En 2017, Nikolas Brouillard a décidé de quitter le hockey professionnel pour retourner sur les bancs d’école. À l’aube de 2023, le voilà à 27 ans avec un baccalauréat en poche… et de retour chez les pros, dans la Ligue américaine, où il est l’un des défenseurs les plus productifs.

Pour raconter le parcours atypique de Nikolas Brouillard, il faut remonter à l’automne 2016. À 21 ans, le Québécois s’est présenté au camp d’entraînement des Marlies de Toronto avec en poche un premier contrat professionnel dans la Ligue américaine. Après un parcours junior réussi, il espérait faire sa place au sein du club-école des Maple Leafs.

« Je pensais que j’avais le talent pour ça et que j’allais être capable, mais je suis arrivé dans une équipe comme les Marlies qui était vraiment paquetée », raconte-t-il à La Presse en direct de San Diego, où il évolue actuellement avec le club-école des Ducks d’Anaheim.

Le hockeyeur a fait sa place dans la formation, mais n’a pas joué pendant les deux premières semaines, puis a été rétrogradé dans l’ECHL, à Orlando. Les dirigeants des Marlies lui ont alors dit avoir l’intention de le rappeler au bout de quelques matchs. Ça ne s’est pas produit.

Cette saison-là, Brouillard n’a disputé qu’une rencontre dans la Ligue américaine, le 25 janvier 2017. Une blessure l’a ensuite tenu à l’écart du jeu pendant deux mois et demi, soit le reste de la saison. C’est là qu’il a commencé à envisager d’aller jouer au niveau universitaire au Québec. D’anciens coéquipiers qui jouaient désormais avec les Redbirds de McGill tentaient de le convaincre de se joindre à eux.

Pendant qu’il réfléchissait, Brouillard a reçu une invitation à participer au camp des Golden Knights de Vegas à l’automne 2017, ce qu’il a fait. La formation du Nevada, convaincue, lui a offert un nouveau contrat à un volet. Le défenseur a pris le temps de réfléchir.

« Je regardais les signatures et j’étais le 16e défenseur. Les 15 autres avant moi étaient sur un contrat de la Ligue nationale », se souvient-il.

L’année d’avant [en 2016-2017], je voyais des gars de 28, 29 ou 30 ans qui étaient encore dans l’ECHL. Ils n’étaient pas allés à l’école et n’avaient pas vraiment de plan à part le hockey. Je ne voulais pas être ce gars-là, rendu à cet âge-là. Ça m’a fait peur un peu.

Nikolas Brouillard

Il a donc refusé l’offre des Knights et s’est tourné vers les rangs universitaires. Il « écartait » du même coup le rêve de la LNH. Mais celui de la Ligue américaine était toujours bien présent. Seulement différé…

Retour à l’école

Brouillard n’a jamais regretté sa décision. En étudiant à McGill, le natif de Saint-Hyacinthe pouvait côtoyer ses amis et sa famille pour la première fois en plus de six ans.

PHOTO TIRÉE DU SITE DE L’UNIVERSITÉ MCGILL

En trois saisons et 57 rencontres avec les Redbirds de l’Université McGill, Nikolas Brouillard a récolté 49 points.

« Ça m’a fait du bien et je suis content de l’avoir fait. Aller à l’université, ça a ouvert mes horizons. Ça m’a permis de mettre mon attention sur autre chose », soutient-il.

En 3 ans et 57 rencontres avec les Redbirds, il a récolté 49 points. Et à sa dernière saison, en 2019-2020, il a été nommé défenseur de l’année dans le circuit U Sports.

Je ne sais pas où je serais aujourd’hui si j’avais continué à jouer professionnel [à l’époque], mais mes années à McGill ont été parmi les plus belles de ma vie.

Nikolas Brouillard

En 2020-2021, quand la saison universitaire a été annulée en raison de la pandémie, Brouillard a demandé à son agent d’essayer de lui trouver une place où jouer. Comme il ne lui restait que deux cours à distance à faire pour obtenir son baccalauréat en économie et gestion, il était prêt à se déplacer.

C’est là que l’occasion s’est présentée avec les Gulls de San Diego. En janvier 2021, il a signé un contrat d’un an à un volet dans la Ligue américaine. Et puis, juste comme ça, il était de retour chez les pros.

En raison de la COVID-19, l’équipe a gardé plus de joueurs en extra, dont Brouillard. Il a été laissé de côté quelques matchs, puis « il y a eu des blessés, des rappels, des gars malades, donc [il a] commencé à jouer ». En 29 rencontres, Brouillard a récolté 14 points, ce qui lui a valu un nouveau contrat d’un an avec une année d’option.

PHOTO TIRÉE DU COMPTE TWITTER DES GULLS DE SAN DIEGO

Nikolas Brouillard compte 26 points en 32 matchs cette saison, le troisième total chez les défenseurs dans la Ligue américaine.

L’année dernière, en raison de la COVID-19, il a dû partager son temps entre l’attaque et la défense ; il a inscrit 39 points en 66 matchs. « Ç’a été une bonne année pour moi, pour ma confiance », évoque-t-il.

Un rêve « réanimé »

Si les Gulls occupent aujourd’hui le dernier rang du classement général, Brouillard, lui, se trouve au troisième rang des pointeurs chez les défenseurs de la Ligue américaine. Et son rêve de la Ligue nationale est soudainement « réanimé ».

La prochaine étape, c’est de signer un contrat de la Ligue nationale à deux volets.

Nikolas Brouillard

Ce pourrait être avec les Ducks ou une autre équipe. Il pourrait aussi décider d’aller jouer en Europe ; il a d’ailleurs déjà reçu plusieurs offres alléchantes.

Quoi qu’il arrive, Nikolas Brouillard pourra toujours être fier de s’être écouté. D’avoir pris le risque d’opter pour un chemin différent. Et de n’avoir jamais abandonné.

« Je suis vraiment content du parcours que j’ai fait, d’avoir encore une chance d’être si près de la LNH à cet âge-là. Je trouve que c’est encore plus cool après le parcours que j’ai eu. Si ça peut donner espoir à d’autres gars qui jouent [au niveau] universitaire… »