Que feriez-vous si on mettait le nom de Cole Caufield dans la même phrase que Sidney Crosby, Evgeni Malkin, Alexander Ovechkin, Nicklas Backstrom, Eric Staal et Connor McDavid ? Beaucoup de cris d’allégresse si vous êtes un partisan ou un membre du Canadien, on devine.

Le lien entre les six légendes vivantes susmentionnées ? Ce sont les seuls joueurs qui, depuis le lock-out de 2004-2005, ont amassé 100 points en une saison à 22 ans ou moins.

Et que vient faire Caufield dans cette discussion ? C’est qu’en 21 matchs depuis l’arrivée de Martin St-Louis derrière le banc du Canadien, il totalise 25 points. Comme 21 matchs équivalent à un quart de saison, Caufield serait donc en voie de tutoyer la centaine (98 points, pour être précis) sur 82 matchs.

Entendons-nous, ce ne sont que des projections, et les projections sont imparfaites, sinon Brian Savage aurait connu de multiples campagnes de 60 buts. Chaque année ou presque, en début de saison, des attaquants profitent des systèmes défensifs moins à point pour nous faire croire qu’ils marqueront 50 buts en 50 matchs. Mais dans les faits, personne n’y est parvenu depuis Brett Hull il y a 30 ans.

Dans ce cas-ci, il y a l’effet nouveauté, mais surtout le fait que le Tricolore joue sans aucune forme de pression, ce qui fausse un brin les données.

N’empêche qu’après un quart de saison, nous avons un peu plus de recul pour mesurer à qui profite cet effet de nouveauté, et qui présente essentiellement le même rendement qu’auparavant.

L’aiguille bouge

A-t-on déjà vu, depuis les belles années de Mac Daddy et Daddy Mac, un duo de jeunes susciter autant d’enthousiasme que Caufield et Nick Suzuki ? Poser la question, c’est y répondre.

C’est le jour et la nuit. La Presse a compilé la moyenne de points par match des joueurs du Canadien cette saison sous Dominique Ducharme et sous St-Louis. Sans grande surprise, Caufield et Suzuki sont les attaquants qui se sont le plus améliorés dans l’équipe.

Vient ensuite Jeff Petry, mais disons que la barre n’était pas haute. On note deux données intéressantes dans son cas. D’une part, sa moyenne de 0,53 point par match est certes plus basse que celle de l’an dernier, mais tout porte à croire que son rythme de 0,76 en 2021 était une anomalie statistique. D’ailleurs, en trois saisons de 2017 à 2020, sa moyenne s’est établie à 0,54.

L’autre donnée est celle du pourcentage des chances de marquer à cinq contre cinq.

À ce chapitre aussi, Petry fait meilleure figure. Sous Ducharme, le Tricolore obtenait 44 % des chances de marquer quand Petry était sur la patinoire ; ce chiffre est passé à 48 % sous St-Louis (source : Natural Stat Trick). Or, même si le Canadien offre une meilleure fiche sous St-Louis, le partage des chances de marquer demeure désavantageux pour l’équipe.

Chris Wideman et Joel Armia ferment la marche pour nos cinq joueurs les plus améliorés. La tenue d’Armia va certainement rassurer la direction montréalaise, mais son défi, comme toujours, sera la constance. Quant à Wideman, ses statistiques avancées ne l’avantagent pas : le pourcentage de chances de marquer contrôlées par le Canadien quand il est sur la patinoire est passé de 52 % sous Ducharme à 39 % sous St-Louis.

Par ailleurs, 7 des 10 points de Wideman depuis le changement d’entraîneur ont été amassés en avantage numérique. On devine que s’il est de retour l’an prochain, Wideman n’obtiendra pas autant d’occasions à cinq contre quatre que cette saison.

L’aiguille ne bouge pas

On ne note aucune chute vertigineuse de production depuis le changement de garde derrière le banc.

Laurent Dauphin et Brendan Gallagher enregistrent les plus fortes baisses, mais elles demeurent marginales.

Mike Hoffman, lui, affiche une formidable constance. Sa production est essentiellement la même, et son ratio de chances de marquer indique que le Canadien se fait toujours autant pilonner à cinq contre cinq : sous Ducharme comme sous St-Louis, le Canadien contrôle seulement 36 % des chances de marquer quand il est sur la patinoire. C’est pratiquement du deux pour un en faveur de l’adversaire.

Cette catégorie des joueurs à la production stable serait intéressante à analyser de l’intérieur. On peut en effet se demander ce qui fait en sorte que des éléments se soient autant écrasés sous l’ancien régime, tandis que d’autres, comme Josh Anderson, ont maintenu leur niveau habituel même dans la tempête.

On suit l’aiguille

Puisqu’ils n’ont pas assez joué sous l’un ou l’autre des entraîneurs, Rem Pitlick, Paul Byron et Christian Dvorak ont été exclus de la présente analyse.

Les trois ont connu de bons moments. Pitlick est le 3marqueur du Canadien depuis le 9 février (14 points en 21 matchs), Byron produit de l’attaque à un rythme intéressant (7 points en 17 sorties), tandis que Christian Dvorak semble s’améliorer de match en match depuis son retour.

Par contre, dans les trois cas, le ratio de chances de marquer n’est guère rassurant pour l’équipe. Il est de 37,9 % pour Byron, de 30,6 % pour Pitlick et de 25,9 % pour Dvorak. Autrement dit, si ça se poursuit à ce rythme, les succès de ces joueurs ne seront pas éternellement au rendez-vous.