(Tempe, Arizona) Il n’est point de réel voyage dont la destination ultime ne soit le point de départ, aurait un jour dit un vieux sage dont l’identité reste assez floue.

Quiconque travaille sur la route combat inévitablement une espèce de lassitude. La succession des chambres d’hôtel, les vols à attraper, la vie dans les valises, l’éloignement de la famille… Tôt ou tard, il fait bon rentrer chez soi.

Les joueurs et les entraîneurs des Coyotes de l’Arizona peuvent en témoigner. Contre le Canadien de Montréal, lundi soir, ils disputaient seulement leur neuvième match au Mullett Arena, et ce, à leur 30joute de la saison.

Leur nouveau domicile, situé sur le campus de l’Université de l’Arizona, à Tempe, n’étant pas encore prêt à recevoir ses nouveaux locataires à temps plein, les Coyotes ont amorcé leur campagne avec six rencontres dans le nord-est du continent. Ont suivi quatre duels à Tempe, avant une séquence suicidaire de 14 matchs, dans autant de villes différentes, en 33 jours. Parcourir la liste des destinations donne le vertige : Washington, Buffalo, Long Island, Newark, Manhattan, Las Vegas, Nashville, Raleigh, Detroit, St. Paul, Los Angeles, Vancouver, Calgary et Edmonton.

« À la fin, on en avait assez », a témoigné lundi matin l’entraîneur-chef des Coyotes, André Tourigny.

« Quand même nous, les coachs, on est épuisés, on se doute que les joueurs sont fatigués aussi. »

Cet interminable périple s’est plutôt bien amorcé, avec trois victoires consécutives, qui ont toutefois été suivies de quatre défaites. Un gain en Caroline a ravivé les troupes, avant que six défaites plombent sérieusement leur moral.

« Quand on s’est envolés pour Los Angeles, on savait qu’on allait travailler, a repris Tourigny. Le dernier match, à Edmonton, a été un massacre. Je ne sais plus le score, mais c’était pas mal à pas beaucoup. »

Vérification faite : 8-2. À ce point, pour laisser les joueurs s’aérer l’esprit loin de la patinoire, on avait réduit au maximum la charge d’entraînement.

« On était rendus là, mentalement. C’était vraiment difficile. C’est ce qui nous faisait peur, car on l’avait déjà vécu pendant de longs voyages : la fatigue mentale, l’épuisement. »

« À l’hôtel, tu n’es pas aussi actif, a-t-il encore dit. T’écoutes Netflix, t’es tout le temps au restaurant… Tandis qu’à la maison, t’as ta routine, t’es dans tes affaires. Ç’a fait du bien de revenir. »

À la maison

Le domicile des Coyotes est devenu célèbre pour son maigre nombre de places disponibles – à peine 5000 sièges. Un format tout ce qu’il y a de plus normal pour un amphithéâtre universitaire, mais une aberration pour un club de la LNH.

Il s’agit en réalité d’une solution temporaire en attendant la construction d’un aréna grand format, scénario toujours hypothétique à l’heure actuelle. Le projet sur la table, approuvé par le conseil municipal, doit encore passer le test d’un référendum citoyen.

Or, la maison est encore en rénovation. Le public qui se rend au Mullett Arena n’y voit que du feu, puisque les espaces où circulent les partisans sont prêts. En coulisses, toutefois, certaines situations font sourire. Profitant du climat favorable de l’Arizona, l’équipe visiteuse fait une partie de son entraînement hors glace à l’extérieur. Les vestiaires sont fonctionnels, mais ils sont séparés de l’édifice principal. Des tentes font le lien entre les éléments, à la manière de tunnels.

Le matin du duel Canadien-Coyotes, Martin St-Louis a donné un point de presse dehors. Tourigny l’a fait sous une tente aux apparences d’un abri Tempo. Des avions volant à basse altitude – l’aéroport est tout près – forçaient les journalistes à tendre l’oreille.

PHOTO SIMON-OLIVIER LORANGE, LA PRESSE

Martin St-Louis, entraîneur-chef du Canadien, a donné un point de presse dehors, lundi.

Ces imperfections sont toutefois le dernier de ses soucis.

« Ce sont des détails, lance-t-il. Les gars adorent l’emplacement de l’aréna, c’est proche de tout. Et l’atmosphère est électrique autour des matchs. »

Cette mention n’est pas attribuable au hasard. L’ancien amphithéâtre des Coyotes, à Glendale, était le cauchemar de toute équipe professionnelle. Excentré dans une banlieue tranquille, noyé dans un environnement commercial, il n’a jamais suscité de grande popularité.

Collée sur Phoenix et bouillonnante de vie grâce, notamment, à son immense université, Tempe offre une expérience bien différente. Les joueurs trouvent leurs repères, et les partisans peuvent adopter leur équipe.

Ce retour chez eux sourit vraisemblablement aux Coyotes qui, avant d’affronter le Canadien, avaient gagné trois de leurs quatre précédents matchs à domicile.

L’équipe ne fera pas de vieux os sous le soleil pour autant. Étrangement, même s’il lui reste une bonne trentaine de matchs à disputer à Tempe, jamais elle ne connaîtra de séquence plus longue que quatre rencontres à la maison. Le mois de janvier sera par ailleurs éprouvant : 15 matchs en 26 jours. Ce n’est qu’en février que Tourigny et ses hommes pourront « sortir la tête de l’eau ».

Puisque le calendrier est publié pendant l’été, l’entraîneur a pu se préparer à affronter cette tempête logistique. « On savait dans quoi on s’embarquait », confirme-t-il.

« On en a parlé aux joueurs au premier jour du camp d’entraînement. Ça allait être ça, la saison. Ce sont les cartes qui nous ont été données, on ne peut rien faire d’autre. »

La réponse, jusqu’ici, est exemplaire, assure-t-il. « Les gars font ça comme des grands ; personne ne se plaint, personne n’est marabout. »

Il faut dire qu’avec un soleil radieux et un mercure de 16 degrés à une semaine de Noël, tout semble plus facile.