des Oilers d’Edmonton et des Maple Leafs de Toronto, ce week-end, le Canadien de Montréal demeure la dernière équipe canadienne à avoir remporté la Coupe Stanley. Trente ans déjà…

La Coupe se remportera donc dans le Sud des États-Unis, en Floride, au Texas, dans le Nevada ou en Caroline du Nord. Ironiquement, les Panthers, les Stars, les Golden Knights et les Hurricanes n’existaient pas lorsque les Patrick Roy, Damphousse, Desjardins, Carbo, Lebeau et Muller ont soulevé ce précieux trophée pour la dernière fois à Montréal.

Les Panthers étaient sur le point de naître, les Stars préparaient leur déménagement du Minnesota à Dallas, les Hurricanes se trouvaient encore à Hartford, au Connecticut, et s’appelaient les Whalers, et on était loin à l’époque d’imaginer un club dans la capitale mondiale du jeu.

On retrouvait trois équipes au sud de l’Illinois : Tampa, San Jose et Los Angeles, avec la naissance des Sharks en 1991 et du Lightning en 1992. Il y en a désormais onze, le tiers de la Ligue, sans compter Seattle situé sur la côte Ouest américaine.

À ne pas manquer

1- La LNH espérait la parité en instaurant le plafond salarial. Or, depuis la pandémie, l’écart entre les meilleures équipes et les pires n’a jamais été aussi grand.

2- En 2022, pour la première saison de son histoire, l’Alliance de Montréal a atteint son objectif de développer un bassin de partisans fidèles. En 2023, la priorité est ailleurs et se résume bien simplement : gagner.

3- L’avenir des Coyotes en Arizona repose sur un important vote mardi soir.