C’est une phrase qui semble avoir été prononcée des dizaines de fois depuis que la LNH s’est installée en Arizona en 1996. Cette fois, c’est plus vrai que jamais : l’avenir des Coyotes est vraisemblablement sur le point d’être déterminé.

Les citoyens de Tempe se sont prononcés dans un référendum sur un vaste projet de développement dont les résultats seront dévoilés en soirée ce mardi. Une victoire du Oui confirmerait à long terme la présence de l’équipe dans le marché. Une victoire du Non pourrait signifier une relocalisation rapide. La situation en cinq points.

L’enjeu

Sur papier, la question à l’enjeu est plutôt simple : la population de Tempe, ville universitaire située en banlieue de Phoenix, appuie-t-elle un mégaprojet de développement qui inclurait la construction d’un aréna pour les Coyotes de l’Arizona ? En pratique, c’est évidemment plus complexe.

Le projet complet est évalué à 2,3 milliards US, majoritairement financé par des investissements privés, bien qu’une portion de financement public, notamment par le truchement d’allégements fiscaux, soit prévue. Un quartier de divertissement entier serait bâti. En plus de l’amphithéâtre, on y trouverait un centre d’entraînement pour les Coyotes, mais aussi des restaurants, des boutiques, des espaces de bureaux ainsi que des appartements de luxe.

Le conseil municipal s’est prononcé en faveur du projet, appuyé avec enthousiasme par Gary Bettman, commissaire de la LNH. La décision sera toutefois prise par référendum.

La saga

Les amateurs de hockey du Québec connaissent cette saga par cœur. Suivre les Coyotes de l’Arizona, c’est assister à un long accident de train dont on ne sait jamais s’il va finir. L’organisation a eu sept propriétaires majoritaires différents en à peine 26 saisons d’existence. Année après année, les assistances de l’équipe sont parmi les plus faibles du circuit.

Depuis 10 ans, une seule série éliminatoire a été disputée dans le désert. Les finances du club sont serrées au possible : au cours des dernières années, ses gestionnaires sont devenus des spécialistes pour gonfler artificiellement leur masse salariale en acquérant des joueurs blessés qui ne leur coûtent virtuellement rien en argent sonnant.

En juin 2019, le milliardaire Alex Meruelo a acquis la franchise. En 2021, le site Athletic publiait une enquête révélant un environnement de travail toxique au sein du club, ainsi que des irrégularités sur le plan de la gestion financière de l’équipe. En 2022, l’équipe a dû déménager après que la Ville de Glendale, où les Coyotes jouaient depuis 2003, eut mis fin au bail en raison de multiples retards de paiements et factures impayées. En attendant la construction d’un nouvel aréna, ils se sont installés au Mullett Arena, petit amphithéâtre de 4600 places situé sur le campus de l’Université de l’Arizona à Tempe.

PHOTO JOE CAMPOREALE, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Le Mullett Arena

La campagne

Ce qui ressemblait à la base à une annonce enthousiaste de la LNH et du promoteur Bluebird, société de développement créée par Alex Meruelo lui-même, est devenu une véritable bagarre électorale. Deux camps se sont formés. « Tempe Wins » [Tempe gagne, en français], financé par Meruelo et les Coyotes, a déjà dépensé des centaines de milliers de dollars pour inciter les citoyens à voter en faveur du projet. Le conseil municipal actuel et un groupe d’anciens maires lui ont donné leur appui. Shane Doan, ex-gloire de la franchise, et Gary Bettman ont aussi multiplié les prises de parole en leur faveur.

Face à eux, « Tempe First » [Tempe d’abord] milite férocement pour que l’aréna et son quartier du divertissement ne voient jamais le jour. Sur le site web de l’organisation, on implore les citoyens de rejeter une proposition qui aurait pour effet de « remplir les poches d’un millionnaire corrompu qui a rompu ses engagements avec d’autres municipalités par le passé ».

La poursuite

Coup de théâtre : en mars dernier, la Ville de Phoenix a intenté une poursuite contre la Ville de Tempe, au motif que le projet viole une entente entre les deux municipalités. Celle-ci prévoit une zone d’exclusion résidentielle à proximité de l’aéroport Sky Harbor afin éviter les désagréments liés au trafic aérien pour les résidants, notamment sur le plan du bruit.

Au début d’avril, la société Bluebird a contre-attaqué avec une poursuite de 2,3 milliards, soit la valeur du projet total, invoquant une ingérence de la Ville de Phoenix. Dans un point de presse subséquent de « Tempe Wins », l’ex-maire Hugh Hallman a dénoncé une manœuvre « politique ». « L’extorsion et l’intimidation doivent être stoppées », a-t-il martelé.

La suite

Les citoyens avaient jusqu’à mardi dernier pour envoyer leur vote par la poste, encore que ceux qui avaient perdu ou endommagé leur bulletin avaient jusqu’à ce mardi pour voter en personne. Les résultats devraient être dévoilés ce mardi en fin de soirée, à l’heure du Québec.

Même s’il a historiquement défendu avec énergie la présence des Coyotes dans la région de Phoenix, Gary Bettman pourrait être à court d’arguments si le Non l’emportait. À de multiples reprises, on a prédit la mort des Coyotes, et le moment pourrait être venu. Bettman a plusieurs fois répété que la résidence au Mullett Arena était une solution temporaire. Celle-ci a notamment pour effet de priver l’organisation de millions de dollars de revenus en billets vu la faible capacité de l’amphithéâtre.

Si la LNH se résolvait à une relocalisation, on peut parier que la ville de Houston partirait avec une longueur d’avance. Si toutefois le Oui l’emportait, on s’attendrait à ce que les Coyotes s’ancrent en Arizona pour longtemps encore. En attendant, sait-on jamais, le prochain rebondissement.

D’après les informations du Sports Business Journal, de l’Arizona State Press et de gophnx.com