(Winnipeg) Comment ne pas apprécier une anecdote de voyage qui commence par « il a plu tous les jours sauf le dernier » ?

C’est un peu avec ce sentiment que les Jets de Winnipeg sont rentrés à la maison, dimanche soir. Après avoir signé une victoire à l’arraché contre les faibles Coyotes de l’Arizona, mais surtout après avoir perdu quatre matchs de suite, dont deux contre des adversaires directs dans la course aux séries éliminatoires.

Car si le portrait des séries est figé depuis le 2 janvier dans l’Association de l’Est, c’est encore grand ouvert dans l’Ouest. Les Jets se sont toutefois drôlement compliqué la vie, et l’on peut se demander s’ils pourront se sortir à temps du trou boueux dans lequel leur charrette s’est enfoncée.

C’était jour d’entraînement optionnel pour les Jets, lundi, et seuls Andrew Copp et Nathan Beaulieu ont été désignés pour discuter avec les journalistes de la situation épineuse dans laquelle se retrouve leur équipe, à la veille d’un affrontement contre le Canadien.

La cassette dans le magnétophone avait été savamment calibrée.

Beaulieu, à propos de la victoire à Glendale rendue possible par une nécessaire remontée en troisième période : « On a montré du caractère et on a ramené deux points contre une équipe qui joue bien. »

Copp, sur le calendrier de l’équipe en mars : « C’est une chance pour nous d’amasser quelques victoires, de retrouver la santé et de construire sur la victoire de dimanche. Les 8 à 10 prochains matchs seront primordiaux pour nous. »

Beaulieu, encore, sur le fait que le Canadien a remporté ses cinq derniers duels : « Au point où on en est, l’adversaire importe peu. Nous ne pensons qu’à gagner des matchs. Que ce soit contre Montréal ou contre Chicago, ça ne change rien. On pense aux deux points. »

Vous voyez le genre.

Explications

Quand on regarde la formation des Jets, il y a lieu de se questionner sur les circonstances qui ont mené à une telle précarité. Il y a certes eu une certaine dose d’instabilité – par exemple, un changement d’entraîneur, juste avant Noël, à la suite de la démission surprise de Paul Maurice. Dans tous les cas, on ne s’attendait pas à ce qu’ils soient forcés à se battre pour leur survie. Pas aussi tôt, en tout cas.

Sur papier, leur top 6 offensif demeure l’un des plus dangereux de la LNH. Cinq attaquants en bleu et blanc produisent à un rythme égal ou supérieur à 0,74 point par match. Seuls les Panthers de la Floride (7) ainsi que l’Avalanche du Colorado et les Blues de St. Louis (6) font mieux à ce chapitre.

Pierre-Luc Dubois, avec déjà 40 points en 52 matchs, pourrait bien connaître la meilleure saison de sa carrière. Et Kyle Connor, avec 32 buts en 53 matchs, est en position d’atteindre la barre des 50 buts. En l’absence de Nikolaj Ehlers, qui a raté les 18 derniers matchs en raison d’une blessure à un genou, il est devenu le grand leader de cette attaque, alors que Mark Scheifele semble avoir ralenti et que Blake Wheeler a lui aussi dû composer avec des blessures.

PHOTO ISAIAH J. DOWNING, USA TODAY SPORTS

Avec 32 buts en 53 matchs, Kyle Connor est devenu le grand leader de l’attaque des Jets.

C’est d’ailleurs Connor qui a marqué le but gagnant, dimanche, en Arizona, ainsi que le but d’assurance dans un filet désert.

« Sa vitesse pour décocher un tir et son intelligence autour du but sont ses meilleurs atouts, estime Andrew Copp. Il tire beaucoup de fierté à être celui sur qui on peut se fier, et son jeu continue d’évoluer. C’est lui qui a plusieurs fois porté notre attaque sur son dos. Son leadership est énorme. »

Derrière ce top 6 effrayant, c’est toutefois bien mince. Un indice : Adam Brooks se retrouve à l’heure actuelle sur le troisième trio. Oui, le même Adam Brooks qui a disputé quatre matchs avec le CH et qui a été réclamé au ballottage quatre fois en un peu plus de quatre mois.

Défense à risque

Devant le filet, le gardien Connor Hellebuyck, malgré des statistiques ordinaires – moyenne de buts alloués de 2,88 et taux d’efficacité de ,912 –, continue de tirer son équipe du pétrin. Selon le site de statistiques avancées Evolving Hockey, il se maintient parmi les 10 meilleurs du circuit en ce qui a trait aux buts « sauvés ».

Il y a là un indice fort que, contrairement à ce qu’on pourrait croire, les Jets pourraient être en bien plus mauvaise posture.

Vu les acquisitions de Brendan Dillon et de Nate Schmidt pendant la saison morte, on s’attendait à ce que la défense des Jets sorte enfin la tête de l’eau, deux ans après avoir vu cinq de ses six principaux membres partir au cours du même été.

Or, c’est probablement dans ce département que l’écart est le plus marqué entre l’effectif sur papier et les résultats sur la glace.

Les Jets arrivent au 30rang de la LNH en matière de chances de marquer de qualité accordées par tranche de 60 minutes de jeu à 5 contre 5, selon le site Natural Stat Trick, et ils sont 28e pour les buts attendus accordés. En désavantage numérique aussi, c’est tout sauf facile : 76,6 % d’efficacité, au 23rang.

Voilà donc cette drôle d’équipe là où elle est. À six points d’une place en séries, avec seulement 6 % des chances d’y accéder, selon le site Money Puck.

Un lecteur particulièrement cynique noterait que c’est 6 % de plus que le Tricolore. Mais n’allons pas là.

« Il faut juste amasser des matchs », a plutôt fait observer Andrew Copp. Il n’a pas tort.