Il affirme se sentir, parfois, comme s’il avait encore 21 ans. Et il maintient qu’il est le joueur qui a la plus belle apparence de son club – « je n’ai même pas un cheveu gris ! »

Mais P. K. Subban n’est plus le jeune joueur que les partisans montréalais ont vu évoluer dans la première moitié de sa carrière. À 32 ans, il est le doyen chez les Devils du New Jersey, une très jeune formation au demeurant. Et lundi soir, à Ottawa, il a disputé le 800e match de sa carrière.

Sur le plan offensif, il n’a plus sa touche des belles années. Ses 15 points en 43 matchs cette saison équivalent à une production d’une trentaine de points par 82 rencontres, un rythme similaire à celui de l’an dernier. Il pointe désormais au cinquième rang chez les défenseurs des Devils sur le plan du temps de glace. Pour la première fois de sa carrière, son utilisation est inférieure à 22 minutes par match ; le voilà même à 19 min 40 s. Les missions défensives les plus corsées ne lui sont plus confiées non plus ; ce sont plutôt les droitiers Damon Severson et Dougie Hamilton qui en héritent.

Bref, Subban n’est pas ce qu’il a déjà été. Mais cela ne signifie pas pour autant qu’il arrive au bout du chemin. Simplement que son rôle a changé.

« La ligue change, elle se rajeunit, a-t-il constaté mardi matin en visioconférence. Je contrôle seulement ce que je peux, et ça veut dire contribuer dans le rôle qu’on me donne et faire de mon mieux. »

Il ne cache pas que les Devils ont traversé, depuis son arrivée il y a deux ans et demi, des moments « difficiles ». Depuis le début de la saison 2019-2020, en effet, il s’agit de l’une des équipes les moins prolifiques de la LNH. Or, cette « sorte de reconstruction » lui a donné l’occasion de devenir un « mentor » pour ses jeunes coéquipiers. « Je n’avais jamais été dans cette position dans ma carrière auparavant. J’adore ça », dit-il.

Celui qui a popularisé le numéro 76 – en tout cas davantage que Jozef Balej – se voit encore jouer longtemps. Le temps au moins de gagner la Coupe Stanley, au New Jersey ou ailleurs. Et surtout, tant qu’il pourra « contribuer » au succès d’une équipe.

Il affirme qu’il n’a pas vu passer ces 800 matchs en saison, auxquels il faut ajouter 96 joutes supplémentaires en séries éliminatoires. Il se dit encore rempli d’énergie, lui qui a profité des longues périodes d’inactivité attribuables à la pandémie de COVID-19 pour s’entraîner, un luxe rare dans les longues saisons de la LNH.

Il se sent aussi en pleine forme, plus qu’il l’aurait cru considérant la masse de travail qu’il a abattue pendant sa carrière.

Ce qui n’a pas pris une ride, toutefois, c’est sa passion pour le hockey. Et ce n’est pas son entraîneur qui va s’en plaindre.

« P. K. veut toujours jouer plus, et tu veux toujours coacher un gars qui veut jouer plus », souligne Lindy Ruff, pilote des Devils.

Entre plusieurs chaises

Le cas de Subban n’est pas banal. Car si tout ce qui est écrit plus haut est vrai, cela s’inscrit néanmoins en totale contradiction avec son statut sur le plan salarial. Celui qui gagne en moyenne 9 millions par saison est en effet le quatrième défenseur le mieux payé du circuit. Un salaire que lui avait consenti le directeur général du Canadien Marc Bergevin en 2014, un an après qu’il eut remporté le trophée Norris.

Avec le salaire d’une superstar et la forte personnalité qu’on lui connaît, mais une contribution qui s’approche à celle d’un joueur de soutien, Subban se retrouve donc entre plusieurs chaises.

Ruff en s’en formalise que peu. « Il y a des soirs où P. K. joue plus, d’autres où il joue moins, a-t-il résumé. Il peut encore être très efficace, il ne faut pas regarder que les minutes. On gère les matchs de manière à ce que les joueurs qui jouent le mieux soient ceux qui jouent le plus. »

Énième élément qui ne rajeunit personne : Subban écoule présentement la dernière année de son contrat de huit ans, le plus onéreux de l’histoire du Tricolore à l’époque où il l’a signé.

Cet état de fait, ainsi que la vilaine posture des Devils au classement, font de lui un candidat évident pour un échange au cours des prochaines semaines, encore que l’acheteur potentiel devra user d’imagination pour absorber son contrat, en tout ou en partie.

Le défenseur maintient que « tout est possible », y compris un retour à Montréal comme joueur autonome l’été prochain, mais qu’il ne s’attarde pas à la possibilité de changer d’adresse. Jusqu’à nouvel ordre, il est un membre des Devils du New Jersey, rappelle-t-il, et il composera avec la situation si elle se présente.

À court terme, il aimerait bien aider ses coéquipiers à signer quelques victoires, une rareté dans leur cas par les temps qui courent. Les Diables rouges ont en effet subi à Ottawa une septième défaite de suite. Leur fiche de 3-11-0 depuis le 1er janvier les place au dernier rang de la LNH pour le pourcentage de points de classement (21,4 %), à égalité avec les Flyers de Philadelphie, tout juste derrière le Canadien, leur adversaire de mardi soir.

Subban estime que son équipe peut encore s’accrocher à son rêve d’atteindre les séries éliminatoires. Les chances d’y arriver sont bien minces. Mais on ne pourra certainement jamais, au grand jamais, reprocher à l’ancien du CH son optimisme.