« Le verre est toujours à moitié plein pour moi », a dit Martin St-Louis samedi soir. Dans un souci d’équité, enfilons donc notre costume de grincheux pour voir le verre à moitié vide.

Sa réponse faisait référence à la répartition de la production offensive au sein de son équipe. Une production qui a encore été générée en grande majorité par Cole Caufield (un but, une passe) et Nick Suzuki (deux buts). Kirby Dach, leur ailier droit depuis quatre matchs, a quant à lui fourni trois passes.

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Mais pendant que le CH était propulsé par un seul trio, les Golden Knights, eux, ont vu leur quatrième trio marquer deux fois plutôt qu’une. Résultat : nos amis de la ville d’Ocean’s Eleven ont quitté Montréal avec une victoire de 6-4 aux dépens du Tricolore.

Alors, que dire de la répartition de l’attaque ? « C’est sûr que c’est du positif, a répondu St-Louis. Ça serait la même si tous les autres produisaient et qu’on avait de la misère avec notre premier trio. De mon expérience de joueur, c’est dur d’avoir tout en place en même temps. Tu bouches un trou, il y en a un autre qui se crée. Les gars savent qu’ils doivent produire plus. Il faut juste trouver les réponses. »

Le problème du CH, c’est qu’en ce moment, plusieurs trous sont débouchés. En excluant les buts marqués dans un filet désert, Montréal a inscrit 32 buts cette saison. Or, Suzuki ou Caufield (et souvent les deux à la fois) ont participé à 21 de ces 32 buts. C’est donc dire que sur les deux tiers des buts (65,7 %), il y a au moins un des deux comparses qui a obtenu un point.

Jonathan Drouin, Jake Evans, Rem Pitlick (laisse de côté) et Evgenii Dadonov (absent) n’ont toujours pas marqué parmi les attaquants. À l’exception d’Evans, affecté à des missions défensives, les trois autres sont principalement des joueurs offensifs, mais ça ne se voit pas dans leurs statistiques. Un autre attaquant purement offensif, Mike Hoffman, est coincé à un but.

« Les autres gars ont des chances, ça ne rentre juste pas, a protesté Suzuki. On est le premier trio pour une raison et c’est pour produire de l’attaque. Si on ne le fait pas, on n’aide pas l’équipe à gagner. »

On comprend ici la mentalité du capitaine, mais à l’œil, on voit mal ces chances dont il parle. Le pire dans tout ça, c’est que les données de Natural Stat Trick placent Brendan Gallagher au 1er rang des attaquants du CH pour les chances de marquer à 5 contre 5 obtenues par tranche de 60 minutes (11,79), tandis que Caufield (8,04) vient au 5e rang et Suzuki (5,12) au 11e rang ! On a ici devant nous un cas où les statistiques avancées ne correspondent pas à la perception que l’on a en regardant les matchs.

Par ailleurs, bien que le trio de Suzuki affiche un niveau de production digne d’un premier trio, globalement, c’est insuffisant pour le Canadien. L’équipe est dans le dernier tiers de la LNH pour la moyenne de buts par match (2,83, à égalité au 21e rang).

Un beau défi pour Martin St-Louis dans les prochaines semaines…

Dach trouve ses aises

Ne nous laissons pas simplement sur ses considérations de verre à moitié vide ; après tout, c’est dimanche, une journée qu’il faut aussi commencer avec un brin de légèreté.

Et force est d’admettre que l’adaptation de Kirby Dach se déroule plutôt bien. Avec 10 points en 12 matchs, le grand attaquant connaît carrément ses meilleurs moments depuis son arrivée dans la LNH en 2019. Il avait alors amorcé sa carrière avec 10 points à ses 15 premiers matchs, mais n’a jamais pu retrouver un tel rythme depuis.

Sa passe sur le premier but de Suzuki était un joli jeu. À première vue, trois joueurs des Golden Knights étaient dans la trajectoire de la passe. Mais deux d’entre eux étaient en mauvaise position pour bloquer la rondelle avec leur bâton, si bien que la remise s’est rendue au destinataire.

Pour expliquer les succès du numéro 77, St-Louis a réutilisé un concept dont il parlait souvent l’an dernier à son arrivée en poste : le choix du « meilleur jeu ».

« C’est un bon fabricant de jeu, il est capable de faire avancer le jeu, de passer la rondelle là où elle devrait aller, en général. Il y a beaucoup de moments où tu vois juste un jeu, mais il y a beaucoup de jeux possibles sur la glace. Kirby est bon pour faire le meilleur jeu, au lieu de juste un jeu. Il aide Cole et Nick à passer plus de temps en zone offensive. »

En hausse

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Kirby Dach

Kirby Dach

Avec trois passes, il totalise maintenant sept points à ses quatre derniers matchs.

En baisse

PHOTO ERIC BOLTE, USA TODAY SPORTS

Nicolas Hague (14) des Golden Knights de Las Vegas et Joel Edmundson (44) du Canadien de Montréal

Joel Edmundson

Après un bon premier match jeudi à Winnipeg, il a ressemblé davantage à un joueur qui n’a pas eu de camp d’entraînement et qui disputait seulement un deuxième match depuis avril.

Le chiffre du match

PHOTO ERIC BOLTE, USA TODAY SPORTS

Victoire des Golden Knights à Montréal, samedi soir au Centre Bell

17

Mine de rien, le Canadien a accordé 17 buts à ses 4 derniers matchs. L’unité défensive a étonnamment tenu le coup en début de saison, mais c’est plus difficile depuis une semaine.

Ils ont dit

PHOTO ERIC BOLTE, USA TODAY SPORTS

Nick Suzuki (14)

Les présences après les buts sont très importantes. Mon trio a accordé un but tout de suite après un de leurs buts. Ça ne peut pas arriver. Une équipe de vétérans ne fait probablement pas cette erreur.

Nick Suzuki, au sujet des trois buts en quatre minutes des Golden Knights

C’est un jeu dangereux. Je ne sais pas ce qui lui passait par la tête. Quand tu vois un joueur se retourner comme ça, la dernière chose que tu fais est d’essayer de le pousser sur la bande. J’espère que Petro [Alex Pietrangelo] va bien, c’est l’un de ces jeux nuls que vous… Ça ne devrait jamais arriver.

Reilly Smith, concernant la mise en échec de Josh Anderson

En deuxième période, on avait de bonnes intentions, des options, mais on n’était pas capables d’exécuter nos jeux, et ça relançait l’attaque de l’autre équipe. Nos défenseurs ne changeaient pas. On était têtus dans cette période-là. On a eu une bonne poussée en fin de deuxième période, mais on n’a pas écoulé la punition en début de troisième période. J’ai encore aimé notre retour.

Martin St-Louis

Je pense encore que je ne tire pas assez, mais je dois me placer dans de meilleures positions. C’est une question de temps.

Juraj Slafkovsky

Nous avons toujours su que c’était une bonne équipe. Tu regardes Suzuki et Caufield… Chaque fois qu’ils ont la rondelle, ils sont très dangereux. Nous savions qu’ils pousseraient en troisième période.

Nicolas Roy, au sujet du Canadien

Je suis nouveau pour Marchy [Marchessault], mais j’ai coaché contre lui et c’est un joueur très compétitif, intense, fier. Il essaie de devenir un joueur plus complet, mais il marquera toujours des buts.

Bruce Cassidy, à propos de Jonathan Marchessault

Katherine Harvey-Pinard, La Presse

Dans le détail

Une mise en échec « sale »

PHOTO ERIC BOLTE, USA TODAY SPORTS

Josh Anderson (17) met en échec Alex Pietrangelo (7).

En milieu de troisième période, alors que les Golden Knights menaient 5-2, Josh Anderson y est allé d’une mise en échec par-derrière sur le défenseur vedette Alex Pietrangelo devant le banc de l’équipe adverse. Le visage du défenseur a cogné lourdement contre la bande et une mêlée a éclaté. Anderson a écopé d’une pénalité de 5 minutes pour mise en échec illégale ainsi que d’une inconduite de partie sur la séquence. « Sincèrement, c’était quand même sale, a laissé tomber Marchessault. Je ne pense pas qu’il a fait exprès parce que la rondelle était sur le bord de la bande et que Petro s’est tourné, mais c’est fou. Il faut que tu [freines], tu ne peux pas continuer ! C’est un gars de, quoi, 220 livres ? J’étais juste à côté et j’ai vu la bouche d’Alex sur la bande. » L’entraîneur-chef de la formation du Nevada, Bruce Cassidy, est pour sa part d’avis que « ce n’était pas nécessaire », mais il s’est dit heureux de la réaction de ses joueurs et d’accord avec les pénalités imposées. Quant à Martin St-Louis, il a rappelé que tout « arrive vite ». « C’est facile d’appuyer sur pause et de tout analyser ça. […] J’espère que ce ne sera pas trop négatif », a-t-il ajouté, faisant référence à une éventuelle suspension.

Un trio d’originaux

PHOTO GODOFREDO A. VÁSQUEZ, ASSOCIATED PRESS

Jonathan Marchessault (81) et William Karlsson (71)

Reilly Smith, William Karlsson et Jonathan Marchessault sont avec les Golden Knights depuis la création de la franchise, en 2017. Et ils ont, depuis, pratiquement toujours évolué sur le même trio – un fait rare dans la Ligue nationale. Leur chimie a donné du fil à retordre au CH tout au long du match. Les trois joueurs ont notamment collaboré de belle façon sur le deuxième but des leurs. « Ça fait quand même six ans qu’on joue ensemble, et c’est rendu qu’on ne se parle même plus, a déclaré Marchessault. On sait où on se trouve sur la patinoire, on sait quel jeu on va faire et on est toujours sur la même longueur d’onde. » Le Québécois de 31 ans, qui a récolté un but et une passe dans la victoire, est d’ailleurs devenu samedi soir le premier joueur de l’histoire de la franchise à inscrire 300 points. « C’est un bel [exploit], mais ce n’est pas comme un Ironman » à la Philip Kessel, a lancé le principal intéressé à ce sujet, se disant fier, mais jamais satisfait de son rendement.

Des Golden Knights disciplinés

PHOTO GRAHAM HUGHES, LA PRESSE CANADIENNE

Sean Monahan (91) et Alec Martinez (23)

Quand les Golden Knights se sont présentés au Centre Bell, ils formaient l’équipe la moins punie par match de la Ligue nationale. Et ils ont continué sur cette lancée face au Canadien. Leur première infériorité numérique n’est venue qu’en milieu de troisième période, quand Alec Martinez et Alex Pietrangelo ont répliqué à Anderson à la suite de sa mise en échec illégale. Ils ont tous deux été chassés deux minutes ; Nick Suzuki en a d’ailleurs profité pour inscrire son deuxième but du match et réduire l’écart à 5-3. C’est donc dire que le Canadien a marqué quatre fois à ses huit avantages numériques lors des quatre derniers matchs, ce qui fait contraste avec les matchs précédents (une seule réussite en 24 occasions).

Katherine Harvey-Pinard, La Presse